Dans cette série à la fois charmante et intrigante, Home before dark, une petite fille enquête sur une affaire criminelle liée à l’enfance de son père.
C’est quoi, Home before dark ? Lorsque Matthew Lysko (Jim Sturgess) perd son emploi de journaliste, il retourne vivre dans la petite ville où il a grandi, avec sa femme et ses trois filles. Parmi elles, Hilda (Brooklyn Prince) suit ses traces : à 9 ans, elle publie ses propres articles et est obsédée par le journalisme. Peu de temps après son arrivée, elle s’intéresse à la mort suspecte d’une voisine et déterre alors une vieille histoire : la disparition d’un petit garçon, ami de son père, survenue une trentaine d’années auparavant. Une affaire que tout le monde voudrait oublier mais sur laquelle Hilda va enquêter avec le soutien de ses parents, quitte à mettre les nerfs de la police à rude épreuve.
Le pitch de Home before dark, nouvelle série de Apple TV+, fait partie de ceux que l’on a lus mille fois : dans la petite ville dont sa famille est originaire, une journaliste enquête et se retrouvé mêlée à une vieille affaire qui va révéler bien des secrets et bouleverser la petite communauté. Sauf que la journaliste en question a 9 ans. Et que, aussi incroyable que cela puisse paraître, l’histoire est inspirée de faits réels et d’une jeune fille qui existe bel et bien. Dans la vraie vie, l’alter-ego de la jeune héroïne s’appelle Hilde Lysiak. On pourrait dire qu’elle est au journalisme ce que Greta Thunberg est à l’écologie : une enfant prodige (elle est née en 2006) et déterminée, à la vocation affirmée et qui bénéficie de l’attention des médias. Ayant mené l’enquête sur plusieurs affaires – y compris un meurtre survenu dans la ville natale de son père – Hilde Lysiak jouit du titre honorifique de « plus jeune membre de la Société des journalistes professionnels ».
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Les dix épisodes qui composent cette première saison (la série a déjà été renouvelée pour une saison 2) s’inspirent librement de sa vie, et l’histoire est d’ailleurs présentée comme « inspirée de faits réels ». Dans la série, tout commence lorsque Matthew Lysko perd son emploi de journaliste au New York Daily News. Avec sa femme et ses trois filles, il retourne s’installer dans la petite ville balnéaire de Erie Harbour où il a grandi et où vit toujours son père, atteint d’une forme de la maladie d’Alzheimer. Hilda, la cadette, est obsédée par la profession de son père et à neuf ans, elle publie déjà son propre journal. A peine arrivée, elle décide d’écrire un article sur la mort apparemment accidentelle d’une voisine, qu’elle pense être un meurtre. L’article lui vaut de nombreuses critiques et moqueries, personne ne la prend au sérieux, mais Hilda ne se décourage pas. Au contraire, elle se plonge dans l’affaire et découvre un possible lien avec un vieux dossier : la disparition mystérieuse de Richie, le fils du maire, kidnappé plus de vingt ans auparavant et dans laquelle son père a été entendu comme témoin.
Dans cette mystérieuse affaire remontant à plusieurs décennies, ce sont les secrets et les traumatismes des adultes qui vont apparaître au grand jour. Mais la série adopte majoritairement le point de vue de Hilda, avec de nombreuses scènes filmées à sa hauteur, pour montrer le monde tel qu’elle le voit. Il va sans dire qu’il était essentiel de choisir une jeune actrice capable de porter la série sur ses frêles épaules ; c’est indéniablement le cas de Brooklyn Price, qui incarne parfaitement cette aspirante journaliste passionnée, mini Veronica Mars très intelligente et culottée, adorable et jamais agaçante.
Le journalisme est une vocation, un sacerdoce qu’elle a chevillé au corps : comme les meilleurs reporters (dont ses idoles, Bob Woodward et Carl Bernstein qui ont révélé le scandale du Watergate), elle n’hésite pas à interroger les témoins, solliciter la police, éplucher les dossiers d’époque, se faufiler partout, mais elle respecte un code de déontologie et protège jalousement ses sources. Épisode après épisode, indice après indice, on la suit à mesure qu’elle lève le voile sur les incohérences du dossier, les témoignages écartés, les pistes négligées. Et ce, malgré l’hostilité du chef de police (Louis Herthum) et de son fils Frank Jr. (Michael Weston) qui travaille sous ses ordres, mais avec l’aide de l’officier Mackenzie «Trip» Johnson (Aziza Scott) et de deux de ses camarades de classe.
Le plus réussi, c’est l’habileté avec laquelle Home before dark se tire de son paradoxe intrinsèque : c’est un peu comme si Stephen King avait écrit pour Disney Channel. Voilà un thriller sombre, avec pour héroïne une petite fille qui part sur son vélo enquêter sur une affaire de disparition d’enfant, avec en arrière-plan un meurtre et des suspicions de maltraitance, l’implication de son père, les relations complexes d’une petite communauté et la manière dont les adultes réagissent face à ce mystère qui les a tous touchés des années plus tôt Pourtant, la série reste accessible à un large public, évite les scènes de violence, distille des touches de légèreté et d’humour, des éléments de drama adolescent (par exemple la vie amoureuse de la sœur de Hilda, Izzie). C’est donc à la fois un drame familial, un true crime, un thriller et une série d’aventure pour ados. Le mélange pourrait être indigeste ; il l’est parfois mais le plus souvent, Home before dark mixe le tout avec efficacité, construisant ainsi un récit varié et étrangement accrocheur.
Avec sa jeune héroïne aussi adorable qu’audacieuse, Home before dark est une jolie petite surprise. Malgré quelques stéréotypes et quelques rebondissements faciles, c’est un thriller classique bien mené, dont le ton sombre est mâtiné de touches plus légères et d’arcs narratifs plus divertissants. Oscillant habilement entre gravité et fraîcheur, polar et teen drama, la série est susceptible de plaire à toute la famille, et on passe un bon moment. En période de confinement, voilà qui est appréciable.