Chaque année, à l’approche des grandes vacances, choisir entre se reposer ou travailler taraude les étudiants. Et à chaque choix, son lot d’arguments.
À une semaine de la rentrée, il est temps de dresser le bilan de l’été. En suivant des hypothèses tendancielles, ce sont 2,93 millions d’étudiants qui pourraient être comptabilisés selon le site enseignementsup-recherche.gouv.fr. Souvent, les étudiants sont confrontés à ce grand dilemme à chaque grandes vacances : travailler ou partir se relaxer au soleil. Entre les offres de stages, de jobs d’été et de destinations estivales, le choix est varié.
La précarité, un facteur important
La précarité des étudiants est toujours présente. Une nouvelle enquête de l’association d’aide alimentaire Linkee, réalisée auprès de 5115 étudiants bénéficiaires de paniers repas, le prouve. Le sondage a été effectué entre novembre 2022 et juillet 2023.
D’après cette étude, trois étudiants sur quatre disposent de moins de 100 euros de « reste à vivre » par mois, soit moins de 3,33 euros par jour pour se nourrir, se soigner, s’habiller ou se cultiver. Plus inquiétant encore, plus de la moitié des jeunes interrogés ont moins de 50 euros de reste à vivre mensuel. Un calvaire pour les étudiants dont le budget alimentaire moyen pour une personne seule s’élevait à 272 euros par mois, selon le baromètre d’Opinionway pour Sofinscope. Ainsi, un étudiant sur deux déclare avoir commencé à bénéficier de paniers repas en raison de l’inflation.
Parmi les étudiants confrontés à la précarité, 51,3% louent un studio, seul ou en colocation, et consacrent en priorité leurs économies au paiement du loyer. Plus de 60% d’entre eux versent ainsi plus de 400 euros par mois pour leur logement, et plus d’un étudiant sur cinq dépense plus de 600 euros. Dans des grandes villes comme Paris, le marché de l’immobilier pour les petites surfaces est rude, poussant certains à dormir dans leur voiture.
Les ressources des étudiants sont souvent insuffisantes pour couvrir l’ensemble de leurs besoins. En effet, 45,7% d’entre eux disposent de moins de 400 euros par mois, et une personne sur dix a moins de 100 euros pour le mois entier. Bien que la moitié des jeunes reçoivent une aide de leurs parents, certains n’ont pas cette chance et parviennent à gagner un peu plus d’argent grâce à des stages, des alternances ou des aides de l’État. Cette précarité pousse souvent les étudiants à chercher un emploi en parallèle de leurs études. S’ils obtiennent une indépendance économique, elle n’est pas toujours choisie.
L’indépendance économique, vraiment un choix ?
Entrer dans la vie étudiante est un vrai nouveau départ. Pour certains cela signifie changer de ville, et surtout quitter le cocon familial. Une décision qui implique de nouvelles responsabilités. Entre le logement, les courses ou encore les études à payer sans l’aide de la famille, travailler l’été n’est alors pas une option.
« Etre indépendant économiquement parlant c’est une fierté, mais si mes parents avaient pu m’aider, cela m’aurait grandement aidé. Jongler entre les études et un travail même l’été, sans repos, c’est dur pour le mental », nous confie Lucas.P, ancien étudiant en lettres à La Sorbonne.
Souvent ces jobs n’ont aucun lien avec leurs études. Lucas était employé dans la restauration durant l’été 2023 et ses journées étaient dures. Avec l’afflux de touristes dans la capitale et les fortes chaleurs à supporter, les vacances n’étaient pas reposantes. Un autre fait important à noter qui pousse les étudiants à travailler l’été est la suspension de la bourse d’études de juin à septembre. « Sans cette bourse, c’est impossible pour moi de ne pas avoir la tête sous l’eau, et le loyer doit être payée à la fin du mois ». Lucas fait parti des 56% d’étudiants à avoir un job d’été selon une enquête réalisée par l’Observatoire national de la vie étudiante en 2023.
