Squid Game, la dernière sensation sud-coréenne de Netflix, plonge ses personnages dans des jeux sadiques et rend accro son public.
C’est quoi, Squid Game ? Criblé de dettes, Gi-hun (Lee Jung-jae ) est acculé et ne sait pas comment s’en sortir. Aussi, lorsqu’un inconnu lui propose de participer à un jeu dont la récompense est une véritable fortune, il accepte sans trop savoir dans quoi il se lance. Il se retrouve bientôt sur un île, au cœur d’une compétition féroce. 456 joueurs s’affrontent dans des jeux enfantins mais, lorsqu’on perd, on est éliminé… au sens littéral du terme, par exemple avec une balle dans la tête. Quels seront les épreuves ? Qui est derrière ce jeu sadique ? Et Gi-hun ira-t-il jusqu’au bout ?
Squid Game est un des succès surprises dont Netflix a le secret : une série rapidement devenue un phénomène sur les réseaux sociaux et qui s’est hissée parmi les programmes les plus vus sur la plate-forme grâce au bouche-à-oreille. L’histoire addictive est sous-tendue par une critique sociale… mais c’est aussi, disons-le, un divertissement sadique. Le principe de cette série créée, écrite et réalisée par Hwang Dong-hyuk est simple : 456 personnes acceptent de participer à un jeu pour gagner 45 millions de wons (environ 32 millions d’euros. Oui, nous aussi, on a cherché…), mais le jeu en question s’avère mortel.
Parmi les joueurs, Gi-hun a 47 ans, il vit avec sa mère, a perdu la garde de sa fille de 10 ans et il est traqué et menacé par des créanciers. Un jour, un inconnu lui offre de l’argent pour jouer à un jeu : quand il perd, Gi-Hun prend une gifle ; s’il gagne, il remporte la mise. L’étranger lui donne ensuite une carte, l’invitant à se joindre à une compétition dont la récompense est faramineuse. Acculé et au désespoir, Gi-hun accepte. Emmené sur une île, il se retrouve au milieu des autres concurrents pour jouer à des jeux d’enfants. Ce que tous ignorent, c’est que s’ils perdent, ils sont exécutés par les gardes qui les entourent, des hommes masqués et armés, vêtus d’un uniforme tout droit sorti de La casa de papel.
Les participants sont tous endettés et exclus socialement. Squid Game comporte donc une critique violente des inégalités économiques et plus largement d’un système capitaliste où une partie de la population sans argent et sans issue lutte vainement pour s’en sortir. C’est aussi une réflexion sur le libre arbitre et sur les compromissions qu’on est prêt à accepter dans une société où tout tourne autour de l’argent, où votre valeur se mesure au montant de votre compte en banque, où tout est permis si vous pouvez payer. C’est certain, la série met en scène des débats moraux et des questionnements actuels dans lesquels le spectateur peut se projeter.
Pour autant, il serait absurde de vous vendre Squid Game comme une œuvre conceptuelle ou philosophique ; c’est d’abord un divertissement sadique et diablement efficace, souvent comparé à Alice in Borderland, Hunger Games ou Battle Royale. La série n’est donc pas recommandée aux âmes sensibles.
Certes, on découvre progressivement que le jeu cache quelque chose de plus complexe et une intrigue vaguement policière se dessine dans les premiers épisodes mais il y a surtout énormément de violence, qui peut parfois sembler gratuite. Physique et graphique, cette brutalité est toutefois encore plus dérangeante quand elle est psychologique et insidieuse – les séquences les plus impitoyables reposent sur le renoncement des personnages à leur humanité plus que sur le gore.
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L’un des attraits de Squid Game réside aussi dans les différentes épreuves, basées sur des jeux d’enfants (1-2-3 soleil, les billes, ou encore le Jeu du calamar du titre), parfois ingénieuses et toujours macabres. Certains épisodes sont moins réussis que d’autres, bien qu’ils se finissent tous sur de bons cliffhangers qui poussent le spectateur à se demander quelle direction prendra l’histoire. Le tout, avec une esthétique soignée entre couleurs pastels enfantines et tons gris selon les ambiances et quelques belles trouvailles graphiques (la poupée géante du premier épisode est aussi flippante que Annabelle).
Squid Game accorde en outre une large place au développement de ses personnages principaux, elle joue avec les émotions en se concentrant sur une poignée de protagonistes qu’elle parvient à rendre sympathiques ou antipathiques en seulement neuf épisodes. La série est aidée en cela par des acteurs excellents dans ce qu’on attend d’eux, qu’il s’agisse de personnages extrêmes appelés à remplir une fonction très claire ou d’autres plus travaillés et moins stéréotypés. On pense au gangster impitoyable, à la folle dingue, à l’homme d’affaires bien sous tout rapport, au papy attendrissant ou à la bad ass rebelle.
Il est intéressant de voir comment la série contextualise le choix des personnages qui rejoignent la compétition et ne les juge quasiment jamais même lorsque leurs décisions condamnent à mort un autre joueur. Et pour cause : Squid Game réserve ses critiques les plus dures à la poignée de riches individus cachés en coulisses pour jouir du massacre. La lutte des classes, les rôles sociaux, les inégalités économiques et les problèmes d’une société – parfois semblables et parfois différents de ceux des sociétés occidentales – sont autant de sujets d’une violence latente derrière la brutalité explicite d’un affrontement où seul survivra le plus fort. La théorie darwinienne poussée à l’extrême, au service d’une histoire cruelle et addictive.
Parfois maladroite , divertissante et perturbante, Squid Game est un jeu sadique plein de rebondissements imprévisibles, avec des personnages emblématiques et une conclusion inattendue. Choquante dans sa violence physique, elle est aussi dérangeante pour qui veut regarder derrière le jeu : il y verra une société traumatisée par les inégalités de son système, le désespoir et la violence qu’il induit. Tiens, au fait : et vous, seriez-vous prêt à risquer votre vie pour 45 millions d’euros ?
Squid Game
9 épisodes de 55′ environ.
Disponible sur Netflix.