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On débriefe pour vous … Manhunt – Unabomber (Netflix), traque passionnante d’un terroriste

Disponible sur Netflix, Manhunt : Unabomber raconte la traque du tueur du même nom. Reconstitution minutieuse d’une enquête de 17 ans, c’est aussi la confrontation de l’obsession de deux hommes.

C’est quoi, Manhunt : Unabomber ?  Entre 1978 et 1995, le FBI a traqué Ted Kaczynski (Paul Bettany), un terroriste connu sous le nom de Unabomber. qui a tué 3 personnes et en a grièvement blessé 23. Ce scientifique marginal aux idées contestataires envoyait à ses victimes des colis piégés, et il fit parvenir à la presse un manifeste détaillant ses positions anarchistes et écologistes. C’est en analysant ce texte qu’un jeune agent, Jim Fitzgerald (Sam Worthington), est parvenu à dresser le profil qui a conduit à son arrestation. Et ce, en dépit des réticences  de ses supérieurs, sceptiques devant des méthodes inédites, alors jugées excentriques et inefficaces.

Après le succès (mérité) de la série Mindhunter, il serait facile de tomber dans le piège de la comparaison, Manhunt : Unabomber présentant de nombreuses similitudes avec la série de David Fincher. Elle s’appuie sur un livre écrit par l’agent du FBI qui en est le héros ; elle retrace des événements réels ; elle évoque la manière dont la vie privée de l’enquêteur est affectée par son travail ; elle se situe à une période où l’analyse psychologique et le profilage en sont encore à leurs balbutiements. Pour autant, Manhunt a été lancée aux États-Unis avant Mindhunter, et elle est surtout suffisamment réussie pour mériter d’être définie en dehors de tout rapprochement.


A lire aussi : On a vu pour vous … le premier épisode de Mindhunter, la série de David Fincher


A l’origine, il y a un livre : dans A journey to the center of the mind, Jim Fitzgerald  raconte comment il est parvenu à dresser le profil de Unabomber en analysant le manifeste qu’il avait écrit, malgré le scepticisme du FBI , quand la psychologie est encore tenue pour un fatras sans intérêt. C’est Andrew Sodroski, scénariste obsédé par l’affaire, qui s’est chargé de l’adaptation pour Discovery Channel. L’histoire s’appuie donc sur des faits réels, bien connus du public car très médiatisés à l’époque. Dans ces conditions, inutile d’entretenir un faux suspense : la première scène montre d’emblée la capture de Ted Kaczynski, mettant ainsi sur un pied d’égalité tous ceux qui sont familiers de l’histoire et les autres, qui en ignoreraient la conclusion. 

On commence par la fin : le tueur face à l’agent du FBI

 

Toujours dans ce premier épisode, le face-à-face entre Fitzgerald et Kaczynski donne le ton : acmé du duel que se sont livrés les deux hommes pendant plus de 15 ans, c’est le point de départ d’un récit où le présent (la détention du tueur et les interrogatoires) se mêle à des flash-back. Dans un va-et-vient temporel continuel, Manhunt reconstruit toute l’histoire en suivant deux lignes parallèles : l’enquête proprement dite menée par Fitzgerald, et la vie, les actions et le modus operandi du terroriste. Au départ, Manhunt apparaît comme un procedural classique ; rapidement, la série s’enrichit en confrontant – d’abord à distance puis en chair et en os – deux hommes et leur obsession. Entre les événements passés et le récit au présent,  nous assistons à toute l’évolution de ces deux personnages. 

Jeune agent tout juste affecté à l’enquête, Fitzgerald devient vite totalement obsédé par le tueur, au point de mettre son équilibre et sa vie personnelle en péril ; au lieu de se contenter des preuves matérielles insuffisantes, il tente de pénétrer dans la tête de Unabomber en se tournant vers l’analyse de ses écrits. Une idée révolutionnaire à l’époque, qui lui vaut d’être marginalisé par ses supérieurs et ses collègues, qui doutent de la pertinence et de l’efficacité de la méthode. Dans le rôle, Sam Worthington est excellent. On le connaît surtout pour son rôle dans Avatar ; il construit ici un personnage complexe et subtil, à la fois déterminé et psychologiquement fragile, qui évolue au fil de l’enquête.

Paul Bettany, formidable dans le rôle de Unabomber

 

Ted Kaczynski, marginal asocial reclus dans une cabane au fond du Montana, choisit la voie du terrorisme pour essayer d’attirer l’attention de la communauté scientifique et du grand public ; à travers des manifestes envoyés à la presse, il entend faire passer ses idées politiques et exposer ses théories. Son passé et ses motivations se dévoilent par touches, Manhunt relatant son parcours avec une rigueur clinique qui exclut l’empathie, pour tenter d’expliquer comment il est devenu ce tueur psychopathe. Le personnage est incarné (littéralement) par un Paul Bettany bluffant. Quasiment absent du premier épisode, une seule scène lui suffit pour se glisser dans la peau d’un Ted Kaczynski terrifiant, mais dont il rend les motivations intelligibles, en dépit de meurtres abjects.  

C’est évidemment sur le duo  Worthington / Bettany que repose toute la série. Le reste du casting est cependant d’un très bon niveau, notamment avec Chris Noth, très convaincant dans le rôle du supérieur direct de Fitzgerald. Citons aussi Janet Lynch, Jeremy Bobb, Micheal Nouri ou encore Mark Duplass, qui n’ont toutefois qu’une importance relative et ponctuelle : leurs personnages, très succincts, ont surtout le mérite de faire progresser l’action.

Une mise en scène aussi minutieuse que le travail de Fitzgerald

 

Bien que la série s’ouvre par sa conclusion, elle réussit le pari de maintenir le suspense et une tension constante. Prenante dans sa construction, Manhunt n’en néglige pas pour autant sa mise en forme : chaque plan est scrupuleusement pensé et étudié, certains s’apparentant presque à des tableaux minutieusement construits. Tout y est graphique, les séquences les plus violentes comme celles où Fitzgerald est absorbé par l’étude des textes de Unabomber., ou encore les scènes d’interrogatoire où des échanges dialectiques passionnants se jouent en huis-clos. A la manière de…  Mindhunter. D’accord, on avait dit : pas de comparaison. Mais il est indéniable qu’avec son ambiance visuelle et le rythme d’une enquête méticuleuse et détaillée, Manhunt n’est pas non plus sans rappeler Zodiac, superbe film d’un certain David Fincher…

Si vous avez aimé Mindhunter, on ne saurait que trop vous conseiller Manhunt : Unabomber, une série (au moins) aussi passionnante. Soignée dans sa mise en scène, intelligemment construite, portée par un formidable duo d’acteurs, c’est une vraie réussite. Mieux : un petit bijou, indispensable pour les amateurs du genre. Faites-nous confiance : vous ne le regretterez pas.

Manhunt : Unabomber (Discovery Channel)
Disponible sur Netflix.
8 épisodes de 45′ environ.

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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