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Daredevil : série noire chez Marvel

Alors qu’on pensait en avoir fini avec les adaptations télé hyper-infantilisantes de la mythologie super-héroïque américaine, voilà qu’une nouvelle production menace de faire la différence. Cette fois-ci, c’est de l’inespérée collaboration entre Netflix et Marvel que nous arrive Marvel’s Daredevil, l’histoire du super-héros de Hell’s Kitchen alias Matt Murdock, avocat aveugle le jour, justicier sans peur la nuit, autrefois littéralement anéantie par le film de Mark Steven Johnson et l’interprétation de Ben Affleck.

DU NOIR

Oubliez cet incident cinématographique : la série ne s’en inspire en rien. Au contraire, les créateurs de la série, Drew Goddard et Steven S. DeKnight, ont décidé d’adapter le titre de Frank Miller et John Romita Jr. « The Man Without Fear » pour créer l’ambiance de leur première saison et la genèse du super-héros au petit écran. Adieu le costume rouge écarlate – au moins pour commencer – il faut accueillir la tenue de braqueur ultra sobre et le bonnet enfoncé jusqu’au nez : non, notre héros aveugle n’a définitivement pas besoin de ses yeux. De la même façon, la série décide de laisser au placard la vision ultrason en images de synthèse du héros pour accentuer le réalisme du show; Matt Murdock perçoit son environnement de façon complexe – sons, odeurs et sensations – et c’est au spectateur de faire l’effort de se glisser dans sa peau. Pari réussi.

Ca ne s’arrête pas là : des scènes de combat, savant mélange de boxe et d’acrobaties, aux personnalités des gangsters (russes trafiquants d’enfants, triade pourvoyeuse d’héroïne et criminels à col blanc), il ne reste rien du côté gentiment kitsch du film et des autres adaptations de comic-books. Dans Marvel’s Daredevil, Matt Murdock brise des mâchoires et balance les malfrats du sommet des immeubles désaffectés de Hell’s Kitchen. Il essuie lui-même de lourdes défaites dont il prend plusieurs épisodes à se remettre. Il faut oublier la résilience magique des héros à la Arrow ou du Flash, Matt compte ses balafres, ses os brisés et doit rivaliser d’ingéniosité pour avancer des excuses crédibles à son associé lorsqu’il arrive au cabinet le dos voûté et la mine défaite.

Le costume inspiré de " The Man Without Fear" de Frank Miller et John Romita (1993)

Le costume inspiré de  » The Man Without Fear » de Frank Miller et John Romita (1993)

TAILLÉS POUR LE RÔLE

Dans la peau de l’aveugle clairvoyant, Charlie Cox (aperçu récemment dans « Une merveilleuse histoire du temps« , le biopic consacré à Stephen Hawking) est impeccable. Impressionnant de justesse lorsqu’il joue l’avocat aveugle, le regard nécessairement dans le vague, il substitue à l’intensité de l’œil un langage corporel efficace et précis. C’est dire combien c’est important : pour incarner Matt Murdock, l’homme qui voit sans ses yeux, il lui a fallu apprendre à dégager de son jeu d’acteur cette étrange clairvoyance – la paire de lunette vintage ne gâche rien.

Mais la véritable performance ne se cache peut-être pas derrière l’ombre ultra soignée du Daredevil. Une fois n’est pas coutume, c’est son ennemi juré, dont le nom nous est caché un certain temps, incarné par Vincent D’Onofrio (révélé pour son rôle dans « Full Metal Jacket » en 1986, rien que ça) qui crève l’écran. S’il demeure un court instant dans l’ombre, pour des raisons propres au scénario, le premier épisode qui lui est consacré (1X03) ne laisse aucun doute sur la qualité de son interprétation : D’Onofrio est à couper le souffle. Incarnant un Wilson Fisk à la croisée des chemins, déjà parrain de pègre ambitieux mais encore tourmenté par son passé, le scénario offre à l’acteur la possibilité de faire montre de tout son talent. Défi relevé : Wilson Fisk, alias le Caïd, est tout autant capable d’émouvoir par son romantisme un peu gauche que de glacer le sang en pulvérisant littéralement le crâne d’un importun à coups de portière.

Le reste du casting, quant à lui, ne démérite pas. Très loin de là. C’est sans doute-là une des plus grandes qualités de Marvel’s Daredevil. Qu’il s’agisse de Deborah Ann Woll fraîchement débarquée de « True Blood » dans le rôle de Karen Page, énigmatique victime de la pègre, de Vondie Curtis-Hall, interprète du journaliste Ben Ulrich, ou de Elden Henson qui interprète Foggy Nelson, l’acolyte de jour de Murdock au cabinet Nelson & Murdock, chaque acteur est bien à l’aise dans son personnage. Preuve, s’il en est, de la qualité du scénario.

Vincent D'Onofrio dans le rôle de Wilson Fisk.

Vincent D’Onofrio dans le rôle de Wilson Fisk.

UN MUST WATCH

Toutes ces raisons font du Daredevil de Netflix l’un des immanquables de cette année 2015. On aurait tort de s’en priver car, comme à chaque fois, le pure-player américain a mis en ligne tous les épisodes d’un coup d’un seul. Une saison de 13 épisodes, chacun durant autour de 50 minutes, fera que même les amateurs de série voraces y trouveront leur compte. L’autre raison pour laquelle il ne faut pas louper la première saison de Marvel’s Daredevil, c’est qu’elle est en réalité la première phase d’un plan en plusieurs coups fomenté par Marvel et Netflix pour diffuser, toujours au petit écran, quatre séries basées sur des super-héros (Daredevil, Jessica Jones, Iron Fist et Power Man). Ces séries fusionneront en une seule et unique mini-série, The Defenders, à l’horizon 2018. C’est une façon pour Marvel de transposer son modèle Avengers sur le petit écran, priant pour que le même engouement soit au rendez-vous.

Tout ce qu’il reste à espérer, c’est que cette surenchère de super-héros ne nuira pas au storytelling de Daredevil qui promet des saisons riches et de qualité. Car pour l’instant, seul dans les ruelles fumantes de Hell’s Kitchen, l’homme sans peur nous suffit amplement.

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