La CW lance un remake de Dynastie le 11 octobre. On en profite pour vous raconter les grandes lignes de la série d’origine
1981. Alors que la série Dallas bat des records d’audience sur CBS, la chaine ABC, avide de rivaliser avec ce programme phare entreprend le légendaire producteur Aaron Spelling (Drôles de Dames, La Croisière S’amuse, Starsky & Hutch… ) afin qu’il crée une série concurrente capable de faire aussi bien voire mieux que Dallas. Spelling fait équipe avec un couple de vétérans de la télévision américaine, Richard et Esther Shapiro dont le projet initial, Oil, conte la confrontation entre une famille lambda et une dynastie milliardaire, les deux évoluant dans l’industrie pétrolière, à des échelons évidemment différents.
Renommée Dynastie la série débute le 12 janvier 1981 avec un long épisode pilote de trois heures qui présente l’intrigue et les personnages principaux. Blake Carrington (John Forsythe), sa future femme Krystle (Linda Evans), les enfants de Blake, Fallon (Pamela Sue Martin) et Steven (Al Corley), Jeff Colby (John James), prétendant de Fallon, la famille Blaisdel, Matthew (Bo Hopkins), sa femme Claudia (Pamela Bellwood) et l’associé et ami de Matthew, Walter Lankershim (Dale Robertson). Autour de ces personnages phares gravitent des rôles secondaires comme Joseph le majordome du manoir Carrrington (Lee Bergere) ou Michael le chauffeur de Blake (Wayne Northrop).
Pour faire l’évènement, la communication insiste sur le fait que tout ce que l’on voit à l’écran est réel (véritable caviar, champagne et fourrures) et la série se targue d’être autant réaliste que glamour et aborde de front, dès les premiers épisodes, des thématiques alors encore tabous comme l’homosexualité puis affiche une apparence libérale en opposition avec l’image conservatrice de la famille Ewing de Dallas. Malgré tout ce faste les débuts de Dynastie sont chaotiques alors que sa rivale caracole en tête des audiences. Au terme de 13 semaines de diffusion, la série ne décolle pas et les promesses qu’elle a suscitées ne sont que partiellement tenues.
Après quelques études auprès des téléspectateurs, il ressort que l’aspect social de la série représentée notamment par la famille d’américains moyens, les Blaisdel, ne permet pas au téléspectateur de s’évader suffisamment de son quotidien. La famille Blaisdel est sacrifiée sur l’autel des taux d’audience, Claudia étant la seule rescapée de ces coupes sombres et les scénarios s’engouffrent dans le glamour à outrance et la démesure financière.
Malgré des résultats contrastés, la saison une se termine par une intrigue qui permet à la série de trouver sa voie. Avec le procès pour meurtre intenté contre Blake après qu’il ait assassiné l’amant de son fils, son ex-femme apparait au tribunal pour témoigner contre lui. Nouveaux dans le pool créatif, Eileen et Robert Pollock qui ont l’expérience des soap-opera avec leur travail sur General Hospital sont les initiateurs de l’arrivée de ce nouveau personnage qui va donner à la série sa raison d’être et lui donner le coup de fouet salvateur pour se sortir des audiences moyennes où elle végète.
C’est Joan Collins, une comédienne assez peu connue alors, qui interprète Alexis Morell Carrington et en fin de saison 2, Dynastie est toujours devancée par Dallas mais a grignoté une partie de son retard grâce à cette femme qui incarne toute la démesure que le public recherche. Pour la troisième saison, Alexis devient financièrement l’égale de Blake en épousant son rival Cecil Colby. Ce dernier est aussitôt éliminé du récit pour permettre à sa femme de mener sa croisade contre son ex-mari. Mais d’autres personnages permettent à cette saison de grimper dans les audiences de manière significative et notamment celui de Michael Torrence (Gordon Thomson) qui prétend être Adam Carrington, le fils d’Alexis et Blake enlevé quand il était enfant et qui va être à l’origine de nombreux conflits.
C’est dans cette saison également que le contrat d’Al Corley n’est pas renouvelé et que le personnage de Steven prend l’apparence de Jack Coleman (Heroes) après un soi-disant incendie sur une plateforme pétrolière qui lui a ravagé le visage et qu’il ait dû avoir recours à une opération de chirurgie esthétique. Un des artifices habituels du soap opera qui fonctionne plutôt bien. A la fin de cette saison 3, Krystle et Alexis se retrouvent piégés dans un chalet en flammes et la série atteint alors la cinquième place des audiences.
