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On a vu pour vous … le revival de Perry Mason en mini série

C’est l’un des événements de ce début d’été : le retour de l’un des plus célèbres avocats de la télévision américaine : Perry Mason, cette fois avec Matthew Rhys dans le rôle titre. Huit épisodes pour revenir aux origines du mythe.

C’est quoi Perry Mason ? Los Angeles, 1931. Alors que le reste du pays traverse la Grande Dépression, cette ville est en plein essor ! Pétrole ! Jeux Olympiques ! Films parlants ! Ferveur évangélique ! Lorsque le cas de la décennie tombe à sa porte, la quête incessante de Mason vers la vérité révèle une ville fracturée et peut-être, une voie de rédemption pour lui-même.

Un personnage iconique

Avant d’être le personnage de fictions télé que l’on connaît, Perry Mason fut d’abord un héros de romans de Erle Stanley Gardner dont le premier volume, sorti en 1933, sera The Case of the Velvet Claws. Au total le personnage sera au cœur de 82 romans et 3 recueils de nouvelles. Puis naturellement comme c’est souvent le cas, il sera le héros d’une fiction radio avant de prendre vie en 1957 sous les traits de Raymond Burr (le méchant du film Fenêtre sur cours de Hitchcock). La série va durer 9 ans jusqu’en 1966. Dans les années 70, un autre acteur va brièvement camper le célèbre avocat mais l’empreinte de Burr est telle que la mayonnaise ne prendra pas. En 1985, alors que la télévision américaine aime faire revenir occasionnellement ses héros sous le forme de téléfilms, Raymond Burr rempile dans le rôle iconique, toujours accompagné de Barbara Hale dans celui de Della Street. Sur le modèle de Columbo, la série reviendra régulièrement sous le format 90 minutes avec de prestigieux guests, stars de l’époque (comme Joe Penny ou David Hasselhoff) et ce durant 30 téléfilms pour certains très réussis. Ce succès prouve que Raymond Burr a beaucoup fait quant à la popularité du personnage au point qu’il est très difficile d’envisager un autre acteur dans le rôle. Mais le temps lui peut sans doute le permettre.

Une nouvelle version classe et brillante

Comme on le rappelle souvent, Perry Mason a beaucoup fait non seulement pour améliorer l’image que l’on avait des avocats de la défense, mais aussi pour familiariser le public avec le système judiciaire américain. L’annonce du retour du héros de Gardner quelques 27 ans après la disparition de Raymond Burr sonnait comme un véritable défi. En pleine mode des remakes, et sur une chaîne comme HBO (alors que Perry Mason est une série classique de network), que pouvait-on attendre de cette nouvelle version ?

Premier changement notable : la série change de format. Fini l’enquête par épisode, place à une longue intrigue qui avance au fil des épisodes (un peu à la manière de ces nouvelles séries judiciaires, indirectement initiées par le succès de Perry Mason).
Autre changement radical : Perry Mason n’est pas encore, en tout cas au début de la série, l’avocat que l’on connaît. Il est dans la position de son fidèle limier Paul Drake, celui de détective privé d’un grand avocat à Los Angeles en 1932, incarné par John Lithgow. Ce dernier doit défendre une personne accusée du meurtre d’un enfant. Une affaire sale, violente, dans une ville où la police est aussi corrompue que ceux qu’elle doit traquer. C’est Matthew Rhys (The Americans) qui donne vie à un nouveau Mason, et le fait d’une manière remarquablement classé où le privé, plus proche de Mike Hammer que du redoutable avocat à venir, est brisé par la première guerre mondiale qui a laissée des traces sur lui.
La mini série se positionne comme une origine story, c’est-à-dire qu’on y retrouve les personnages que l’on connaît mais pas à la bonne place. Outre Mason, vous retrouverez Della Street et Paul Drake avant qu’ils ne deviennent ceux que l’on connaît. La réalisation de Tim Van Patten (Les Sopranos, The Wire, Boardwalk Empire) est d’une classe folle, soignée, maîtrisée tout en montrant la noirceur crasse de la cité des anges. En emmenant Mason dans une direction et un style radicalement différent, la série évite quasiment instantanément la comparaison avec la partition de Burr pour offrir une autre lecture du personnage. Si on reconnaîtra ici et là les codes de la série originale avec son sens du twist redoutable, Perry Mason 2020 n’est jamais le calque de la série originale.

L’autre force de la série c’est que bien qu’élaborer avant les événements qui secouent actuellement la société américaine, elle entre frontalement en résonance avec l’actualité. Sous fond de violences policières, l’intrigue de Perry Mason dresse un constat terrible et redoutable du système judiciaire américain et montre bien ce qu’il advient quand, à plus de 65 ans plus tard, on s’empare d’un même personnage pour lui faire dire autre chose. Là où le personnage joué par Raymond Burr, montrait un système où l’avocat de la défense triomphe et où la justice est rendue, la version de Rhys nous plonge dans une vision bien plus désabusée de la justice, mais aussi de la police. Perry Mason 2020 est donc en ça le parfait exemple d’un remake non seulement réussi, mais aussi nécessaire.

Cette mini série Perry Mason est une vraie réussite qui ne doit composer que très rarement avec des petits maladresses scénaristiques (comme le passage du privé à l’avocat). Mais la série prouve surtout qu’il n’y a aucune fatalité à s’emparer d’un personnage aussi connu pour l’emmener vers d’autres contrées. Et on se prend à espérer que HBO puisse de nouveau convoquer Matthew Rys pour reprendre ce rôle si important dans une nouvelle affaire.

Perry Mason sur OCS dès le 22 juin 2020

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Rédacteur en chef du pôle séries, animateur de La loi des séries et spécialiste de la fiction française
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