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On débriefe pour vous… les premiers épisodes de McMafia (BBC)

S’inspirant d’un essai sur le crime organisé, McMafia s’affirme comme une série classique mais efficace, portée par un James Norton convaincant.

C’est quoi, McMafia ? Ayant grandi à Londres, Alex Godman (James Norton) est issu d’une famille de mafieux russes en exil. Banquier dirigeant son propre fond d’investissement, il entend gérer son entreprise de manière transparente et totalement légale, en restant à l’écart du business familial et de l’influence de son père (Aleksey Sererbryakov). Mais lorsque son affaire est en difficulté, son oncle Boris (David Dencik) lui propose de  le renflouer en blanchissant de l’argent. Alex refuse – jusqu’au moment une mafia rivale passe à l’action, l’obligeant à choisir entre protéger sa famille et rester dans la légalité.

En 2009, le journaliste britannique Misha Glenny publie McMafia, un essai dans lequel il analyse le crime organisé à travers ses connexions, ses implications dans les sphères politiques et financières et son influence socio-économique au niveau mondial. Cette toile d’araignée mafieuse démêlée par Glenny sert de socle à la série éponyme, produite et diffusée par la BBC, et disponible en France sur Amazon Prime Video.

Petite remarque au passage : on vous déconseille fortement d’opter pour la VF. Des pans entiers de dialogues en Russe n’ont pas été traduits en Français, rendant la moitié des épisodes incompréhensibles…

Et c’est bien dommage, car les prémisses de McMafia ne sont pas sans intérêt : Alex Godman (James Norton), fils d’une famille mafieuse russe exilée en Grande-Bretagne, travaille dans la finance et a toujours essayé de se détacher du monde de la criminalité. Il finit toutefois par être impliqué dans les affaires douteuses de la famille quand son oncle Boris, qui a commandité le meurtre d’un boss rival, est assassiné en représailles. Son père Dimitri n’étant plus que l’ombre de lui-même, Alex est forcé de prendre les rênes pour protéger sa famille et obtenir vengeance. C’est dans ce but qu’il accepte de traiter avec un homme d’affaires israélien, Semiyon Kleiman (David Strathairn), qui compte utiliser son fond d’investissement pour détruire ses concurrents.

McMafia : on ne choisit pas sa famille…

 

Intrigant, plein de potentiel, le scénario n’est toutefois pas inédit. C’est un peu l’histoire de Michael Corleone, rattrapé par le business familial auquel il tentait d’échapper, dans le cadre d’une vendetta. De ce point de vue, McMafia s’appuie sur les ressorts habituels : Alex est confronté à des ennemis redoutables, propulsé dan un univers violent auquel il est étranger et que seul l’atavisme familial lui permet d’affronter. La différence, ce sont les méthodes de contre-attaque qu’il va utiliser.

En s’adossant à l’enquête minutieuse de Glenny, la série entend explorer le volet financier du crime organisé. Elle le fait d’ailleurs avec une certaine habileté, simplifiant et exposant rapidement des concepts abscons pour le grand public : montages financiers, blanchiment d’argent, sociétés écran… Le titre singulier de la série prend son sens dès le premier épisode : Kleiman trace un parallèle entre la politique commerciale de MacDonald’s et le crime organisé, qu’il voit comme une multinationale franchisée. Et il compte utiliser les mêmes méthodes pour se débarrasser de ses rivaux. Mais ne soyons pas dupes : derrière les tractations financières, il s’agit bien de contrôler la contrebande, le trafic de drogues et d’êtres humains, depuis Bombay jusqu’en Europe via les émirats. Les opérations bancaires et les investissements au sein des économies émergentes ne sont que la face la plus sophistiquée d’une criminalité qui, par ailleurs, est toujours empreinte d’une violence brute, avec racket, corruption, passages à tabac et meurtres. Un aspect très présent dans la série, qui ne manque pas de scènes de violence et d’action.

James Norton. Son nom est Godman, Alex Godman…

 

On a beaucoup comparé McMafia à The Night Manager, mini-série tirée d’un roman de John LeCarré. Et si, à l’époque, on avait glosé sur la prestation de Tom Hiddleston en y voyant presque une audition pour le rôle de James Bond, les mêmes remarques ont été émises concernant James Norton… Le rapprochement est d’autant plus facile que les deux acteurs sont dans le même registre, l’ambiance sombre est la même, et les deux séries décrivent une criminalité moderne, orchestrée par des hommes riches et puissants qui vivent dans le luxe, passent d’un pays à l’autre et manipulent des sommes d’argent faramineuses via la haute finance en laissant leurs sbires se charger du sale boulot. Sans même parler de la ressemblance, plus anecdotique mais indéniable, entre les deux génériques…


A lire aussi : On a vu pour vous … The Night Manager (France 3)


Mais quand The Night Manager raconte l’histoire d’un homme seul (Hiddleston) qui lutte contre un système global représenté par Roper (Hugh Laurie), McMafia semble prendre le chemin inverse, c’est-à-dire suivre un homme au départ déchiré entre le Bien et le Mal, qui finit par embrasser le monde d’un crime organisé décrit de façon froide et pragmatique. Héros indiscutable de la série, Alex est donc incarné par un James Norton très convaincant, dont le jeu minimaliste contribue à créer un personnage ambigu, qu’on a du mal à cerner. Apparemment partagé entre la moralité et le sens de la loyauté, tout laisse à penser qu’il veut s’écarter des affaires de sa famille ; pourtant, il trouve rapidement ses marques lorsque les circonstances l’y contraignent, et il ne semble finalement pas si réticent que ça à s’impliquer… Impénétrable, Alex garde une aura de mystère qui jette le doute sur ses intentions et sur ses convictions intimes. Et le personnage est suffisamment intrigant pour qu’on ait envie de suivre son parcours, pour voir à quel moment – et de quel côté – il va basculer.

McMafia, c’est finalement une histoire classique de gangsters : celle du héros positif qui bascule, rattrapé par le crime organisé au nom de la loyauté familiale. Entre scènes de violence et intrigues financières, avec un héros bien interprété, la série a l’avantage de s’appuyer sur une enquête journalistique méticuleuse pour s’implanter dans un contexte crédible et actuel, qu’elle met au service de sa dramaturgie. Les débuts sont prometteurs ; si McMafia continue dans cette voie, voilà une offre que l’on ne pourra pas refuser…

McMafia (BBC 1)
Saison 1 – 8 épisodes de 55′ environ.
Disponible sur Amazon Prime video – 1 épisode par semaine.

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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