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Ennemi Public : rencontre avec Angelo Bison aka Guy Beranger

Dans la bombe belge Ennemi Public qui cartonne sur Netflix, il campe le glaçant psychopathe Guy Beranger. Nous avions pu échanger avec son interprète Angelo Bison lors de la saison 1

Libéré après 20 ans de réclusion, le tueur d’enfants Guy Béranger trouve refuge auprès des moines de Vielsart, un petit village des Ardennes. Il est placé sous la protection d’une inspectrice de la police fédérale. Quelques jours après, une fillette disparaît.

Vous campez de manière brillante un psychopathe dans Ennemi Public. J’ai vraiment été impressionné par votre interprétation dans la série.

Angelo Bison : C’est très agréable de voir la façon dont les gens découvrent la série, la reçoivent et de voir que finalement, il n’y a pas d’animosité à mon encontre quand je me balade dans la rue. J’ai eu un peu peur au début après tout ce qui s’est passé en Belgique. Les gens ont finalement accepté qu’Ennemi Public soit comme une sorte de catharsis après l’affaire Dutroux et ils ont accepté que cette histoire rentre dans leur foyer.

Vous avez été surpris que l’on pense à vous pour ce rôle?

Oui fortement surpris même. Je n’avais pas fait de télé ou de cinéma avant ça, ou trop peu. La télévision est un medium que je ne connais pas du tout. Quand j’ai rencontré l’équipe pour le casting, ça a collé tout de suite entre nous. Ils m’ont dit « c’est toi que l’on veut, c’est ton regard, ton visage« . Je leur ai alors rappelé que si j’ai une expérience importante au théâtre, c’était très différent au niveau du cinéma. J’ai moi même dû réfléchir car quand vous accepté un rôle comme Beranger, il y a toute une filmographie derrière. Bien sûr on pense au Silence des agneaux, mais il y a aussi M le Maudit ou La nuit du chasseur.
Ils m’ont alors proposé un postulat de départ qui m’a beaucoup intéressé. Ils m’ont dit qu’ils allaient beaucoup charger mon personnage en en faisant un psychopathe d’enfants ce qui provoque évidemment une répugnance totale. Mais ils voulaient aussi qu’à un certain moment, les gens éprouvent pour Guy Béranger, non pas de la sympathie, mais une certaine « tendresse » et que l’on voie l’humain derrière le monstre. C’est à ce moment que le projet m’a semblé très intéressant. En voyant les retours après la diffusion de la série, je me dis qu’on a un peu gagné notre pari insensé.

C’est justement ça qui est intéressant. Béranger s’inscrit à la fois dans cette tradition du grand psychopathe du film de genre tout en gardant son côté humain qui le rend totalement insaisissable.

C’est ça qui m’a plu dès le départ. Quand on repense à la première rencontre de Jodie Foster face à Hannibal Lecter dans Le silence des agneaux, elle se retrouve face à un Lecter droit dans ses bottes et si on la compare à la première scène de Guy Béranger sortant de la voiture et s’écroulant par terre, on saisit la différence de « traitement », lui nous est présenté comme un pauvre type en réalité. Il a quelque chose en lui qui l’amène à détruire mais en même temps c’est ce pauvre type, c’est « un homme comme les autres ». Cette impression est renforcée par cette scène magnifique où il se retrouve face à sa mère, et où il fixe son regard. Il est tellement loin dans sa tête Béranger que c’est comme un mur, il n’y a rien qui pénètre en lui, il n’y a pas d’interaction avec les autres. Cette aspect du personnage a aussi impacté mon jeu et a perturbé mes partenaires qui n’arrivaient pas non plus à projeter sur moi. Et c’est précisément un défi très excitant pour un acteur car notre force quand on joue, c’est notre émotionnel, comment on peut s’investir émotionnellement dans quelque chose. Et là, on n’a eu de cesse de dire qu’il n’y a pas d’émotionnel. En tout cas, pas l’émotionnel du réalisme. Béranger est ailleurs, dans son monde et ça le rend inquiétant parce qu’on ne le comprend pas. Ce qu’on ne comprend pas fait peur mais attire également. C’est ça qu’on a amené dans la série. Car même s’il n’est pas le personnage principal de la série, il est important que l’on croie en Béranger pour croire aux autres personnages.

