Alors que Lucifer saison 5 arrive vendredi sur Netflix, nous avions pu rencontrer son interprète, Tom Ellis, de passage à Paris pour promouvoir la série à l’occasion de la diffusion sur 13èmeRUE.
C’est quoi Lucifer ? Lassé et mécontent de sa position de « Seigneur des Enfers », Lucifer Morningstar (Tom Ellis) démissionne et abandonne le trône de son royaume pour la bouillonnante et non moins impure Los Angeles. Dans la Cité des anges, l’ex maître diabolique est le patron d’un nightclub baptisé « Lux ». Quand une star de la Pop est sauvagement assassinée sous ses yeux, il décide de partir à la recherche du coupable et croise sur sa route Chloe Dancer, une femme flic qui résiste à ses charmes et lui met constamment des bâtons dans les roues. Alors que l’improbable duo s’entraide pour venir à bout de l’enquête, l’ange Amenadiel est envoyé à Los Angeles par Dieu pour tenter de convaincre Lucifer de regagner son royaume. L’ancien Seigneur des Enfers cèdera-t-il aux sirènes du Mal qui l’appellent ou se laissera-t-il tenter par le Bien, vers lequel l’inspecteur Chloe Dancer semble peu à peu l’amener ?
Quelle a été votre réaction la première fois que vous avez lu le scénario ? Parce que ça pouvait sembler une idée très drôle et très étrange de mettre Lucifer en situation d’enquêter sur des crimes.
Tom Ellis : La première fois que j’ai eu le script et que j’ai vu le titre, je me suis dit : « Et voilà, ça va être une histoire tragique et sombre sur le Diable ». Et au bout de la troisième ou quatrième page, j’avais littéralement éclaté de rire plusieurs fois, et j’ai pensé que c’était très drôle, que j’aimais vraiment ce personnage. Toute la dynamique qui s’instaure avec Chloé dans le pilote, cette insolence pure du personnage, j’ai trouvé que c’était des idées géniales. Je suis passé de « Oh, pauvre de moi ! » au début à « J’ai vraiment envie de le faire ! ». C’est un sacré volte-face, en vérité.
Vous êtes coutumier des univers étranges, à cause de The Fades ou Doctor Who. A quel point Lucifer est-elle étrange à vos yeux ?
Tom Ellis : C’est une série étrange parce que dans un sens, il est difficile de dire ce qu’elle est. Beaucoup de gens pensent que c’est un procedural, beaucoup pensent que c’est une série fantastique… La vérité, c’est que c’est un peu de ça et un peu de tout. Mon opinion, c’est que c’est une satire. On prend un personnage très connu, et on lui donne un sens différent. Je pense que c’est parfois difficile pour les journalistes de définir la série. Mais le meilleur, c’est que vous avez juste à la regarder pour comprendre. Il n’y pas vraiment de façon de la décrire. Une des raisons pour lesquelles ça marche, c’est parce que l’humour est parfaitement intégré, et il est très important parce que ça ne se prend pas trop au sérieux, ça nous permet de repousser les limites. Sans cet humour, ce serait une toute autre histoire.
Comment avez-vous choisi de l’interpréter ? Un gentil qui fait semblant d’être un méchant à cause de sa réputation, ou un méchant qui fait parfois semblant d’être gentil ?
Tom Ellis : C’était une personne respectable ; il y avait certains indices dans le script du pilote qui disaient qui il était, et comment j’allais le jouer : on disait qu’il avait des manières impeccables, il était écrit d’une façon très particulière qui m’a suggéré l’intemporalité du personnage. On aurait presque dit qu’il venait d’une autre époque. La manière dont il était écrit m’a rappelé certains personnages des pièces d’Oscar Wilde ou de Noel Coward : il y a une élégance désuète chez lui. Et il y avait une autre facette – c’était un grand fan de musique, un grand fan de rock ‘n’ roll, et j’ai essayé de conjuguer les deux, d’en faire l’enfant caché de Noel Coward et Mick Jagger. C’était ça, mon point de départ ! Il y avait beaucoup de choses à en tirer pour moi. Tom Kapinos a écrit le pilote et il est très doué pour écrire des personnages détestables que vous ne pouvez pas vous empêchez d’aimer. Lucifer, comme tout le monde, a des bons et des mauvais côtés. Il était simplement très amer que les gens le prennent pour quelqu’un de mauvais, qui faisait faire aux gens de mauvaises actions. C’est un poids sur ses épaules, parce qu’il ne pousse pas les gens à faire quoi que ce soit. Ce sont eux, et il ne fait que leur donner un coup de main. J’ai trouvé que c’était une nouvelle approche intéressante du Diable.
Et à cause de Tom Kapinos, diriez-vous que Lucifer se rapproche de Hank Moody (héros de Californication créée par Tom Kapinos ndlr)?
T.E. : Sur certains aspects, je pense que oui. Hank Moody pourrait très bien avoir fini en enfer, à un moment donné ! Il y a des similitudes mais en fait, c’est surtout ce truc d’anti-héros. J’ai joué le personnage de Rush, juste avant Lucifer, et c’était un peu la même chose. Vous avez ces personnages qui font des choses perçues comme odieuses et détestables, mais vous réalisez qu’il y a du bon en eux, ils ont de bonnes intentions. Elles sont juste enfouies profondément.
