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On débriefe pour vous … Kingdom, la nuit des morts-vivants coréens

La série sud-coréenne Kingdom tient en haleine en nous projetant dans un royaume féodal en proie aux intrigues de palais, à la misère du peuple et … à des zombies.

C’est quoi, Kingdom ? Dans la Corée impériale, le souverain est atteint d’une maladie mystérieuse et certaines rumeurs prétendent même qu’il est mort. Le Premier ministre (Ryu Seung-ryong) et sa fille Cho (Kim Hye-jun), la jeune reine enceinte, interdisent à quiconque d’approcher le monarque et entendent faire du futur enfant l’héritier du trône, au détriment du prince Lee Chang (Ju Ji-hoon). Accompagné de son garde du corps Mu-yeong (Kim Sang-ho), celui-ci part au sud pour interroger le médecin impérial. Sur place, il rencontre la doctoresse Seo-bi (Bae Doo-na) et découvre qu’une terrible pandémie s’est déclarée : les personnes infectées décèdent, avant de revenir à la vie  et de dévorer quiconque se trouve sur leur passage…

Si le cinéma asiatique nous a offert récemment d’excellents films de zombies (Dernier train to Busan par exemple), c’est aujourd’hui Kingdom, série sud-coréenne produite par Netflix, qui s’empare du sujet en adaptant le webcomic Kingdom of Gods. Son auteur, Kim Eun-hee, en a écrit  les six épisodes, tous réalisés par Kim Seong-hun (à qui l’on doit l’époustouflant Tunnel). Le duo signe un récit simple et classique mais soigné, mêlant drama historique en costumes et histoire de zombies. Remarquable sur le plan visuel (scènes d’horreur haletantes, combats chorégraphiés, costumes et décors superbes, choc chromatique entre les palais et la misère du peuple), la série exploite les éléments à sa disposition, jongle entre les deux registres pour créer un univers atypique, exotique aux yeux d’un spectateur occidental.  

Série d’horreur centrée sur des morts-vivants, Kingdom s’appuie sur les grands archétypes et conventions du genre  pour raconter l’origine de la maladie, le déclenchement et l’expansion de l’épidémie, la lutte des héros contre les infectés. Mais oubliez les zombies lents et apathiques de George Romero : comme ceux de L’armée des morts de Zach Snyder, ceux de Kingdom sont agiles et courent comme des fous. Ils ont une autre particularité : un peu comme des vampires, ils fuient la lumière du soleil, attaquent la nuit et se cachent pendant la journée. Des caractéristiques qui compensent des rebondissements convenus et donnent lieu à des séquences impressionnantes – attaques de masse, poursuites effrénées et cliffhanger de fin de saison prévisible mais spectaculaire – et de grands moments de tension, lorsque les personnages attendent désespérément une aube qui semble ne jamais vouloir poindre.

Don’t open. Dead Inside

Ceux qui espèrent de grandes séquences de carnage auront leur compte de chair arrachée, de corps en décomposition et de têtes coupées. Mais la série parvient  surtout à distiller un sentiment d’angoisse, à rendre quasiment palpable la peur croissante de ses personnages. Si Kingdom reprend l’idée d’un groupe de personnes disparates qui doivent survivre à l’infestation, la dynamique qui s’instaure est suffisamment intéressante pour enrichir le récit.  Des forêts denses au lacs paisibles en passant  par le dispensaire, les fortins et palais ou les rues boueuses des villages, on suit le Prince (excellent Ju Ji-Hoon) et son fidèle écuyer, auxquels se joignent un mystérieux homme du peuple expert dans le maniement des armes, et la doctoresse Seo-Bi (Bae Doo-na, vue dans Sense8), témoin du déclenchement de l’épidémie et qui semble avoir les connaissances nécessaires pour trouver un remède.

En arrière-plan, une autre histoire se dessine : celle de la lutte pour le trône du monarque malade. Le premier épisode peut décontenancer, la série posant les jalons de cet arc narratif en se focalisant d’abord sur cet aspect politique. Enceinte, l’ambitieuse reine Cho (splendide Kim Hye-jun, dont le regard froid laisse affleurer des instants de doutes) et son père tentent de cacher la vérité sur l’état du Roi afin de placer l’enfant à naître en première place dans la ligne de succession. Héritier légitime, le Prince est accusé de trahison et contraint de fuir le Palais. Traqué par les fidèles de la Reine, risquant d’être arrêté et exécuté, il doit se méfier de tous et ignore qui sont ses alliés et ses ennemis.

Entre ennemis politiques et zombies, le Prince Chang a fort à faire

Kingdom conserve un bon équilibre entre invasion zombie et complot politique, intrigues de palais et scènes de bataille. Mais comme souvent, l’épidémie a aussi une valeur symbolique. Ici, l’origine de la « zombification », c’est la faim :  la faim physique des paysans déguenillés prêts à tout pour survivre, la faim métaphorique de pouvoir qui pousse la Reine et son père à amorcer à leur insu le processus qui va déclencher la maladie. Et comme dans The Walking Dead, on combat les morts mais ce sont les vivants qu’il faut craindre – notamment les puissants, indifférents aux souffrances de ceux qu’ils gouvernent. Certains sont impitoyables et veulent s’emparer du pouvoir ; d’autres, pantins ridicules et glaçants de suffisance (le magistrat Cho Beom-pal et sa suite, personnages grotesques au comique outrancier) abandonnent le peuple à son sort pour sauver leur peau.

Au milieu, extirpé de sa cage dorée, le Prince héritier se heurte à la réalité et à la misère de ses sujets. Héros malgré lui, il se pose alors en défenseur des faibles, évolue entre moments de doutes et manifestation d’autorité, à mesure qu’il prend conscience de son rôle et  trouve la force d’affronter les multiples épreuves – politiques et zombies – qui l’attendent.

Au fil de cette première saison réussie, Kindgom ne cesse de monter en puissance en mêlant drama historique, intrigue politique et série d’horreur. On en ressort groggy, avec une multitude d’interrogations : nos héros parviendront-ils à endiguer l’épidémie ? Le Prince retrouvera-t-il son trône ? Qui est le traître caché dans son entourage ? Et surtout, la question la plus importante : à quand la suite ?! Selon les rumeurs, la production de la saison 2 devrait commencer sous peu. De quoi allécher tout ceux qui ont dévoré ces six épisodes…


Kingdom (Netflix)
6 épisodes de 50′ environ.
Disponible depuis le 25 Janvier

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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