Il y a quelques jours, Abdelkader Lahmar (LFI) a fait parler de lui durant une commission de L’Assemblée nationale. Le député franco-algérien a notamment qualifié les harkis de « traîtres ». Mais qui sont-ils ?
Les origines du conflit
La guerre d’Algérie trouve ses racines dans un système colonial de longue durée. Conquise en 1830, l’Algérie devient une colonie de peuplement française. Elle se structure autour d’une forte domination des colons européens sur la majorité musulmane algérienne. Le tout s’accompagne d’inégalités social-économiques profondes.
À partir de la Seconde Guerre mondiale, la situation s’accélère. Alors que le mouvement mondial de décolonisation s’amplifie, un nationalisme algérien de plus en plus organisé se structure. Le déclencheur du conflit est l’insurrection lancée par le Front de libération Nationale (FLN). Elle est donc lancée la nuit du 31 au 1ᵉʳ novembre 1954. Appelé la ‘Toussaint rouge », elle marque le passage à la lutte armée.
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Une histoire en trois temps
Au cours de la guerre d’Algérie (1954-1962), le terme « Harki » désigne à l’origine des « Français musulmans » recruté dans des formations temporaires de l’armée française. Appelées « harkas » (du terme arabe harka « mouvement ») pour appuyer les troupes régulières dans leur action militaire. Ainsi, selon le site officiel du gouvernement, il s’agit « d’auxiliaires musulmans qui, au sin de formation supplétive, ont combattu dans l’armée française pendant la guerre d’Algérie.«
Supplétif : Recruté temporairement pour renforcer les forces régulières
La fin de la guerre, l’indépendance et l’abandon
Le conflit de la Guerre d’Algérie s’achève officiellement avec la signature des Accords d’Évian le 18 mars 1962. Lequel instaure donc un cessez-le-feu à partir du 19 mars 1962 à midi. Ces accords ouvrent la voir à l’indépendance de l’Algérie. Elle sera proclamée le 5 juillet 1962, mettant fin à 132 ans de présence française.
Lors de l’indépendance de l’Algérie en 1962, les Harkis se retrouvent dans une situation dramatique. Beaucoup sont exposés à des représailles pour avoir combattu aux côtés de la France. Le nombre de Harkis tués après la fin officielle de la Guerre d’Algérie (après le 19 mars 1962) reste très incertain. La plupart des historiens retiennent une fourchette de 25 000 à 70 000.
Parallèlement, un nombre non négligeable est rapatrié en France métropolitaine. Mais cela se fait dans des conditions difficiles : camps de transit, citée d’accueil, relégation rurale, avec une reconnaissance tardive.
Le fait que le terme « Harki » ait été progressivement appliqué de manière large à tous les supplétifs rend l’histoire encore plus complexe.
Mémoire, reconnaissance, en jeux contemporains
La question harkie est donc devenue un enjeu majeur de la mémoire de la Guerre d’Algérie et de la relation franco-algérienne. Le processus de reconnaissance a été long et marqué par des étapes symboliques. Reconnaissance de l’engagement (31 mars 2007), reconnaissance de la responsabilité de la France, structure de réparation.
Par exemple, la Commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les Harkis (CNIH) a été créée en France en 2022. L’objectif : faire face à ces questions de mémoire et réparation.
Quelques chiffres clés
Aux alentours de 1959-1961, les effectifs de supplétifs algériens étaient de 60 000 pour les harkis. En février 1961, on estime à environ 250 000 « Français musulmans rangés du côté de l’armée française ». Le nombre des Harkis tués pendant le conflit (avant 1962) est donné pour « plus de 1 800 hommes tués » selon le site du gouvernement.
Concernant le rapatriement : Il est estimé qu’environ 66 000 personnes (anciens supplétifs + familles) sont arrivées en France entre juin et septembre 1962. D’autres études parlent d’un nombre total approchant 80 000 à 90 000 personnes rapatriées en 1962 et 1967.
De nos Jours ?
Le 20 septembre 2021, lors d’une réception au Palais de l’Élysée, le président Macron a « demandé pardon » au nom de la France aux Harkis, estimant que la République avait « manqué à ses devoirs envers les harkis, leurs femmes, leurs enfants ». À cette occasion, il a annoncé que le gouvernement présenterait « avant la fin de l’année » un projet de loi. Objectif : « inscrire dans le marbre de nos lois la reconnaissance et la réparation à l’égard des harkis ». Ainsi, suite à cette annonce, une commission nationale, la CNIH a été créée le 23 février 2022. Avec donc pour but d’organiser le recueil des témoignages et d’évaluer les réparations.
Le texte a été définitivement adopté par le Parlement en février 2022 puis promulgué sous la forme de la loi n° 2022‑229 du 23 février 2022. L’intitulée « portant reconnaissance de la Nation envers les Harkis et les autres personnes rapatriées d’Algérie … et réparation des préjudices subis par ceux‑ci et leurs familles du fait de l’indignité de leurs conditions d’accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français ».