Juste avant une nouvelle mobilisation des « gilets jaunes », le patron des policiers du Rhône revient sur les moyens des forces de l’ordre et dénonce la récupération des manifestations par l’ultra-gauche qui vient « exercer la violence ».
VL : Estimez-vous avoir les moyens suffisants pour assurer votre mission à Lyon ?
Patrick Chaudet (PC) : « On voudrait toujours plus de moyens pour faire plus de choses. Personnellement, j’estime qu’en l’état actuel on arrive à se débrouiller même si avec plus, on pourrait faire mieux ».
VL : Depuis le déclenchement des « gilets jaunes », la police est en première ligne. Les violences policières, souvent dénoncées, sont-elles le corollaire de la violence des manifestants ?
PC : « Les policiers ne sont pas des gens violents. Ils le sont lorsqu’ils sont attaqués. Quand on vous envoie des engins incendiaires ou des battes de Baseball ; il faut avoir les moyens de riposter. Les policiers ripostent avec leurs moyens, c’est-à-dire des moyens assez limités : grenades lacrymogènes, tirs de LBD qui sont des balles en caoutchouc, tirées selon certaines règles pour riposter à des agressions violentes. On parle de la violence policière mais il y a un déséquilibre et de la désinformation : les policiers agissent pour se défendre et défendre les autres. C’est dans le cadre des violences qu’ils subissent qu’ils réagissent de manière totalement adaptée ».
VL : Les policiers ont-ils les moyens et les équipements suffisants pour se protéger de la violence ?
PC : « Avant tout, les policiers travaillent sur l’identification des auteurs des violences qui devront comparaître devant la justice. Je suis un démocrate donc j’estime que les moyens mis à disposition de la police sont suffisants. Lorsqu’ils ne le sont pas, on essaye d’avoir des techniques pour intervenir en limitant la casse ».
VL : Les LBD sont au cœur de la polémique pour les dégâts physiques qu’ils peuvent provoquer. Pourquoi, selon vous, sont-ils nécessaires aux policiers dans les manifestations ?
PC : « Il faut que les policiers aient les moyens de se défendre. Ce ne sont pas les pistolets mitrailleurs qui vont être utilisés lors des manifestations. Aujourd’hui, les armes non-létales doivent permettre de rétablir l’ordre et se défendre. Si le LBD est utilisé conformément aux réglementations, il n’y a pas de risques particuliers pour l’intégrité physique des gens. Ils sont utilisés dans des situations où les manifestants eux-mêmes sont très violents. Quand des gens cagoulés vous jettent des barres de fer, battes de baseball ou un engin incendiaire, il faut bien que les policiers puissent riposter à 20 mètres. Le LBD est utilisé de manière très exceptionnelle, dans des situations ultra-violentes très critiques pour le policier. Ces armes ne sont affectées qu’à des gens équilibrés et bien formés ».
VL : Parmi les nouvelles techniques introduite depuis le 17 novembre, il y a la mobilité des forces. Auparavant, les policiers étaient statiques, ils peuvent désormais se déplacer en manifestation. Qu’est-ce cela a changé sur le terrain ?
PC : « C’était une nécessité car les manifestations ne sont plus les mêmes qu’autrefois. Autrefois, vous aviez un cortège qui déclarait sa manifestation à la préfecture : on connaissait l’itinéraire que l’on balisait pour éviter les débordements. Maintenant, ce sont des manifestations illégales car non-déclarées. Les itinéraires sont déterminés en improvisation sur le terrain en fonction de l’implantation des forces de l’ordre. Nous devons nous adapter aux mouvements en permanence. Le tout, en protégeant les symboles du capital pris pour cible par l’ultragauche qui va récupérer des mineurs dans les quartiers sensibles pour pouvoir casser les vitrines en tout impunité ».
VL : Comment organisez-vous l’allocation des moyens comme les manifestations ne sont plus déclarées en préfecture ?
PC : « J’ai mes moyens locaux mais en général, je demande des moyens supplémentaires avec des compagnies de CRS ou des gendarmes mobiles. Les renforts sont déterminés en fonction de nos renseignements sur l’ampleur de la manifestation. »
VL : Sur le terrain, les équipements des policiers ont-ils évolués depuis le 17 novembre ?
PC : « Les moyens de protection des policiers évoluent en permanence. Mais ils ne peuvent pas faire face à toutes les situations. Lorsque l’on vous jette de l’acide ou des engins incendiaires : quelque soit l’équipement, on est protégé d’une manière assez limitée. Il faut développer des techniques d’intervention qui nous permettent d’éviter d’être la cible de ce genre de choses »
VL : Selon vous, en termes de maintien de l’ordre, y aura-t-il un avant et un après « gilets jaunes » ?
PC : « Non ! Nous avons appris des gilets jaunes qu’il faut avoir la capacité de s’adapter en permanence. Sur les premières manifestations en province, ça se passait globalement bien. Maintenant, l’ultragauche a récupéré les manifestations et ça n’a plus rien à voir. Nous avons des gens qui viennent pour s’affronter avec la police. Ils n’ont d’autres revendications que de casser et d’attaquer les policiers »
VL : Chaque samedi, comment vos policiers se préparent aux manifestations ?
PC : « On débriefe les manifestations, on essaye d’avoir d’autres stratégies et de faire preuve de créativité en matière tactique ! Les policiers sont des professionnels qui connaissent bien les risques d’une manifestation. On leur donne des informations sur la stratégie, les moyens employés à cette stratégie et les risques potentiels. On leur donne des recommandations pour éviter les violences trop fortes et des débordements plus graves »
VL : En tant que DDSP du Rhône, que faites-vous le samedi après-midi ?
PC : « Je suis à la salle de commandement et je dirige les manœuvres. Je coordonne les forces de l’ordre sur le terrain et qui donne les instructions pour disperser les manifestants à chaque fois que c’est nécessaire. Je fais tout ça grâce à la vidéo, les images de l’hélicoptère et le trafic radio qui arrive à la salle de commandement ».