Au-delà de l’image caricaturée du rockeur populaire, immuable pantin d’une musique passée, Johnny Hallyday représentait une partie de l’histoire moderne de la culture française et une idole pour toute une génération. D’Optic 2000 aux Guignols de l’info, de Jimi Hendrix à Nicolas Sarkozy, l’artiste a navigué entre les époques sans jamais perdre l’affection de son public. Retour en quelques dates sur une carrière hors du commun.
1958 : Le Rock and Roll envahit la France avec Rock Around the Clock chanté par Bill Haley, les Platters interprètent Only You et Chuck Berry, Johnny Be Good.
Quelques mois après, un jeune américain de 18 ans, Elvis Presley, envahit les ondes européennes avec It’s Now Never.
1959 : Un jeune homme de 16 ans, à la chevelure blonde, apparaît dans les magazines « people » français. Il se produit tous les après midi au Golf Drouot. Il chante avec plus ou moins de succès des reprises américaines et en particulier de Rock and Roll. Son nom : Johnny Hallyday. Beaucoup de secrets restent sur le nom de ce chanteur. En Province, les rumeurs vont bon train. Avec ce nom et ce prénom, il ne peut être que d’origine américaine. Certainement le fils d’une liaison entre un soldat US et d’ une femme française… Ce doute est resté de longues années sans réponse de sa part, jusqu’à ce qu’il avoue avoir été élevé par son oncle et sa tante, deux saltimbanques du spectacle, au nom d’artistes « Hallyday ». Quant à ses parents, c’est bien plus tard qu’il en parlera, dans les années 1965, 1970, et qu’ il avouera son nom de naissance, d’origine Belge..
1960 : Sa première chanson enregistrée sur vinyle 45 tours T’aimer follement est également chantée par Dalida. Il apparait pour la première fois sur le petit écran en noir et blanc dans l’émission de variétés culte animée par Marthe Mortimer, et qui permet à de jeunes artistes de sortir de l’anonymat. C’est l’Ecole des Vedettes….
Son premier grand succès est Souvenirs, Souvenirs, un Rock à la sauce française. Sur toutes les pochettes de disques, il apparaît avec sa guitare en bandoulière, comme Elvis, mais s’en sert très peu, sinon pas du tout, alors qu’il est très doué en guitare classique. Peut-être quelques accords d’accompagnement, mais jamais de solo, comme son mentor américain.
Il n’est pas seul dans le cœur des Français. Il doit se partager avec les Chaussettes noires, et son crooner Eddy Mitchell, et les Chats sauvages, de Dick Rivers. La concurrence est vive entre ces trois artistes, et les maisons de disques très prospères à cette époque savent décocher les flèches pour faire monter la tension entre ces trois ex amis….
En interprétant 24 mille baisers, une reprise d’ Adriano Celentano, Johnny qui bougeait déjà beaucoup sur scène, fait encore plus fort… Il se contorsionne jusqu’à se retrouver allongé le dos sur la scène, avec sa guitare, les jambes écartées, mais pliées. Cette forme d’hystérie entraînera ses fans à casser les sièges de salles de spectacles et leurs aménagements.
1964 : il est appelé sous les drapeaux pour y faire son service militaire. Comme Elvis il est affecté en Allemagne, en zone Française. L’ armée française, qui a besoin de redorer son image très ternie par la guerre d’ Algérie et par les appelés qui se plaignent de ne rien faire d’intéressant au Service National, ouvre grand ses portes aux médias, et à la TV, dans la caserne où il est affecté. Une grande émission de variétés y sera même retransmise pour la première fois en direct où Johnny sera la grande vedette et y accueillera d’autres artistes. Johnny, le fils de saltimbanques qui n’a pratiquement pas fréquenté l’école, sera nommé secrétaire du Colonel du régiment, et se verra attribué des permissions supplémentaires pour enregistrer de nouveaux albums.
1966 : Année difficile pour Johnny qui en est à sa troisième tentative de suicide suite à la demande de divorce de sa femme, Sylvie Vartan. Il fait néanmoins la rencontre de Jimi Hendrix qu’il héberge chez lui pendant un temps et qui part avec lui faire sa première partie en France. Johnny reprend alors en français son tube « Hey Joe ».
1976 : À la suite d’une période de remise en question musicale et de changement d’auteur, Johnny sort Requiem pour un fou qui se classe au sommet des hit-parades en deux jours et est très vite disque d’or. Johnny obtient un second hit avec la chanson Derrière l’amour, annonciatrice de l’album éponyme. Le disque, qui alterne rock et variété, obtient un grand succès et devient la meilleure vente de la décennie de l’artiste. À l’automne, la chanson Gabrielle (unique titre rock du chanteur à accéder, en cette période, au rang de tube), devient un nouveau n° 1.
1985 : Le début des années 80 est une période difficile pour le chanteur qui est obligé de se former une nouvelle image. Il enregistre l’album Rock’n’Roll Attitude, écrit composé et réalisé par Michel Berger. Le disque obtient un grand succès public et critique. De nombreux titres sont des hits et deviennent des standards de son répertoire, notamment Quelque chose de Tennessee, qui s’impose comme l’un de ses plus grands succès.
Les années 1990 sont une période de tournée incessante dans les plus grands stades de France. Aboutissant au début des années 2000 à un record de sa popularité, fêtant tour à tour ses 40, puis 50, et en enfin 60 ans dans des grands shows filmés en direct à la télévision. Il signe même l’hymne de l’équipe de France de football lors de la Coupe du Monde en 2002.
2014 : Johnny signe son dernier album à ce jour, Rester vivant. L’opus est plébiscité par la presse, et bien accueilli par le public, obtenant le meilleur démarrage de l’année avec 131 849 exemplaires vendus la semaine de sa sortie.
2016 : Il débute la tournée des Vieilles Canailles avec Eddy Mitchell et Jacques Dutronc jusqu’à l’annonce de sa maladie en 2017.
De Johnny, on gardera l’image d’un homme attachant et généreux, car comme le souligne Pierre Billon, quand on dit en anglais « rocker », on prononce aussi en français le mot « coeur ».
Bonus : Icône d’une génération, Johnny a entrainé de nombreux imitateurs plus ou moins ressemblants qui lui survivront … https://www.youtube.com/watch?v=EvoL-FvSPDg&t=7s