Hugh Laurie revêt l’uniforme de capitaine pour commander l’Avenue 5, au cours d’une croisière sidérale qui s’amuse mais risque le naufrage.
C’est quoi, Avenue 5 ? En 2060, alors que le tourisme spatial est devenu une réalité, les passagers ont embarqué à bord de l’Avenue 5, un luxueux vaisseau qui les emmène en croisière autour de Saturne. Le capitaine Ryan Clarke (Hugh Laurie) dirige avec enthousiasme son équipage et le voyage s’annonce idyllique. Mais un incident technique va transformer le rêve en cauchemar : la croisière ne s’amuse plus du tout. Clarke et son équipe vont devoir gérer la situation tout en calmant la colère et la panique des passagers piégés à des milliards de kilomètres de la Terre.
Après avoir arpenté la Maison Blanche dans Veep, Armando Ianucci nous invite à bord de l’Avenue 5, un vaisseau spatial de croisière commandé par Hugh Laurie. Mais les premiers épisodes de la nouvelle série de HBO (en France sur OCS en US+24) laissent une impression plus que mitigée : même si l’on est indulgent, le résultat s’annonce nettement moins bon que ce qu’on pouvait espérer. Ce n’est pas tout à fait un naufrage, mais le lancement n’est pas non plus réussi…
L’histoire commence alors que l’Avenue 5, le vaisseau spatial qui donne son titre à la série, approche de la planète Saturne. Sous le commandement du charmant capitaine Clarke, considéré comme un héros depuis qu’il a sauvé un autre engin de la catastrophe, la croisière emporte ses passagers dans l’espace et leur permet de profiter de diverses activités : ils participent à des cours de yoga et à des ateliers, visitent la salle des commandes ou se plaignent de leur cabine. Se trouve aussi à bord Hermann Judd, visionnaire et richissime propriétaire de ce tour operator sidéral, qui tente d’attirer clients et investisseurs en communicant en direct avec l’équipe de sa société restée sur Terre.
Mais comme on pouvait s’y attendre, rien ne va se dérouler comme prévu. Un problème technique et la mort accidentelle d’un technicien vont précipiter l’Avenue 5 dans le chaos : détourné de sa trajectoire initiale, coincé en orbite et en proie aux avaries, le vaisseau est parti pour un périple de plusieurs années au lieu des quelques mois annoncés. Et tandis que les passagers paniquent et que les employés restés au sol tentent de minimiser l’incident, l’équipage est en roue libre et ne sait absolument pas quoi faire…
Il y a plusieurs manières de présenter Avenue 5 : on pourrait par exemple parler d’une comédie spatiale à la The Orville, ou d’un space opera mélangeant La croisière s’amuse et Veep. Mais évoquer Veep n’est pas le meilleur service à rendre à Avenue 5... Oui, on y retrouve le même ton absurde, un humour noir similaire, des dialogues frénétiques, des blagues scatologiques, des gags ridicules, des situations tendues où les personnages interagissent de manière stupide et un fond de satire sur l’incompétence des personnes au pouvoir. Mais Avenue 5 s’apparente au Veep de la première saison, soit une comédie à des… années-lumière du petit bijou qu’elle est devenue ensuite.
En revanche, les comédiens sont l’un des atouts de Avenue 5 et ce sont eux qui maintiennent la série à flot. Les passagers jouent un rôle non négligeable dans les premiers épisodes, mais c’est sur l’équipage que repose la dynamique de la série. A commencer par Hugh Laurie, qui incarne le capitaine Clark avec conviction et rend le personnage hilarant. Citons aussi Hermann Judd (Josh Gad), l’insupportable génie milliardaire propriétaire du vaisseau, avec son assistante blasée (Suzy Nakamura) ; l’ingénieure Billie (Lenora Crichlow) qui semble être la seule à savoir ce qu’elle fait ; ou encore Matt (Zach Woods) le responsable du service client qui doit satisfaire les demandes et exigences des passagers.
Étrangement, le fait que l’action se déroule dans l’espace est presque anecdotique. Ce contexte donne lieu à des gags récurrents et spécifiques qui ne pourraient pas survenir ailleurs qu’en orbite mais sur le fond, Avenue 5 pourrait se dérouler à peu près n’importe où puisque ce qui se dessine, c’est une satire des personnes aux commandes et dans une moindre mesure du consumérisme des classes moyennes. Tout repose sur deux axes : d’un côté, l’incompétence des membres d’équipage incapables de juguler les incidents en cascade ; de l’autre, le conflit permanent entre personnel navigant et passagers, les premiers ne sachant pas gérer le mécontentement et l’angoisse des seconds. En résultent des situations erratiques et frénétiques, des rebondissements imprévus et délirants, dans un huis-clos où se côtoient des personnages très diversifiés et donc naturellement appelés à se confronter.
Pourtant, on a le sentiment que la série manque de cohésion, et le scénario et sa mise en œuvre reflètent le désordre qui règne à bord de l’Avenue 5. En outre, cet humour particulier ne séduira pas tout le monde : les gags sont quelquefois drôles, parfois ratés mais toujours absurdes (les obsèques de l’ingénieur tué dans le premier épisode ou… le personnel en salle de contrôle), souvent convenus et répétitifs. Par exemple, les communications avec la Terre sont décalées d’une vingtaine de secondes, ce qui finit par rendre la discussion complètement décousue et incohérente : c’est drôle la première fois, lassant la troisième, pénible la cinquième. Avenue 5 a sans doute du potentiel et un large… espace de progression ; pour le moment, la croisière est tout juste amusante.
Avec ses premiers épisodes, Avenue 5 semble se limiter à une parodie divertissante mais sans grande portée, et surtout sans l’intelligence ou l’acuité qu’on pouvait attendre du créateur de Veep. Peut-être la série finira-t-elle par trouver son rythme de croisière, peut-être va-t-elle s’enliser dans des gags moyens. Mais les turbulences du départ n’encouragent pas à embarquer aux côtés de Hugh Laurie…