C’est officiel. La Bosnie-Herzégovine demande à intégrer l’Union Européenne, a déclaré la haute représentante pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité de l’UE, Federica Mogherini. Alors qu’on évoque en ce moment un possible Brexit — une sortie — du Royaume-Uni de l’UE, le pays des Balkans souhaite rejoindre les vingt-huit États déjà membres.
Son intégration risque néanmoins de ne pas avoir lieu avant plusieurs années. En effet, toutes les conditions ne sont pas réunies pour son entrée, du fait notamment de ses conflits ethno-religieux.
Une histoire complexe
La Bosnie-Herzégovine se caractérise par un système politique complexe. Le pouvoir est réparti entre les différentes minorités ethno-religieuses, qui sont les Bosniaques musulmans, les Croates catholiques et les Serbes orthodoxes. Si le pays est considéré comme un candidat potentiel depuis 2003, les querelles politiciennes entre les différentes communautés empêchent les réformes nécessaires à son intégration dans l’Union européenne.
Ces tensions ne datent pas d’hier. Avant son indépendance en 1992, la Bosnie-Herzégovine fait partie du bloc de la Yougoslavie, modèle de cohabitation ethnique et religieuse avec ses six républiques, cinq nationalités et trois religions. En 1989, la Serbie joue la carte du nationalisme et déclare son indépendance. Les autres pays limitrophes, lassés de l’influence serbe, veulent faire de même. Un an après, la Croatie souhaite déclarer son indépendance, en intégrant la Bosnie-Herzégovine. Elle ne prend pas en compte la population de 600 000 Serbes sur le territoire. L’antagonisme entre Serbes — résistants à Hitler — et Croates — majoritairement collaborateurs — ressurgit.
Une mémoire forte des purifications ethniques
Dans ce climat d’implosion, la Bosnie-Herzégovine proclame son indépendance en 1992. Elle est soutenue par les Croates et les Bosniaques. Les Serbes, quant à eux, s’y opposent. Ils lancent alors le siège de Sarajevo, et enclenchent une politique de purification ethnique pour garantir le caractère serbe de la Bosnie-Herzégovine. On retient ainsi le massacre de Srebrenica, en 1996, où 8 000 musulmans furent assassinés.
En 1995, les Croates, aidés par les Américains et l’ONU, déclenchent une offensive pour chasser les Serbes — ces derniers sont condamnés internationalement. À leur tour, ils opèrent des nettoyages ethniques. Les Serbes se voit obligés d’évacuer la Bosnie-Herzégovine. En 1995, les accords de Dayton mettent fin aux conflits inter-ethniques. Le pays est séparé en deux entités, la Fédération de Bosnie-et-Herzégovine et la République serbe de Bosnie, qui forment à elles deux un État indépendant, dirigé par les trois « peuples constitutifs ». Ces derniers peinent à cohabiter réellement.
Le bilan de la guerre de Bosnie-Herzégovine, vingt ans après, reste dans les esprits : 99 100 morts — civils et militaires — ainsi que 2,4 millions de réfugiés et personnes déplacées.
Une situation économique délicate
Ainsi, la cohabitation difficile entre les différentes entités du pays n’arrangent pas la situation économique. La corruption et le taux de chômage très élevé — plus de 40%, pour 3,8 millions d’habitants — sont des obstacles majeurs au développement économique du pays. Néanmoins, le parlement bosnien a adopté en février 2014 une déclaration promettant les réformes économiques demandées par l’Union européenne. La révision de son marché du travail a par ailleurs déjà été entrepris.
Rien n’est perdu pour la Bosnie-Herzégovine. Sa voisine, la Croatie, est membre de l’Union européenne depuis 2013. Le Monténégro et la Serbie sont sur le chemin de l’intégration.
© Photo à la Une : Reuters.