A lire aussi : On a vu pour vous … les premiers épisodes de Ennemi Public saison 2 | VL Média (vl-media.fr)

On a réussi à faire quelque chose de très bien tout en travaillant dans des conditions épouvantables, en ayant trop de peu de temps pour faire nos scènes. Tout a été fait pour qu’on se casse la figure et on a réussi. Et j’ai espoir que pour la future saison 2, on nous laisse plus de temps, qu’on nous laisse plus travailler dans de bonnes conditions pour faire encore grandir la série et que l’on soit moins dans des timings tellement serrés. J’ai envie de dire aux producteurs, à la chaîne, de nous faire confiance. La Belgique est un pays profondément touché par tout ce qui s’est passé et avec des séries comme La trêve, Ennemi Public et bien d’autres, c’est la culture qui va relever la force de ce pays, qu’on va se remettre à croire en notre pays, en ses capacités, que l’on parlera de la Belgique comme d’un pays capable de faire de grandes choses.

Est-ce que cette expérience de la saison 1 peut vous donner envie de travailler avec les auteurs pour construire la suite de Béranger?

Non parce que je pense qu’il faut rester à sa place. Les scénaristes ont beaucoup d’idées pour le faire grandir car c’est bien sûr un personnage qui peut grandir. J’imagine que la saison 2 va se concentrer sur ce point concernant Guy Béranger, je laisse les scénaristes s’en charger et je m’inscrirai dans ce qu’ils veulent pour le personnage. Ce sont de très bons guides qui m’ont beaucoup aidé sur la saison 1. Je n’étais pas habitué à tourner des scènes dans le désordre, mais grâce aux auteurs qui savaient parfaitement ce qu’ils voulaient pour le personnage, je n’ai jamais été perdu. J’ai coutume de dire que je suis un instrument, un instrument qui sonne juste en Béranger. Aux auteurs à présent de le faire jouer de nouveau.
Et je tiens à le dire, ces auteurs amènent réellement un nouveau souffle dans la fiction francophone belge. Même si on peut dire qu’ils sont peut-être encore dans la tradition de la fiction américaine, si on leur laisse le temps, ils sauront trouver leur particularité.

Craignez-vous que Béranger vous colle à la peau et qu’on vous confie d’autres rôles de psychopathe?

C’est effectivement ce qui peut m’attendre. J’ai eu un rôle au théâtre qui m’a beaucoup collé à la peau et en le jouant, une question revenait souvent; « qu’est ce que je vais faire après?« . Je pense que ça va faire pareil avec le personnage de Béranger. Que faire après Béranger? Ce qui est sûr c’est que je ne ferai pas d’autres psychopathes. Ce que je sais c’est qu’aujourd’hui, j’ai un peu assez de théâtre et j’ai envie de voir si quelque chose est possible au cinéma ou à la télé à condition que ça corresponde aux valeurs que je souhaite défendre, c’est-à-dire une exigence, une envie d’amener quelque chose. Je ne jouerai pas juste pour jouer. Je veux seulement faire ce que j’ai envie de faire. Et me concentrer sur la saison 2 de Ennemi Public. Guy Béranger peut grandir à différents niveaux. Tout ce que j’ai lu sur le sujet m’amène à la conclusion qu’un psychopathe restera toujours un psychopathe. Il suffit qu’un déclic se fasse pour qu’il se remette à tuer. Il n’y a pas de rédemption possible pour un Béranger. Mais, à l’image de tous les personnages de la série, c’est un personnage qui peut grandir et je veux le faire grandir.

Crédit: RTBF

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Rédacteur en chef du pôle séries, animateur de La loi des séries et spécialiste de la fiction française
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