Dernière série en date de Ryan Murphy, Halston retrace la vie de son personnage éponyme de manière classique mais efficace et plaisante.
C’est quoi, Halston ? En 1961, le modiste Roy Halston (Ewan McGregor) devient une star du jour au lendemain lorsque Jackie Kennedy porte une de ses créations. Halston commence alors son ascension dans le monde de la mode, diversifiant ses créations au sein de son entreprise. Avec son amie et muse Liza Minnelli (Krysta Rodriguez), le mannequin Elsa Peretti (Rebecca Dayan) et son designer Joe Eula (David Pittuame ), il connaît le succès, enchaîne les collections mais aussi les excès en tous genres, les fêtes débridées et les scandales…
Le nom de Roy Halston ne vous dit rien ? C’est normal. Peu connu en France, ce créateur de mode est en revanche célèbre aux États-Unis où, dans les années 1970 et 1980, il était considéré comme le grand rival de Calvin Klein et comparé à Yves Saint-Laurent. Un prodige de la mode dont les vêtements simples et élégants ont fait fureur, le magazine Newsweek le qualifiant même de «premier créateur de mode américain». D’après le livre Simply Halston: The Untold Story de Steven Gaines, Murphy et ses coauteurs retracent son parcours en cinq épisodes pleins de strass, de paillettes et de tragédie, de son ascension professionnelle à sa chute, en passant par ses relations tumultueuses et les fêtes folles au Studio 54.
La série survole sa jeunesse dans l’Iowa dans de brefs flash-back , ainsi que ses débuts en tant que modiste. Nous rencontrons Halston au moment où Jacqueline Kennedy porte un bibi rose de sa création lors de l’investiture de son mari ; dès lors, les chapeaux de Halston s’arrachent. Rencontrant Liza Minnelli qui devient son amie et sa muse, il commence à diversifier ses collections en se tournant vers le prêt-à-porter, les bagages, les parfums. Son showroom de New York est le lieu de rassemblement des grandes stars de l’époque – Bianca Jagger, Lauren Bacall, Silvana Mangano, Andy Warhol, Elizabeth Taylor – et Halston devient une star.
Mais ce créateur de génie est aussi un homme sulfureux : aussi talentueux qu’arrogant, aussi brillant que caractériel, aussi inspiré qu’instable. Odieux même avec ses amis, ingérable pour ses collaborateurs. Une quantité faramineuse de cocaïne dans le pif après des nuits passées entre le glamour des fêtes du studio 54 et les allées sombres des parcs où il paie des relations tarifées avec des prostitués, Halston arrive au bureau à 18 heures, incapable de créer quoi que ce soit. Et lorsqu’il vend sa marque à une grande entreprise, il finit par en perdre le contrôle puis même l’usage de son nom lorsqu’il est viré de sa propre maison de couture…
Le parcours sulfureux et romanesque d’un personnage aussi excessif que charismatique : le sujet convient parfaitement à Ryan Murphy. Halston a quelque chose d’une rock star et, dans sa structure et les sujets abordés (excès, sexualité débridée, peur de l’échec, impact des critiques sur l’estime de soi…), la série rappelle parfois des films récents tels que Bohemian Rhapsody ou Rocketman, respectivement dédiés au grand Freddie Mercury et à Elton John. Avec Halston , Murphy signe donc une série biographique classique, plus conventionnelle que ce que l’on pouvait croire , ce qui n’empêche pas la série d’être une réussite. Entre grandeur et décadence du héros, les cinq épisodes regorgent de détails parfois sordides ou au contraire de scènes pleines de paillettes et de grâce: on alterne entre consommation de drogue, brefs coïts anonymes à Central Park, relation destructrice avec un amant nommé Victor Hugo (oui !) et les spectacles de Liza Minnelli, les défilés époustouflants au showroom, l’épique « bataille de Versailles » au cours de laquelle les couturiers américains sont venus défier les couturiers français sur leur propre terrain (superbe épisode 2), les soirées folles en pleine ère disco. S’y ajoutent des réparties cyniques hilarantes, comme cette phrase lancée par un des collaborateurs de Halston après la découverte d’un cadavre dans un conduit d’aération : « Et le pire ?! Il portait du Calvin Klein ! »
Visuellement, Halston est d’une grande élégance, elle brille par la mise en valeur des décors et des costumes scrupuleusement recrées : les bureaux du créateur qui dominent New York ou le Studio 54 par exemple, l’iconique robe rouge de Liza Minnelli, la sublime collection tye and dye ou les costumes de scène qu’il signe pour la chorégraphe Martha Graham. Le tout, au son de chansons de David Bowie, Donna Summer, The Velvet Underground ou les Cocteau Twins.
Mais le plus renversant, dans Halston, ce sont les acteurs. On peut citer les noms de Bill Pullman, Rory Culkin (frère de…), la Française Rebecca Dayan, Vera Farmiga , ou encore Krysta Rodriguez dont la ressemblance avec Liza Minnelli est stupéfiante. Et puis, il y a Ewan McGregor qui se glisse dans la peau de Halston avec aisance et brio, avec les nuances nécessaires pour rendre cet homme complexe tour à tour flamboyant et pathétique, insupportable et attachant. On a l’habitude de voir des acteurs imiter la personnalité qu’ils incarnent grâce au maquillage ou aux prothèses, mais l’acteur écossais n’a nul besoin de ces artifices. Il module sa voix, modifie sa démarche et sa gestuelle jusqu’à disparaître derrière Roy Halston. Il brille dans chaque scène, aussi charismatique et éblouissant que ce Halston que la plupart d’entre nous ont découvert grâce à la série de Ryan Murphy.
Méconnu chez nous, Halston est pourtant un grand nom de la mode américaine, un créateur iconique qui a contribué à définir le style des années 1970. Contemporain de Balenciaga, Armani, Calvin Klein, Pierre Cardin ou de « ce fils de p… d’Yves Saint Laurent » (sic) , il a notamment contribué à rendre la mode accessible à tou.te.s lorsqu’il s’est tourné vers le prêt-à-porter. La série enchantera les fashionistas mais pas besoin d’être mordu de mode pour plonger dans la vie sulfureuse et tourmentée de Halston, entre créations inspirées, scandales, excès et paillettes : sexe, drogue et défilés de mode.
Halston
5 épisodes de 45′ environ.
Disponible sur Netflix.