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On a vu pour vous… Tin Star (Sky / Amazon), la nouvelle série de Tim Roth

Tim Roth est sans conteste l’atout majeur de Tin Star : il est exceptionnel dans ce polar complexe et intrigant, néanmoins trop confus pour convaincre totalement.

C’est quoi, Tin Star ? Inspecteur de police britannique, Jim Worth (Tim Roth) s’installe avec sa femme (Genevieve O’Reilly) et ses deux enfants à Little Big Bear, une petite ville tranquille, isolée dans les montagnes rocheuses canadiennes, pour repartir à zéro et fuir ses problèmes d’alcool. Nommé chef de la police locale, il entend bien faire respecter la loi, quitte à contrarier les plans d’une puissante compagnie pétrolière, la North Stream Oil, et notamment du chef de la sécurité Louis Gagnon (Christopher Heyerdahl) et de sa représentante Elizabeth Bradshaw (Christina Hendricks). Mais lorsqu’une tragédie atroce frappe sa famille, Jim perd pied, rattrapé par le passé qu’il voulait laisser derrière lui et qui réveille de vieux démons…

Inutile de nier que la série Tin Star, sortie de l’imagination de Rowan Joff, retient d’abord l’attention en raison de la présence de Tim Roth au générique. Le talent de l’acteur n’est plus à démontrer, il en fait la preuve tout au long d’une filmographie impressionnante et à la télévision, dans le rôle de Cal Lightman, héros de la série Lie To Me. A lui seul, il justifie qu’on regarde Tin Star, sa remarquable interprétation palliant aux défauts d’une série qui, loin d’être mauvaise, a toutefois de quoi laisser perplexe.

Le scénario est facile à résumer : un policier au passé obscur s’installe avec sa famille dans une petite ville isolée du Canada, où il prend la direction de la police locale. Quelques temps après son arrivée, une compagnie pétrolière s’implante dans la région, et l’affrontement entre ses dirigeants et notre héros va déclencher une spirale de violence, culminant avec un drame qui va révéler le côte le plus sombre de sa personnalité. Tin Star, c’est donc le récit de la vengeance d’un homme torturé, en conflit avec lui-même, sujet à la fois à l’alcoolisme, l’apathie et la violence. De fait, toute la dynamique de la série repose sur l’idée de dualité : les multiples facettes de Jim (et encore faut-il attendre la mi-saison pour en prendre toute la mesure…), l’opposition entre la nature sauvage et l’irruption d’une usine pétrochimique, les paysages spectaculaires et paisibles des montagnes canadienne et la criminalité urbaine ; le cynisme du patron de North Stream Oil face à l’idéalisme naïf de sa représentante.

Tim Roth, magnétique héros de Tin Star

 

A priori, on se dit que l’histoire est simple à comprendre… mais elle se complique singulièrement en raison de la structure du récit. S’il fallait trouver un mot pour décrire la série, le qualificatif« bizarre » s’imposerait  sans doute. Car l’originalité absente d’un scénario finalement convenu, Tin Star tente de la trouver dans sa construction et dans la mise en scène. Et c’est là le problème : quelque part entre Ozark pour l’ambiance et la saison 1 de Twin Peaks pour l’esthétique, la série cherche avant tout à surprendre et déstabiliser son public, négligeant de construire un récit cohérent. Globalement, l’histoire reste intrigante et pleine de rebondissements inattendus, mais elle est noyée dans une succession de scènes mi-oniriques mi-fantasmées, esthétisées et maniérées à l’extrême, parfois difficilement compréhensibles et le plus souvent inutiles.


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De même, la construction est volontairement mais inutilement complexe. A l’instar de la plupart des épisodes, le pilote débute par la scène finale avant de revenir en arrière, pour un long flash-back mettant en place la situation et les personnages. Au départ, cette approche fonctionne : bien que déjà vue, elle créé le suspense et la tension nécessaires, culminant avec la révélation choc de l’événement déclencheur.

Cependant, répété tout au long de la saison, le procédé perd de sa force et rajoute surtout de la confusion dans un scénario déjà tortueux. Ignorant tout du passé des protagonistes, le spectateur se trouve face à un puzzle dont il n’a pas la moitié des pièces, à la merci d’événements qu’il est incapable d’interpréter. Certes, arrivé au terme des 10 épisodes, les choses deviennent plus claires ; encore faut-il parvenir au bout d’une série dont on ne comprend pas toujours grand-chose… En bouleversant le temps de la narration, en l’interrompant soudainement avec des séquences cryptiques qui ne prennent leur sens qu’au terme du récit, Tin Star entend de toute évidence attiser la curiosité. Si l’on y est sensible, il y a quelque chose de proprement fascinant dans Tin Star ; dans le cas contraire, on est perdu et l’on s’ennuie.

Christopher Heyerdahl, l’autre star de Tin Star

 

Reste Tim Roth, pilier d’un récit évidemment centré sur Jim Worth  : avec une économie de jeu saisissante, il n’a besoin que d’un regard pour faire comprendre la nature de son personnage et qui il est vraiment. Remarquablement construit, ce héros est riche d’une histoire personnelle, d’un passé, d’un caractère qui permettent de comprendre ses actions, aussi incohérentes semblent-elles. Autre personnage incroyable, Louis Gagnon : sous les traits du génial Christopher Heyerdahl (Hell on Wheels), cet homme énigmatique, terrifiant et hypnotique méritait certainement mieux que l’arrière-plan auquel il est  relégué. Les meilleures scènes sont d’ailleurs celles où il se confronte directement au héros, qui ne pouvait rêver meilleur antagoniste. A contrario, les autres protagonistes sont nettement moins soignés : l’épouse et la fille de Worth oscillent entre des réactions contradictoires illogiques ; le personnage incarné par Cristina Hendricks (Mad Men) reste longtemps en marge du récit ; l’excellente interprétation d’Oliver Coopersmith ne parvient pas à rendre intéressant le criminel Whitey, plus agaçant que menaçant.

Au terme de cette première saison, Tin Star laisse une impression mitigée : celle d’une série à moitié réussie… et donc à moitié ratée. Elle se perd dans une mise en œuvre maladroite et un enchevêtrement de mystères et de circonvolutions superfétatoires ;l’intrigue, les décors, les acteurs (et surtout Tim Roth – mais vous l’aviez sans doute compris…) et certaines scènes enthousiasmantes sauvent toutefois l’ensemble. Tin Star mérite donc qu’on lui laisse sa chance, ne serait-ce que pour le personnage de Jack. On espère en apprendre davantage sur son compte dans la saison 2 (dont le tournage débutera en février 2018) : quand vous aurez fait sa connaissance, vous comprendrez pourquoi…

Tin Star (Sky / distribué par Amazon)
Saison 1 – 10 épisodes de 50′ environ.

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Rédacteur en chef du pôle séries, animateur de La loi des séries et spécialiste de la fiction française
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