Mercredi, c’est jour de sortie pour le magazine « Les Inrockuptibles ». À la une cette semaine, une enquête sur la livraison de cannabis à domicile. VL décrypte pour vous ce dossier qui vous passionnera sans aucun doute.
« Jean rêve de fumer des pétards. Problème : pas d’herbe à la maison. » Voilà comment commence cette enquête sur la livraison de cannabis à domicile. Quelques minutes plus tard, Jean recevra la visite de son dealer au pied de son immeuble. Le journaliste commente : « En deux heures, une livraison tout à fait illégale s’est déroulée en plein Paris. Aussi simplement que s’il avait été question de sushis ».
Un phénomène devenu massif
« À Paris, il n’y a plus que des livreurs » décrit une magistrate qui traite de ces questions dans la capitale. Bien qu’elle concède qu’il reste « quelques points de vente dans les rues », ce mode de vente est devenu « rare ». Une tendance soulignée par un rapport de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT). La technique est bien souvent la même, les SMS arrivent tous sur le même portable. Son propriétaire dispatche ensuite les livraisons à ses différents livreurs. « On est véritablement entré dans une forme d’ubérisation de la vente de cannabis » analyse David Weinberger, chargé de recherche à l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice. D’après une source policière, certaines plates-formes compteraient jusqu’à trois cents clients.
Selon un magistrat, ces nouvelles pratiques de livraison n’ont pas pour autant remplacé les « fours », ces points de vente tenues dans des halls d’immeubles. Les services de livraisons se cantonneraient au centre-ville tandis que les « fours » serviraient à approvisionner les consommateurs des périphéries.
Du travail cinq jours par semaine, 12 à 13 heures par jour
Sami, un livreur interrogé par « les inrockuptibles », raconte son quotidien. Il travaille cinq jours par semaine, 12 à 13 heures par jour voire plus le week-end. Il ne communique qu’avec son patron en l’informant du déroulé de sa journée, mais jamais avec les clients. Une fois livré sa quinzaine de paquets, il rentre à la base échanger du liquide contre de nouveaux pochons, « c’est très rapide » indique Sami. Sami livre entre dix et vingt personnes par jour et est payé à la semaine, entre 1000 à 2000 euros par mois.
« Avant quand on achetait, on était des boloss. Aujourd’hui on est des clients »
La fidélisation des clients passe d’abord par une promotion constante. Les clients reçoivent ainsi régulièrement les nouvelles offres promotionnelles par SMS. Lucas, un client, en dévoile un exemple : « Salut la mif’, promo spéciale Halloween, seulement aujourd’hui et demain, 4 achetés, 5e offert. »
La fidélisation des clients passe également par un service client sympathique. David Weinberger explique : « [Les dealers] embauchent des gens qui se présentent bien, qui sont avenants ». Sami rajoute : « Quand tu vas acheter quelque chose, ta pas envie que le vendeur te parle mal. Là c’est pareil. » Florian, un client s’en réjouit : « Avant quand on achetait des trucs, on était des boloss. Aujourd’hui on est des clients ». Le rapport de forces s’est désormais inversé. Une chose est sûre, les clients sont satisfaits de ce mode de vente. Désormais, ils attendent avec impatience « le petit malin qui montera une application. »
Une enquête signée Pierre Bafoil. À retrouver en page 8 du magazine « Les Inrockuptibles » du 17 au 24 janvier.