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On débriefe pour vous… les premiers épisodes de Foundation, la colossale adaptation d’Asimov

Foundation transpose la saga d’Asimov avec un résultat extrêmement prometteur, entre fidélité au texte et aménagements indispensables.

C’est quoi, Foundation ? En 12065, Hari Seldon (Jared Harris), brillant mathématicien, utilise la « psychohistoire » pour prévoir scientifiquement le devenir de l’humanité et du monde ; selon lui, l’univers court à sa perte et au déclin de l’Empire galactique suivront 30 000 ans de ténèbres. Pour limiter les conséquences dévastatrices inexorables, Seldon souhaite établir sur la planète Terminus une organisation rassemblant toutes les connaissances pour pouvoir reconstruire au plus vite la civilisation quand elle disparaîtra. Mais ses prévisions contrarient les dirigeants de l’empire galactique, dont leur chef Cleon XII alias le clone de Cléon Ier (Lee Pace). C’est à la jeune Gaal (Lou Llobell) que revient la tâche de valider ou discréditer les théories de Hari. Commence alors un récit complexe et tentaculaire, mettant en scène une pléthore de personnages et d’histoires connectées. 

A lire aussi : Comprendre le Cycle de Fondation de Isaac Asimov en 5 minutes

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Foundation était l’une des séries les plus attendues de l’année – voire depuis bien plus longtemps, puisque le projet a été envisagé à de nombreuses reprises avant d’être systématiquement abandonné. Il faut dire que c’est  un monument de la science-fiction, écrit par Isaac Asimov entre les années 1942 (en tenant compte de la publication sous forme de nouvelles dans la presse) et le début des années 1990 ; un cycle tentaculaire dont l’histoire court sur plusieurs siècles et qui se rattache à d’autres ouvrages de l’auteur. Voilà à quoi s’attaque Apple TV+ par l’intermédiaire de David S. Goyer (scénariste de la trilogie Blade, du Batman de Nolan ou des deux premiers Superman de Zack Snyder) qui adapte à l’écran cette œuvre réputée inadaptable. Et il semble savoir où il va, puisqu’il a expliqué avoir en tête les arcs narratifs de huit saisons, soit 80 épisodes… 

Hari Seldon et Gaal pourront-ils préserver l’humanité ?

Comparer une série ou un film au texte littéraire d’origine n’est pas forcément une bonne idée… et c’est pourtant ce que l’on va faire, ne serait-ce que pour prendre la mesure du défi. Foundation n’est pas seulement une œuvre majeure de l’un des pères fondateurs (!!) de la science-fiction moderne ; c’est aussi une sorte de manifeste artistique. Pour raconter l’histoire d’un empire galactique en décomposition et d’un scientifique capable de prédire ce déclin voire d’en réduire les effets dévastateurs, Asimov s’éloigne de la forme narrative convenue et linéaire. Au début surtout, il enchaîne les histoires avec différents protagonistes à différents moments, tous liés à l’ancienne prophétie mathématique de Hari Seldon. La saga décrit un univers et son évolution, les moments d’action s’effacent souvent dans des ellipses au profit de la réflexion.  Pour Asimov, l’exposition d’éléments logiques et l’intellectualisation dans des mondes imaginaires devaient pousser le lecteur à penser par lui-même et à s’interroger sur  l’humanité et son devenir. 

Si en 2021 le monde a changé, il était de toute façon impensable de retranscrire à l’écran une construction littéraire et une écriture volontairement froides et intellectualisées. Ce Foundation est donc largement différent. D’abord parce que la série est nécessairement visuelle et, sur ce plan, c’est une production ambitieuse et ultra-spectaculaire dont on devine le budget colossal ; ensuite parce qu’elle s’inscrit dans une démarche plus émotionnelle (romance incluse) et sensorielle que cérébrale. Sans renoncer aux dialogues denses (et même parfois pompeux, avouons-le) et à l’intellectualisation du fond, Foundation ajoute ce que Asimov a délibérément écarté pour laisser l’imagination du lecteur faire le job. Immensité spatiale, étrangeté des planètes, vaisseaux spatiaux, technologie d’anticipation, « trous noirs »permettant de se déplacer… mais aussi la guerre, le sang, la peur et les sentiments des personnages. 

Avec Foundation, Apple TV nous en met plein la vue.

C’est donc un exercice délicat, presque un numéro d’équilibriste consistant à marcher sur la corde entre une source inspiration d’une immense richesse et une transposition humaine et visuelle. S’il est trop tôt pour porter un jugement définitif, on peut largement penser que le pari est en passe d’être gagné. D’une part parce que, on l’a dit, Foundation est aussi spectaculaire qu’immersive et envoûtante : on plonge la tête la première dans un univers de SF sublime, avec en outre une bande-son épique tout aussi réussie. 

D’autre part, si le nombre de personnages peut dérouter au début (comme dans le premier épisode de Game of Thrones), Foundation se focalise sur une poignée d’entre eux, dont certains transformés pour une plus large diversité ethnique ou de genre. Et la série étant axée sur les interactions et dialogues entre ses personnages, il fallait un casting à la hauteur. Citons entre autres Jared Harris et Lou Llobell (dans un rôle justement féminisé), ou encore un Lee Pace  délicieusement sinistre au centre d’un triumvirat d’empereurs clonés (sa relation avec ses versions plus jeune et plus âgée est l’une des dynamiques les plus intrigantes de la série).

A la tête de l’Empire galactique, un triumvirat de clones

Foundation mélange les époques et les situations, passe d’une siècle à l’autre et d’une planète à l’autre… et d’un livre à l’autre pour reconstruire cette histoire. La première saison semble réunir les deux premiers tomes, tout en incluant aussi et surtout de nombreuses questions soulevées par Asimov tout au long de sa saga. Celui-ci disait s’être inspiré de l’Histoire du déclin et de la chute de l’Empire romain d’Edward Gibbon ; or comme le dit Gaal, c’est en observant le passé qu’on peut prévoir l’avenir. Un empire séculaire tentaculaire et hypertrophique en proie au chaos, une poignée de scientifiques qui tentent d’alerter pour préserver la civilisation humaine contre les enjeux politiques et le poids de la religion ? Voilà qui résonne puissamment, hier comme aujourd’hui. 

Foundation semble s’annoncer comme une série monumentale : esthétiquement sublime, prenante dans la narration, très riche dans la réflexion (et il y a beaucoup, beaucoup à raconter avec cette œuvre de Asimov) A moins d’être radicalement allergique à la science-fiction, Foundation est de toute façon à voir, ne serait-ce que pour la manière dont elle transpose l’une des saga littéraires les plus importantes de la science-fiction du XXe siècle. 

Foundation
10 épisodes de 50 à 70′ environ.
Apple TV +.

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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