Mardi, Manuel Valls a dévoilé aux yeux de la France entière la composition de son nouveau gouvernement. Des sortants, des entrants, et de nouveaux problèmes qui émanent même de l’aile gauche de la majorité présidentielle.
Que ce fut vif et surprenant. Tout le monde savait que la rentrée du gouvernement et du pouvoir en place allait être mouvementée. Ça n’a pas trainé, c’est le moins que l’on puisse dire. Dès lundi, Manuel Valls a présenté la démission de son gouvernement à François Hollande, quelques heures seulement après qu’Arnaud Montebourg et Benoît Hamon se soient désolidarisés de la politique menée par leur Président, François Hollande.
La décision du gouvernement de quitter sa ligne assez « de gauche » a surpris. Arnaud Montebourg, grand conservateur des emplois et de la production de la patrie est remplacé par un spécialiste de la finance, en la personne d’Emmanuel Macron. Dès le lendemain, la presse dite de gauche annoncée un tournant social-libéral du gouvernement Valls II, ce qui coïncide avec les refus des Verts et de Robert Hue d’y participer. Et pourtant, on se souvient des discours de Hollande pendant sa campagne, son fameux « mon seul ennemi, c’est la finance ». Peut-être a-t-il compris que ce serait finalement un thème essentiel de son mandat pour réduire son bilan actuellement catastrophique à passable en 2017. Aujourd’hui, Hollande ne veut plus satisfaire la gauche, il essaye de reconquérir la France.
D’autres changements notables ont fait parler d’eux, dont Najat Vallaud-Belkacem, qui n’en finit plus de changer poste. Trois gouvernements, trois postes différentes pour la désormais ancienne Ministres des Droits des Femmes et de la Jeunesse et des Sports et anciennes porte-parole du gouvernement. Maintenant, elle remplace le quasi-frondeur, Benoît Hamon, qui n’aura même pas eu le temps de faire la rentrée scolaire. Grande passionnée de la question de genre, notamment à l’école, la nomination de NVB à l’Éducation Nationale fait hurler la droite. Au final, elle est le seul changement apprécié à gauche. L’arrivée de Fleur Pellerin à la Culture permet de rester sur la même ligne que Filipetti. Qu’elle soit bonne ou non.
Finalement, quand on analyse ce néo-gouvernement, on se rend compte que seul Montebourg et Hamon étaient visés directement par ce remaniement. Le but était d’écarter les frondeurs du pouvoir, et ceux qui souhaitaient s’écarter eux-mêmes comme Aurélie Filipetti, qui n’a pas souhaité revenir aux affaires et soutenir ses deux camarades. C’est une démonstration de l’autorité de Valls qui est visible ici, rien d’autre. Si, quelques ajustements d’hommes pour que le Premier ministre applique sa politique plus dans l’intérêt global, que celui de la gauche.
La gauche contre elle-même
Dès son premier jour, Emmanuel Macron a accentué la division qui existe au sein du PS. Des propos qu’il avait tenus sur les 35h et leur révision commencent déjà à bourdonner dans les oreilles socialistes. Aujourd’hui, le parti doit s’entendre pour éviter de courir à la catastrophe et à la dissolution de l’Assemblée qui lui coûteraient plus que certainement, sa majorité. Le message de Matignon était clair, dimanche, après le discours de Montebourg, « la ligne jaune a été franchie ». C’est cette ligne jaune qui sépare désormais les programmes politiques qu’une partie du PS aimerait adopter, et de l’autre, au pouvoir actuellement.
La ligne politique que souhaite mettre en place le Parti Socialiste aura l’occasion d’être discutée ce week-end, à La Rochelle, pour les universités d’été du parti. Manuel Valls, principale cible des frondeurs et des mécontents du parti, arrivera demain et s’exprimera dimanche. Un discours qui s’annonce électrique. Pourtant, hier, 200 députés PS ont signé une lettre invitant à « soutenir le pouvoir en place ». Claude Bartolone et Bruno Le Roux font partie des principaux instigateurs. Ils n’oublient pas avant tout que c’est à cause ou grâce à eux qui Hollande est au pouvoir aujourd’hui. Que ce sont eux et les militants qui ont choisi l’ancien Maire de Tulle aux primaires de 2011.
D’ailleurs, le secrétaire général du PS, Jean-Christophe Cambadélis, met déjà les choses au clair et souhaite éviter toute tentative de renversements du gouvernement. « Je me porte garant des débats, mais je ne saurais accepter qu’ils aient pour but de renverser le gouvernement » dit-il au Monde « la gauche a toujours eu deux cultures : celle de la réforme et celle de la contestation, elles doivent dialoguer, mais ne pas s’affronter, car, sinon, nous allons tous nous marginaliser ».
Martine Aubry, emblème de la gauche et adversaire de Hollande en 2011, ne sera pas à La Rochelle. Plusieurs ministres et anciens ministres seront également absents. Ce qui montre que le rassemblement n’est pas totalement complet.
Et la suite, qu’est ce que ce sera ?
Nous avons déjà évoqué le fait que l’Assemblée Nationale pourrait être dissous par François Hollande, comme l’avait fait Jacques Chirac en 1997. Mais l’on se souvient que c’est à ce moment-là que la gauche s’est retrouvée au pouvoir et obligée Chirac et la droite à cohabiter. Une idée que Hollande devrait éviter d’avoir, ou vite se la sortir de la tête. Car vu les récents scores du FN aux dernières élections, on peut imaginer que les deux sièges actuellement occupés par le FN pourraient s’élargir. Pareil pour l’UMP, qui ne possède pas la majorité, mais la retrouverait sans doute illico avec de nouvelles élections Législatives. Une nouvelle pas si bonne pour le parti de droite qui ne souhaiterait pas se retrouver dans les soucis du pouvoir en place, et n’aimerait pas envoyer un de ses meilleurs éléments au casse-pipe de Matignon.
L’autre interrogation est la durée de ce gouvernement. Qui nous dit que d’autres ministres ne vont pas manifester leurs soutiens à l’aile gauche du PS, qui rassemble frondeurs et anti-Valls. Taubira la première, elle qui s’est empressée de tweeter pour soutenir Arnaud Montebourg, après son discours à Frangy dimanche. On sait maintenant que Valls tient à sa ligne sociale-libérale ainsi qu’à son autorité. Un mélange de tout ça et vous obtenez une nouvelle démission du gouvernement Valls II, dès le premier écart de comportement ministériel.
Quoi qu’il en soit, il reste aujourd’hui trois ans à Hollande et au PS pour regagner la confiance des Français, retrouvez une harmonie dans le parti, appliquer une politique efficace et cohérente et ne pas se faire virer du pouvoir d’ici là.