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Le parlement européen ralentit l’échec du marché européen des droits à polluer

Ce mercredi 3 juillet 2013, le parlement européen a adopté le gel de quotas de CO2 à hauteur de 900 millions d’euros. Cette mesure, à l’initiative de la Commission de Bruxelles, a pour objectif de faire remonter le cours de l’action carbone, tombé à un niveau historique depuis sa mise en place, et avait été refusé en avril dernier par le parlement.

Initiative à l’origine du protocole de Kyoto, le marché du carbone est un mécanisme droit d’émissions qui avait pour but initial de réduire l’empreinte carbone globale en attribuant des quotas d’émissions aux pays ratifiant le protocole. Les pays développés ayant ratifiés ce protocole se voit distribuer des plafonds d’émissions, qu’ils rachètent ou revendent selon leur résultat annuel. C’est le MDP (Mécanisme pour un Développement Propre). Les Unités de réduction certifiée des émissions (UCRE ou CER en anglais) correspondent à l’économie d’émissions réalisée grâce au projet par rapport à un scénario de référence.

Fonctionnement du Mécanisme pour un développement propre (MDP)

Vient ensuite un programme de Mise en œuvre conjointe (MOC). Les pays sont ensuite libre de racheter ou de revendre ces unités pour respecter leur plafond. Il s’agit d’un transfert d’unités de réduction d’un pays à un autre. La Mise en œuvre conjointe peut s’appliquer également dans un cadre national. Ce système de projets domestiques CO2 vise notamment en Europe à rémunérer par des actifs carbone les acteurs non couverts par le système européen d’échange de quotas qui mettent en place volontairement des actions de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre.

 

Fonctionnement de la Mise en oeuvre conjointe (MOC)

Fonctionnement de la Mise en oeuvre conjointe (MOC)

En 2005, dans le cadre de la ratification par l’Union Européenne du Protocole de Kyoto est mis en œuvre le Système communautaire d’échange de quotas d’émission (SCEQE), l’European Union Emission Trading Scheme en anglais (EU ETS). Ce dernier, couvrant non plus les Etats mais les grandes entreprises des secteurs industriels et énergétiques de l’UE, devient rapidement le principal marché carbone au monde. En 2009, les ETS couvraient plus de 10000 entreprises dans ces secteurs d’activités, ce qui représentait plus de 40% des émissions à effets de serre totale de l’UE, et 45% en 2013.

Répartition des allocations de quotas européens par secteur en 2008

Répartition des allocations de quotas européens par secteur en 2008

Dans le principe, ce système est une excellente idée, à partir du moment où il permet à chaque entreprise d’acheter ou de vendre son « droit à polluer » en fonction du quota d’émissions qui lui est attribué au départ. L’UE distribue gratuitement des quotas d’émissions et fixe leurs limites à chaque entreprise. Ces quotas diminuent année après année. Les entreprises qui ne dépassent pas leur quota peuvent donc revendre leurs droits d’émissions et sont récompensés, tandis que celles qui le dépassent doivent racheter des droits de pollution.

Ce système de régulation par le marché est donc une véritable prouesse et une avancée majeure dans le droit de l’environnement, mais en réalité ce système est un échec, pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, ce système a vu naître de nombreuses fraudes à la TVA par un mécanisme de transferts de quotas à l’étranger. Et fin 2012, suite au dévoilement de ces fraudes, la bourse du carbone française Bluenext est contrainte à fermer. A la Deutsche Bank, des perquisitions sont faites pour fraude fiscale et blanchiment d’argent et ont visé 25 employés de la banque dont le co-président Jürgen Fitschen.

De plus, le secteur des transports est partiellement exclu de ce système de quotas. Transports routiers et maritimes ne font pas parti du marché ETS. C’est pourtant un des secteurs les plus polluants. Seul le secteur de l’aviation civile est entré dans le système de quotas, et ce seulement depuis l’année dernière.

Mais c’est surtout le suivi du nombre de quotas annuel qui a causé cet échec. Les allocations aux entreprises sont restées bien trop généreuses. En temps de crise par exemple, alors qu’une entreprise a tendance à diminué sa production, elle émet moins d’émissions et donc finit par accumuler des quotas. Au commencement des crédits-carbones, une tonne de carbone valait plus de trente euros. Aujourd’hui elle est sous la barre des 3 euros. La conséquence est que finalement cette réglementation n’est plus du tout dissuasive.

C’est la raison pour laquelle le parlement européen a eu pour projet de gelées 900 millions d’avoir sur le marché pour faire remonter le cours de l’action carbone et éviter la déroute du système. Mais ce gel n’est pas intemporel et devra être levé d’ici à 2020. La valeur d’une tonne de carbone devrait remonter entre 6 et 8 euros, une mesure sans doute efficace mais qui ne change rien au fond du problème. La mesure est jugée inutile par Greenpeace qui a appelé la Commission à supprimer définitivement 2,2 des 8,5 milliards de quotas devant être vendus entre 2013 et 2020.

Pour autant, des solutions sont toujours là. L’UE pourrait à terme, désormais que le système EU ETS est entré dans sa 3ème phase (2013-2020) avec pour objectif majeur une réduction des émissions à effet de serre de 20% d’ici 2020. Cette objectif est déjà rempli mais utilise des mesures concrètes : l’application du système sera élargi à d’autres secteurs, les quotas seront toujours réduits, mais deviendront payants selon les secteurs d’activités, et les plafonds d’émissions nationaux seront remplacés par un plafond unique européen. Aussi, en cas de nécessité, l’UE pourrait toujours accroitre ses objectifs de réduction d’émissions à 30% par exemple.

Restes tout de même que ce système d’écotaxes n’est applicable qu’en Union Européenne. Ainsi il suffit pour les entreprises très polluantes de se délocaliser, dans des pays peu régulés, tels que la Chine ou l’Indonésie.

 

En conclusion, si ce système de marché d’émissions à effet de serre est, pour les pays dans ceux ayant ratifiés le protocole de Kyoto comme pour les entreprises polluantes en Union Européenne, un système capable de réguler les acteurs économiques dans le sens de la protection de l’environnement, mais la mauvaise gestion des quotas fait qu’il est aujourd’hui complètement inefficace.

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