C’est la première fois au Salon International de l’Agriculture pour la jeune start-up MiiMOSA, plateforme de financement participatif au service de l’agriculture. Vitrine moderne pour cette dernière, le site contribue également à créer du lien entre professionnels des métiers agricoles et citoyens. Radio VL a rencontré son fondateur, Florian Breton.
MiiMOSA est le premier site de crowdfunding lié à l’agriculture et à l’alimentation. Il a été lancé en 2014 par Florian Breton. Ce dernier, petit-fils de viticulteur, a senti que le financement participatif en France commençait à monter, mais qu’il était à zéro au niveau de l’agriculture. Il a alors eu l’idée de monter MiiMOSA, afin d’accompagner aussi bien de jeunes agriculteurs qui ont envie de s’installer et ont besoin d’un peu d’aide pour se lancer, que des personnes bien installées porteuses de projets.
Radio VL : Comment fonctionne MiiMOSA ?
Florian Breton : MiiMOSA fonctionne grâce à un système de don contre don. Des gens donnent de l’argent, et reçoivent en contre-partie des dons en nature. Ça peut aller d’un merci sur une page Facebook, à l’envoi de produits. Par exemple, j’aide un apiculteur, et en contre-partie je peux recevoir des pots de miel. On ne prête pas de l’argent, on n’investit pas dans un capital. On donne, et on reçoit en échange. C’est un troc sympa.
Par exemple, je peux citer un formidable éleveur du département de l’Eure — on a d’ailleurs un partenariat avec ce dernier, ce qui va ramener un peu d’argent à tous les projets sur ce territoire. Il diversifie son activité depuis huit ans, et est devenu glacier. Il passe par nous pour obtenir 20 000 euros pour financer un « Ice Truck Fermier », pour distribuer ses produits à Honfleur. Pour remercier les gens de le soutenir, il envoie des pots de glace partout en France. Là où il sait faire preuve de créativité, c’est que pour un don de 1000 €, il met à disposition son truck, avec glaces à volonté — pour un mariage ou un anniversaire. Ça peut même être une entreprise.
Plus on monte dans les contre-parties, plus on crée de la proximité avec le porteur de projet. On crée du lien, et en même temps, on renouvelle les générations.
Comment est né le projet ?
Étant petit-fils d’agriculteur, je constatais une fragilisation de l’agriculture française, de l’agriculture de territoire, mais également une vraie volonté des gens de se rapprocher des agriculteurs. L’agriculture n’avait jamais pris le virage du financement participatif. Elle représentait 0,6 % des projets proposés, alors que pour la culture on est à 70 %. Fin 2013, j’ai pris la décision de toute arrêter pour me lancer dans ça. Le site a été lancé fin 2014, grâce à un tiers de fonds propres — j’ai travaillé pendant 7 ans avant — et deux tiers de dettes.
Quels contributeurs ciblez-vous ?
60 % de nos visiteurs ont moins de 35 ans, mais ce ne sont pas les premiers contributeurs. Porte-feuille oblige. On vise quand même particulièrement les jeunes, car c’est vachement bien pour le renouvellement des générations d’agriculteurs de les intéresser, de vulgariser l’agriculture, de les faire venir dans les exploitations, d’engager de potentiels jeunes agriculteurs…
Et quels porteurs de projets ciblez-vous ?
En un an, on a accompagné 200 porteurs de projets et collecté un million d’euros. Cette année, on est sur un rythme de 700 porteurs. On implique beaucoup les citoyens dans l’installation, le renouvellement, et le développement des exploitations, mais plutôt de petites et moyennes tailles. L’agriculture française plus industrielle n’est pas vraiment concernée.
Les filières un peu longues de céréaliers ou d’éleveurs, qui travaillent avec une coopération et des intermédiaires, c’est un peu plus dur. Si on peut proposer une journée en immersion, avec une initiation à la traite de 7h à 17h ou un grand mur des donateurs avec les prénoms et les noms de tous les participants, envoyer les produits transformés devient plus compliqué. On se concentre essentiellement sur le circuit-court.
Que diriez-vous à un jeune qui hésite à se lancer ?
Qu’il nous contacte. On accompagne beaucoup. C’est ça aussi qui fait notre force. On n’est pas dans une stratégie de volume, comme peuvent l’être les plate-formes généralistes, à placer 400 / 500 projets par mois et à seulement écrire quelques e-mails. Ils ont souvent beaucoup d’échec, avec des collectes de 3 500 euros en moyenne, des plus petites contributions — la culture engage moins, avec 53 euros en moyenne.
[#LT] « Ce sont les petites rivières qui font les grands fleuves alors parlez-en au plus grand nombre » @florianbreton pic.twitter.com/CFSDShOpdn
— MiiMOSA (@MiiMOSA_fr) 2 mars 2016
Nous, on est à 85 % de taux de succès, des collectes de 6 500 euros en moyenne, 110 euros de contribution… On sélectionne nos projets. Quand on refuse, c’est qu’on sent qu’on ne va pas répondre aux problèmes ; un agriculteur qui nous dit « j’ai besoin de 350 000 euros pour pouvoir m’installer « , c’est impossible… De plus, si l’agriculture représente 80% des projets, les autres 20% sont des entreprises alimentaires de type distillerie, brasserie artisanale, chocolaterie, confiserie, biscuiterie… Tout ce qui est dans l’artisanat.
Comment le projet va-t-il évoluer ?
On va retravailler le site pour faire vraiment preuve d’innovation. Nous aimerions être identifiés comme un site de bons plans et de tourisme de ferme, pour qu’à terme, on aille sur le site pour réserver ses vacances estivales. Dans les Alpes-Maritimes, sur des congés du 1er au 15 juillet, on proposera des contreparties pendant cette période. Ce sera vraiment nouveau.
On espère aussi créer de la récurrence. Aujourd’hui, 2,3 millions de français ont déjà participé à une collecte, mais 70% d’entre eux n’en ont financé qu’une seule. On trouve un intérêt à financer un ami, de la famille, une connaissance directe, mais la récurrence est assez faible. On aimerait vraiment travailler sur le côté e-commerce réinventé. Tu finances un projet, tu as une expérience du produit, qui devient ton cadeau pour la fête des papas, fête des mamans, cadeaux de Noël…
Jusqu’où comptez-vous amener MiiMOSA ?
Le plus loin possible. L’année dernière, on a juste impliqué les citoyens. Cette année on implique aussi les entreprises. On les invite à dégager un peu de RSE [responsabilité sociétale des entreprises] pour abonder les collectes. On implique également les collectivités territoriales, comme par exemple le département de l’Eure. On essaye de créer des partenariats pour rendre l’écosystème performant. L’année prochaine, on aura peut-être encore des nouveautés ?
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