La firme de Cupertino, habituellement prompte à publier les chiffres de ses ventes, traîne à révéler si l’Apple Watch a vraiment marché. Du coup, un florilège de prévisions contradictoires a envahi la Toile. Serait-ce la fin de la suprématie d’Apple ?
Apple a pourtant déjà publié les chiffres des ventes de l’Apple Watch, en les confondant avec les ventes d’autres produits Apple comme l’iPod ou encore les abonnements Beats Electronics. Tim Cook s’est contenté de déclarer que les ventes de l’Apple Watch dépassaient leurs attentes, et que pour l’heure, la demande dépassait l’offre. Des affirmations plutôt approximatives, Apple verse dans le qualitatif plutôt que le quantitatif, plus parlant.
Des estimations par tous les moyens
Déterminés à apprécier les ventes de la montre autrement que par la communication d’Apple, différents observateurs se tournent vers des méthodes détournées pour recueillir l’information.
Par exemple, le service d’aide au shopping Slice Intelligence a analysé les données récupérées de ses quelques 2,5 millions d’utilisateurs via leur application iOS, et surprise : les ventes d’Apple Watch « continuent de baisser en Juin ».
#AppleWatch sales continue to decline in June. #data #Apple pic.twitter.com/Rj1weAzcSa
— Slice Intelligence (@SliceIntel) 7 Juillet 2015
Une courbe à relativiser toutefois : premièrement, l’échantillon d’utilisateurs est réduit, et pas forcément représentatif (comme dans tout sondage d’opinion cela dit) ; deuxièmement, la courbe ne se base pas sur des ventes, mais sur une utilisation secondaire de l’Apple Watch.
Autre moyen détourné permettant de constater la quasi-évidente baisse de popularité du dernier-né de la firme : se référer aux pourcentages des ventes des autres produits. Ainsi, on apprend que c’est l’iPhone qui mène la danse et apporte la majorité de son chiffre d’affaire à Apple, avec 63% des rentes ! Quand on sait combien les ordinateurs Apple se vendent bien, peu de place est laissée à d’autres produits comme… l’Apple Watch, précisément.
Alors, est-ce ainsi qu’Apple va commencer sa chute ? La firme va-t-elle réussir à se passer de son leader historique, Steve Jobs, sur le long terme ?
Une certaine idée des ordinateurs
Si Apple poursuivait le but de créer un écosystème fermé aux autres standards technologiques, c’est parce qu’il en avait les moyens, et surtout la légitimité. Mais aujourd’hui, avec des produits clairement décevants comme l’Apple Watch, le manque d’innovation des iPhones d’année en année (idem pour les iPads), les utilisateurs commencent à se tourner vers la concurrence, moins chère. Le design magnifique des produits Apple, incarné par le talentueux Jony Ive, ne séduit plus autant.
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Le design, c’était pourtant l’un des deux axes majeurs empruntés par Steve Jobs pour faire des produits Apple ce qu’ils étaient : une intersection soignée entre une technologie extrêmement accessible, et le design. C’est ce qui faisait la force des produits Apple, comparés aux hideux ordinateurs des concurrents. Bien sûr, les produits Apple jouissent toujours de l’image très luxueuse qu’ils renvoient, un iPhone apparaît toujours comme un signe extérieur de richesse, mais l’enthousiasme d’acquérir un nouveau gadget s’est essoufflé.
La fin de l’ère Steve Jobs
La mort du quasi-gourou en 2011 avait provoqué beaucoup d’émoi, que ce soit du côté des employés ou de celui des consommateurs. Après avoir été évincé de sa propre compagnie, en 1985, Steve Jobs avait observé les PDG se succéder, sans qu’aucun ne parvienne à rattraper la situation catastrophique dans laquelle l’entreprise se trouvait. Jusqu’à ce que le conseil d’administration se rende à l’évidence : il fallait rappeler Steve Jobs. C’est ce qu’ils ont fait en 1997, et Jobs a su redonner à la marque l’image qu’on lui connait de nos jours. Mais maintenant que le fondateur est vraiment parti, qu’est-il resté du génie ?
Pas les produits en tout cas : les dernières « révolutions » (comme Apple aime bien les qualifier) ne sont pas si révolutionnaires, et les innovations pas si innovantes. Les produits Apple sont accusés de banalisation. A force de se copier entre eux, les constructeurs ont fait perdre tout charisme au marché high-tech. On est passé d’une guerre qualitative (les idées) à une guerre quantitative (les chiffres) : qui aura l’écran le plus fin, le plus de pixels, le plus de mémoire, etc… Bizarrement, personne ne se donne la peine de faire la bataille de qui aura le prix le plus bas.
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La firme à la pomme a encore de belles années devant elle, mais va sérieusement devoir penser à se renouveler, et à mettre à jour les valeurs qu’elle prône, pour se démarquer à nouveau de la concurrence et faire ce qu’elle n’aurait jamais dû arrêter de faire : vendre du rêve.