Vous connaissez par cœur l’histoire des Trois mousquetaires ? Et bien on prend le pari : vous ne l’avez jamais vue comme ça.
C’est quoi, Les trois mousquetaires ? En 1625, le jeune D’Artagnan (Maxime Le Gac-Olanie) quitte sa Gascogne natale à mobylette, pour rejoindre la prestigieuse troupe des mousquetaires du roi Louis XIII (Grégoire Lagrange). A Paris, il va se lier avec Athos (Guillaume Pottier), Porthos (Charles Van de Vyver) et Aramis (Robin Causse) ; ensemble, les quatre hommes vont contrecarrer les plans machiavéliques du Cardinal de Richelieu (Jade Herbulot). Pour protéger la reine Anne d’Autriche (Eléonore Arnaud), ils vont devoir affronter les CRS du Cardinal et ses âmes damnées, Milady de Winter (encore Eléonore Arnaud) et Rochefort (Robin Causse, bis)…
Publié sous forme de feuilleton à partir de 1848, le roman Les Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas est un chef-d’œuvre de la littérature française, un incontournable de la culture populaire. Tout le monde connaît les aventures de D’Artagnan et de ses acolytes, qui ont fait l’objet d’une multitude d’adaptations au cinéma et à la télévision. Vous croyez connaître l’histoire des Trois mousquetaires, vous l’avez lue ou vue des dizaines de fois ? Peut-être – mais certainement pas comme ça.
C’est en effet le collectif 49701 qui se réapproprie le roman à sa manière, sous la forme d’une série de 10 épisodes de 20 minutes environ. Avec un résultat qu’on ne peut qualifier autrement que de complètement foutraque, proposé par la plate-forme CultureBox de France télévision . Et ce qui était une pièce de théâtre reprenant les codes de la série télé (avec générique, action découpée en épisodes, etc. sur trois « saisons » composant un spectacle de plus d’une dizaine d’heures au total) devient une série télé reprenant les codes du théâtre filmé, entre classicisme du texte original et modernisation déjantée.
Dans les premières minutes du premier épisode, dans la cour d’une vieille auberge où sont installées les caméras, les acteurs se répartissent les rôles. On pose le contexte des guerres de religion du XVIIème siècle, puis D’Artagnan débarque en mobylette sous les yeux d’un Rochefort coiffé d’un borsalino. Le ton est donné. Loin de l’adaptation classique et convenue, on revisite Les Trois mousquetaires de façon irrévérencieuse et malicieuse. Le tout, en reprenant donc la forme de la série télé, qui rappelle aussi la publication originelle en feuilleton, avec générique (chanté a cappella), « previously on… » et cliffhangers ultra-efficaces pour lesquels on peut remercier Dumas.
Pas de cape, pas d’épée, pas de perruques et même pas de chevaux. C’est un D’Artagnan rebelle avec son sac à dos, une Milady de Winter en blouson de cuir qui ne craint personne (en Harley Davidson), un Louis XIII lunaire qui donne des interviews en direct à la télé, une version d’époque de Apostrophe où l’on éreinte le roman de Dumas (beaucoup trop de duels), une Anne d’Autriche perchée qui fait du yoga avec sa dame de compagnie échappée de chez Almodovar, les Mousquetaires qui se castagnent avec les CRS du Cardinal, D’Artagnan qui arpente le port de Calais avec son « L’Anglais de A à Z »…
Anachronismes à la chaîne dans des châteaux et autres décors dignes de l’époque, parodies, allers-retours constants entre le XVIIème et le XXIème siècles, gags, répliques modernes qui fusent au milieu du texte original, références incessantes au roman… Forte de son format de dix fois 20 minutes voire un peu moins, la série cavale et enchaîne les péripéties du livre, les excentricités, les blagues à un rythme effréné. Certains traits d’humour sont attendus, d’autres totalement surprenants, certains gags sont grotesques et d’autres plus fins. Mais une chose est sûre, on rit aux éclats et on s’amuse beaucoup.
Au moins autant (ou presque) que les membres du collectif 49701. Interprétant parfois plusieurs rôles (par exemple Guillaume Pottier joue Athos et Buckingham, Eléonore Arnaud est à la fois Anne D’Autriche et Milady) , ils transmettent leur dynamisme, leur bonne humeur, leur espièglerie et aussi leur implication dans ce projet ambitieux et décalé, où ils font preuve d’une inventivité apparemment sans limite et d’un enthousiasme contagieux.
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Normalement à ce stade, on a perdu les puristes et intégristes de la littérature française. Et en un sens, tant mieux pour eux ! Si les anachronismes vous donnent des boutons, si vous êtes de ceux qui estiment qu’on ne peut pas toucher impunément à un classique comme celui-ci, vous risquez le malaise cardiaque. Il faut accepter de plonger dans cette version des Trois mousquetaires avec un minimum d’ouverture d’esprit et de curiosité, se laisser porter par l’imagination de cette troupe qui joue avec intelligence et insolence avec l’histoire, les personnages et le contexte, entre série et théâtre.
Si l’on se prend au jeu, on se régale avec cette série où l’on s’amuse autant du comique de situation et du décalage que des allusions et clins d’œil. Et même si l’on sait parfaitement ce qui va se passer, on a hâte de voir la suite. Car comme toute bonne série qui se respecte, cette première saison s’achève sur un cliffhanger redoutable : au terme du Bal donné par Louis XII et alors que D’Artagnan vient de sauver les royales fesses de Anne d’Autriche en lui rapportant ses célèbres ferrets, le Cardinal de Richelieu jure de se venger. Et il va donc falloir attendre la deuxième saison pour connaître la suite de l’histoire – du moins telle qu’elle est revisitée par ces joyeux énergumènes.
Si l’on est du genre à défaillir à l’idée de voir Louis XIII jouer à Puissance 4 ou Buckingham s’écrier « Fuck ! », mieux vaut passer son chemin. Pour les autres, Les trois mousquetaires version Collectif 49701 offre une relecture incongrue mais fraîche et pleine d’humour du roman de Dumas – un peu à la sauce Monty Python, avec une bonne dose d’anachronisme, d’absurde et d’esprit. Et de ce qu’on sait de la personnalité d’Alexandre Dumas, on se dit qu’il aurait certainement adoré.
Les trois mousquetaires.
10 épisodes de 20′ environ.
Disponible sur CultureBox