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Hugo Clément : « Mon choix de devenir végétarien est pleinement justifié »

Hugo Clément vient de sortir « Comment j’ai arrêté de manger les animaux » (Seuil). A cette occasion, le journaliste se confie sur les raisons de son choix et son nouveau régime alimentaire.

VL : Quel a été pour vous le déclic, le moment où vous vous êtes dit « il faut que j’arrête, je ne peux plus continuer comme ça » ?

Hugo Clément : « Le déclic, ça été un ensemble de chiffres qui se sont accumulés et que je ne connaissais pas : les chiffres de l’industrie de la viande et de la pêche. J’ai été marqué par le nombre d’animaux qu’on abat tous les jours en France : 3 millions. C’est aussi le nombre de poissons tués chaque année dans le monde : entre 1 000 et 2 500 milliards de poissons. C’est aussi la quantité de gaz à effet de serres que dégage l’élevage : 14,5% du total des émissions mondiales de gaz à effet de serre, un tout petit plus que les transports. Au bout d’un moment, je me suis dit « ce n’est pas possible, je ne peux pas continuer moi à donner mon argent, à cautionner ce système-là ». C’est une décision personnelle et l’objectif du livre n’est pas d’expliquer aux gens ce qu’ils doivent faire, manger ou pas manger mais transmettre les informations qui, moi, m’ont fait prendre cette décision ».

 

« J’ai arrêté de manger de la viande en me lançant un défi, sans trop savoir pourquoi »

 

VL : Vous racontez votre entretien avec Mauricio, un ouvrier de l’abattoir municipal de Limoges que vous décrivez comme un homme « détruit ». Les reportages que vous avez faits pour Konbini, Quotidien ou avant LPJ ont-ils influés votre décision ?

HC : « Lorsque je suis arrivé à Konbini, j’étais déjà végétarien donc les reportages n’ont pas eu d’influence. A Quotidien et au Petit Journal, ce n’était pas vraiment ce que l’on faisait. On faisait plus des reportages politiques ou d’actualités sociales en France et à l’international. C’est plutôt une quête personnelle d’information qui n’était pas liée à mon travail ».

 

« J’étais persuadé que je devais manger viande et poisson pour être en bonne santé »

 

« Comment j’ai arrêté de manger les animaux » d’Hugo Clément. 14,90€

On ne devient pas végétarien du jour au lendemain même si, pour vous, l’arrêt de la viande s’est fait sur un coup de tête. Ça été plus difficile pour le poisson car votre père chasse beaucoup de poissons. Comment avez-vous mis en place votre régime alimentaire ?

HC : « La viande, c’était effectivement un coup de tête. Je me suis lancé le défi sans trop savoir pourquoi de ne pas en manger pendant une semaine et quand je me suis rendu compte que c’était assez simple à tenir, je me suis dit « pourquoi ne pas maintenir ce régime sans viande ? ». A partir de là, j’ai vraiment à me renseigner et à trouver mon choix pleinement justifié. L’arrêt poisson a pris un an de plus parce que j’avais l’impression ne pas pouvoir m’en passer pour des raisons affectives et aussi parce que j’avais l’impression de devoir compenser l’absence de viande par du poisson. Finalement, je me suis rendu compte que ce n’était pas cohérent du tout de continuer à financer la pêche industrielle alors que je refusais de le faire avec l’élevage. En revanche, j’ai du mal à identifier vraiment les étapes car c’est un processus global que je ne colle pas sur un jour précis ou un événement précis ».

 

« L’essentiel est d’avoir un régime équilibré, qu’il soit végétarien, veggan ou omnivore ! »

 

VL : Concrètement, par exemple, êtes-vous aussi passé par une étape de questionnement comme c’est le cas pour nombre de végétarien, spécialement par rapport aux carences alimentaires ?

HC : « Comme tous les gens qui mangeait beaucoup de viande et de poisson, j’étais persuadé que c’était nécessaire pour être en bonne santé et que si je n’en mangeais pas, j’allais avoir des carences, être faible. Evidemment que je suis passé par ces étapes de crainte de me dire « est-ce que je peux ne plus en manger du tout ? ». Mais pour le régime végétarien, il y a un consensus scientifique pour dire que ce n’est pas mauvais pour la santé. Pour ce qui est du régime veggan, ça fait un peu plus débat. Je veux aussi attirer l’attention sur quelque chose : que nous ayons un régime végétarien, veggan ou omnivore  l’essentiel est d’avoir un régime équilibré. La viande et le poisson ne sont pas une garantie d’absence de carences ».

VL : Aimer son animal de compagnie, son chien, son chat, est-ce incompatible avec le fait de manger de la viande ?

HC : « Non ça ne l’est pas et la preuve c’est qu’il y a beaucoup de gens qui le font. Cette question est très intéressante car ça dit beaucoup de notre rapport aux espèces en fonction de notre usage personnelle. Les chiens et les chats sont nos compagnons du quotidien donc on voit qu’ils ont une personnalité, des comportements sur lesquels on colle parfois des émotions humaines. Cependant, les porcs qu’on ne voit jamais : on leur nie un peu cette personnalité, cette capacité à être intelligent car cela nous permet de les manger sans se poser de questions.

 

« Il faut connaître les espèces qu’on va manger »

 

Je trouve cette schizophrénie intéressante entre la manière dont on traite les chiens et les cochons qui ont une intelligence similaire : on se permet de faire aux porcs ce qu’on ne se permettrait jamais de faire aux chiens. En fait, il faut connaître les espèces qu’on va manger. Ça été une des premières étapes de ma prise de conscience : apprendre à connaître ses espèces avec lesquelles je n’avais jamais eu de contacts et qu’ils sont des animaux intelligents et sensibles qui ressentent des émotions ».

VL : Comment regardez-vous les actions violentes de certains militants végans qui s’en prennent à des bouchers qui se contentent « simplement » d’exercer leur métier ?

HC : « Ce sont des actions qui doivent être condamnées. Mais surtout elles sont totalement inutiles car on ne convainc personne par la violence. Ça n’a aucun sens. Sur ce sujet-là, pour convaincre il faut informer les gens et on n’a pas besoin d’être violent : il suffit d’expliquer comment se passe l’élevage industriel, comment se passe la pêche industrielle. Ce sont des données publiques qui ne demandent qu’à être exploitées. Pour moi, les formes d’actions violentes desservent la cause qu’elles prétendent servir ».

 

 

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