La quatrième saison de Dynastie voit l’arrivée dans le casting de deux personnages qui deviendront très importants dans la série : Dex Dexter (Michael Nader) et Dominique Devereaux (Diahann Carroll) et également de la première vedette internationale qui y participe en la personne de Helmut Berger, témoignant du gap considérable que la série a fait dans les esprits après des débuts quelque peu hésitants. C’est aussi dans cette saison qu’apparaissent Gérald Ford et Henry Kissinger, le côté glamour et le succès grandissant de Dynastie attirant de nombreuses personnalités.
La cinquième saison de Dynastie est souvent considérée comme la meilleure, la démesure dont la série est capable atteignant son paroxysme. C’est aussi dans cette saison que deux guest stars extrêmement prestigieuses participent à la série : Rock Hudson et Ali MacGraw. C’est aussi cette saison que Emma Samms reprend le rôle de Fallon après que les négociations pour faire revenir Pamela Sue Martin aient capotées et que Catherine Oxenberg (Agence Acapulco) endosse le rôle d’Amanda, une autre enfant disparue de Blake et Alexis qui a retrouvé le giron familial.
En toute fin de saison la série se dote d’un cliffhanger dantesque, l’équivalent du Qui a tiré sur J.R pour Dallas. Dans cet épisode intitulé Mariage Royal, des mercenaires armés font irruption dans l’église lors de la célébration du mariage d’Amanda et du Prince Michael de Moldavie et tirent sur toute l’assistance. La dernière image de l’épisode se fige sur un amas de corps inanimé, du plus petit au plus grand rôle le sort de chacun des protagonistes étant suspendu au bon vouloir des scénaristes et les nerfs des téléspectateurs étant eux mis à rude épreuve. Cette saison 5 permet à la série d’asseoir définitivement sa réputation, de passer devant Dallas et d’être enfin numéro un.
Mais après être montée si haut, la série va lentement entamer un déclin, certes progressif, mais indéniable. La saison 6 met un temps fou à rééquilibrer les enjeux dramatiques et l’ajout de rivalités fraternelles avec l’arrivée de la sœur d’Alexis et du frère de Blake n’empêchent pas Dynastie de faire quelque peu du surplace et de se perdre dans des intrigues alambiquées qui ne sont pas réellement convaincantes comme la duplicité du personnage de Heather Locklear présente depuis la saison 2 dans le rôle Samantha Joséphine « Sammy-Jo » Dean Reece Carrington Fallmont associée à celui que joue le comédien George Hamilton.
C’est dans cette saison qu’apparaissent Charlton Heston, Barbara Stanwyck, Maxwell Caulfield, Tracy Scoggins, Claire Yarlett, Ricardo Montalban et Stephanie Beacham, soit la quasi intégralité du casting de la série dérivée que lance Aaron Spelling : Les Colby. Afin de tenter de répondre au triomphe de Côte Ouest, le spin-off de Dallas, Les Colby aligne une distribution haut de gamme que rejoint John James et Emma Samms. Mais la série ne trouvera jamais réellement la bonne carburation et sera annulée au bout de deux saisons sur une intrigue totalement abracadabrante mettant en scène… une soucoupe volante.
Les trois dernières saisons de Dynastie n’ont plus la flamme et confirment que la série est sous respiration artificielle. Pour la saison 9 Joan Collins signe pour seulement 11 épisodes tandis que Linda Evans tire elle sa révérence. L’ultime épisode désarçonne le public car il propose un cliffhanger démoniaque qui n’est évidemment pas résolu, suscitant l’incompréhension et la frustration du public. Deux ans après la fin de la série, Dynastie la Réunion donnera quelques réponses plus ou moins satisfaisantes à cette fin ouverte et fera passer un moment agréable aux fans de la série.
Dans l’histoire de la télévision américaine, Dynastie est l’un des 4 grand primetime soap avec Dallas, Côte Ouest et Falcon Crest, mais à n’en pas douter elle est la plus fastueuse, la plus bigger than life. On y vit quand même notamment deux femmes adultes se battre à coup de strass. La place des femmes fortes dans Dynastie fut d’ailleurs relativement importante, la série sachant aborder des thématiques sociétales importantes et offrir des coups de projecteur entre autres à l’homosexualité et à la représentation afro-américaine en prime-time.
La nouvelle version de Dynastie saura t-elle s’inscrire dans la lignée de la série originale et retrouver le goût du champagne et du caviar à la louche? On peut légitimement en douter, ne serait-ce que parce que la télévision a changé, que la diversité et la sophistication des récits s’est développée au fil des années. Mais revoir un soap d’envergure à la télévision américaine mené par des gens qui connaissent la mécanique de ce type de programme peut apparaitre de bonne augure, quand bien même Grant Show n’aura jamais le charisme de John Forsyte.