Lucifer est-il un démon, ou un ange déchu ? Parce que c’est ça, la clé du personnage…
T.E. : C’est un ange déchu, et c’est justement tout le propos. Ce qui est intéressant, c’est que personne n’a jamais vraiment raconté l’histoire en arrière-plan, ce qu’il était avant de chuter. Ce à quoi nous pouvons faire allusion dans la série, en intégrant plusieurs membres de sa famille, sa vie avant qu’il soit chassé. Et le fait même qu’il soit défini comme ayant été chassé crée ce ressentiment vis-à-vis de sa famille. Le fait qu’il soit étiqueté comme le Diable, cette espèce de force démoniaque, c’est quelque chose qui suscite une grande rancune en lui.
Dans un pays comme les Etats-Unis, où Dieu est présent partout, avez-vous craint la réaction du public, en jouant le Prince des Ténèbres ?
T.E. : Je serais naïf de croire qu’on peut faire une série intitulée Lucifer sans contrarier certaines personnes aux Etats-Unis. Mais vous savez quoi ? Beaucoup de gens avaient beaucoup à dire sur la série avant qu’elle soit diffusée, avant de la voir, et je pense que ça en dit plus long sur eux que sur la série. Le truc sympa, c’est qu’on a surpris beaucoup de gens au fil du temps. De la même manière que j’ai été surpris en lisant le pilote pour la première fois. Je pensais que ce serait telle chose, mais ce n’était pas le cas. Notre public a un peu réagi comme ça. Quelle que soit la raison pour laquelle notre public a été attiré ou rebuté par la série, elle a capté les gens qui l’ont vue. Ce n’est pas quelque chose de mal, quelque chose de démoniaque, ce n’est pas religieux. Ce n’est rien de tout cela. Nous voulions avant tout faire une série divertissante et drôle. S’il y a un message, c’est peut-être que nous devrions tous regarder en nous, assumer la responsabilité de nos actes, et arrêter de blâmer quelque chose d’autre.
Vous avez évidemment joué à la télévision britannique, dans The Fades ou Dr Who, Eastenders aussi. A quel point la télévision anglaise est-elle différente de la télévision américaine ?
T.E. : Le processus de tournage est le même partout dans le monde : les caméras tournent et c’est la même chose. Mais la dimension des choses est différente en Amérique. On a huit jours pour tourner un épisode, ce qui n’est pas très long, et par conséquent l’équipe technique est beaucoup plus grande, c’est une affaire beaucoup plus importante. L’autre grande différence, je dirais que c’est ça : ce truc avec la presse. Il y a tout un cirque médiatique autour d’une série. C’est beaucoup plus discret au Royaume-Uni. Des journées comme celle-là, je n’en avais pas l’habitude !
Quelle expérience avez-vous tiré d’une série comme Eastenders qui est un soap, en tant qu’acteur ?
T.E. : Eastenders se faisait incroyablement vite, parce qu’on tourne en multi-caméras, et certain jours on faisait quelque chose comme 30 pages. Dans Lucifer, on fait peut-être 6 ou 7 pages par jour. Eastenders était intéressante parce que j’ai appris à retenir beaucoup de dialogues, c’est un entraînement cérébral. Votre cerveau doit aller vite. On me donnait parfois une scène de 4 pages et je n’avais que 3 ou 4 minutes pour la regarder avant de tourner. C’est incroyable de voir ce que votre cerveau peut assumer.
Deux dernières questions. Que peut-on attendre de la saison 3 de Lucifer, au vue de la dernière scène de la saison 2 ?
T.E. : Je ne sais pas. Je sais que les auteurs ont beaucoup d’idées pour la saison 3, et je crois que toute l’histoire du retour des ailes de Lucifer, c’est quelque chose d’énorme pour lui. Ça lui retourne la tête. Je crois qu’il était arrivé à un point où il était prêt à se dévoiler auprès de Chloé, et d’une certaine manière il en est privé. Mais en gros, on avait Malcolm comme adversaire principal de Lucifer en saison 1, on avait Maman en saison 2… Il y aura quelqu’un d’autre en saison 3, mais je ne peux pas vous dire qui c’est.
Peut-être Papa ?
T.E. : Peut-être…
Quel pourrait-être votre prochain défi, en tant qu’acteur ? Jouer le Docteur, ou 007 ?
T.E. : Ou les deux. (rires) Oh, je ne sais pas. J’ai déjà joué un personnage dans Doctor Who et je ne vois pas comment on pourrait expliquer ça… 007, peut-être. Mais je pense que je ne suis pas assez âgé, il faut quelqu’un d’une quarantaine d’années. Vous savez, j’ai toujours aimé la variété, et le théâtre. J’en reviens toujours au théâtre. En faisant Lucifer, j’ai eu l’opportunité de chanter dans la série. Chanter, c’est quelque chose que j’ai toujours fait dans ma vie, mais jamais professionnellement. A un moment donné, j’aimerais bien faire une comédie musicale.
Traduction par Fanny Lombard Allegra