Préparer au mieux sa rentrée
Si certains abordent la rentrée avec tranquillité, pour d’autres le stress est à son comble. Selon les cursus, des étudiants seront en alternance ou en stage à la rentrée de septembre 2024. Et certains peinent à trouver leur entreprise. Alors pour éviter cette situation, il faut mettre toutes les chances de son côté.
Avoir un job d’été peut offrir à un étudiant une précieuse expérience professionnelle. De nombreuses entreprises recherchent des stagiaires pour la période estivale. Cependant, un obstacle qui en décourage plus d’un est l’absence de rémunération pour ces stages. En effet, ils durent souvent deux mois. L’accueil d’un stagiaire en entreprise diffère de celui d’un salarié. En effet, le stagiaire n’est pas lié par un contrat de travail et ne perçoit donc pas de salaire. Toutefois, si la durée du stage dépasse un seuil légal, le stagiaire peut prétendre à une compensation financière, appelée gratification de stage. Pour les stages de moins de deux mois, cette gratification est facultative. Ainsi, un stage d’un mois n’entraîne pas automatiquement une gratification, contrairement à un stage de trois mois.
Dans certains cursus, le stage d’une durée d’un ou deux mois est obligatoire. C’est le cas d’Alyssa.B, étudiante à Sup Véto à Paris. Bien qu’au début, la non-rémunération l’embêtait, l’étudiante s’est fait une raison. « Je me suis rendue compte que ce stage me permet tout simplement de voir si j’aimerai continuer dans cette profession, il est donc essentiel pour moi », nous explique t-elle.
« Malheureusement, se salarier l’été, c’est un moyen de se démarquer »
Charlotte.K, étudiante en droit à Metz.
Cependant, les étudiants s’accordent de manière générale pour affirmer que l’expérience professionnelle est un gros point positif pour la suite des études. Dans le cas de stage supérieur à deux mois, cette expérience permet de se faire une place dans le milieu du travail tout en touchant un salaire. Charlotte.K, étudiante en droit à Metz partage cet avis. « Tout nos professeurs nous disent que par rapport à la sélection en master et pour se démarquer il faut se diversifier et faire d’autres choses que de simplement avoir de bonnes notes ». Effectivement, multiplier les expériences dans le milieu des études est plus favorable. Une logique devenue banale, dans un monde où l’on demande toujours plus aux étudiants. « Malheureusement, se salarier l’été, c’est un moyen de se démarquer », nous avoue t-elle.
Mais un petit panel d’étudiants échappe à la corvée que peut représenter le travail pendant les grandes vacances.
Qui sont ces étudiants qui ne travaillent pas l’été ?
Parmi les étudiants, il y en a qui ont pris la décision de ne pas travailler. Un choix qui contraste avec la précarité qui contraint d’autres de leur collègues à travailler. Comment expliquer cette disparité ?
Le schéma est simple, soit les étudiants sont encore chez leurs parents et peuvent se permettre de ne pas avoir de revenus car ils n’ont rien à payer hormis des frais concernant les loisirs, soit ils ont assez économisé pour se permettre une pause, soit ils n’ont tout simplement rien trouvé.
C’est le cas de Rachel.V, étudiante à Neoma Reims. Elle est actuellement au chômage et ce n’était de base pas par choix. Etudiante en master, elle doit réaliser un stage de 6 mois, qu’elle n’a malheureusement pas trouvé avant septembre. Alors, face à cet échec, elle a décidé de s’accorder une pause.
« J’aurais pu commencer mon stage fin mai, mais j’ai choisi de le décaler à septembre pour prendre du temps. J’ai cherché pour l’été mais je n’ai pas trouvé de stage…je me suis adaptée à l’offre », nous explique t-elle. La jeune femme a donc été contrainte de non pas travailler cet été. Positive, elle a décidé de transformer cet échec en privilège. Elle s’accord donc du repos pour préparer au mieux la rentrée et son stage qu’elle commencera en septembre. L’étudiante a également pu se permettre ce choix grâce à ses anciens salaires. « Je dis merci à mes anciens jobs étudiants car c’est grâce à cela que je touche du chômage. Je touche la pension de mon père aussi ». Néanmoins, elle confie que sans tout ses avantages, elle aurait travaillé.