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Qui est la seule femme Première ministre de la 5ème République à ce jour ?

Le mystère reste entier quant au prochain Premier ministre d’Emmanuel Macron. Et si c’était un femme qui prenait la tête de Matignon ? Une seule l’a fait : Edith Cresson. Retour sur la seule femme ayant dirigé un gouvernement français.

Selon un sondage IFOP pour le Journal du Dimanche, 74% des Français aimerait que ce soit une femme qui succède à Jean Castex. A droite comme à gauche, à tous les âges, les Français sont unanimes : une femme Première ministre serait la bienvenue. Depuis 30 ans, uniquement des hommes se sont succédés rue de varenne. Mais de mai 1991 à avril 1992, Matignon connait une parenthèse féminine avec Edith Cresson.

Un parcours politique sous l’aile de Mitterrand

Edith Campion est née le 27 janvier 1934 à Boulogne-Billancourt, d’un père inspecteur des finances. Elle sort diplômée d’HEC en 1960 après une thèse sur la « condition féminine dans une commune rurale ». D’abord engagée à droite, elle vire à gauche en 1965, par « fidélité paternelle » comme elle l’affirme plus tard. Elle s’engage dans la campagne présidentielle de Mitterrand en 1965, puis intègre le Parti Socialiste en 1971. Elle en devient secrétaire générale en 1974.

En 1975, elle se lance en politique dans les législative de la Vienne, fief traditionnellement à droite, où elle remporte 47,4% des voix. En 1977, elle devient maire de Thuré avant de gagner la municipalité de Châtellerault en 1983.1979 : elle est élue députée européenne.

L’élection de Mitterrand en 1981 la propulse au gouvernement : d’abord en tant que ministre de l’agriculture jusqu’en 1983, puis du Commerce extérieure et du Tourisme jusqu’en 1984.

Edith Cresson et François Mitterrand

15 mai 1991 : la première Première ministre

Le 15 mai 1991, elle succède à Michel Rocard et devient Première ministre. Pourtant, elle était extrêmement réticente. Quelques années plus tôt, elle avait quitté la politique pour créer une société. De plus, Mitterrand était en deuxième partie de son deuxième mandat, une période très difficile. Tout de suite, elle est attaquée, aussi bien par les médias que par les hommes politiques.

« François Mitterrand (…) ne voulait pas terminer son mandat sans qu’une femme ait été premier ministre. (…) C’était d’une certaine façon prendre un risque compte tenu de la misogynie formidable de la classe politique française. C’était pas mettre tous les atouts de son côté.« 

Edith Cresson, France Culture, 2021

Son gouvernement est à peu de choses près un remaniement de celui de son prédécesseur. Six femmes prennent la tête de ministères, dont Martine Aubry, qui est nommée au Travail. Parmi les grands noms de son gouvernement : Jack Lang à la culture, Roland Dumas aux Affaires Etrangères et Lionel Jospin à l’Education Nationale.

C’est la première à introduire un ministre de l’environnement au gouvernement. L’écologie est un sujet auquel elle est déjà sensible. Dans son discours de politique générale en 1992, elle parle de développement durable, une première pour l’époque. Les autres points importants de son mandat sont son investissement dans l’union européenne : c’est elle qui prépare le marché unique (1991). Elle se bat également pour que la justice sociale soit au cœur des mesures de son gouvernement.

« La bourse, j’en ai rien à cirer. »

Edith Cresson

Durant son mandat, son franc-parler lui a valu plusieurs polémiques. Son année à Matignon est marquée par une forte inflation et par la montée du chômage. La Bourse chute, ce à quoi elle répond : « J’en ai rien à cirer. » En 1991, elle fait scandale en affirmant que l’homosexualité est « marginale en France« , et qu’elle ‘ »existe davantage dans la tradition anglo-saxonne ».

Matignon : l’enfer du sexisme

Edith Cresson avait déjà connu la misogynie des politique lors de ses premières expériences au gouvernement. Lors de sa nomination au ministère de l’agriculture, elle avait été violemment critiquée par les syndicats d’agriculteurs qui considéraient que mettre une femme à ce poste était un signe de désintérêt pour l’agriculture. Une pancarte dans une manifestation avait fait grand bruit : « On t’espère meilleure au lit qu’au ministère« . Quand la Charente Libre l’interroge sur ce moment en 2011, elle répond « Finalement, j’étais bien à l’Agriculture puisque j’avais affaire à des porcs.« 

« Je savais que ce ne serait pas facile mais je n’imaginais pas l’extraordinaire hargne et le système qui c’est mis en place avec des connections entre les politiques et les journalistes de façon à essayer de saboter mon travail. «  Déclare-t-elle au micro de France Culture.

Dans les médias, aucune mention de sa politique, mais des images de ses jambes, des commentaires sur sa tenue, ses bijoux.. Pour elle, c’est une attitude spécifiquement française, comme elle l’explique 30 ans après sur Europe 1.

« Ce que vous voulez faire ne les intéresse pas. Seulement ce que vous êtes ».

Edith Cresson, Europe 1, 2021

2 avril 1992 : la Première ministre démissionne

Le 2 avril 1992, Edith Cresson fait ses valises de Matignon. L’expérience n’a duré que 11 mois, alors un record de brièveté, battu depuis par les 5 mois de Bernard Cazeneuve. En effet, l’échec du PS dans les élections locales de mars 1992 ont précipité son départ. Le PS n’avait remporté que 23 départements et 3 régions. C’est Pierre Bérégovoy qui la remplace.

En 1995, Mitterrand la nomme commissaire européen en charge de la science, de la recherche et du développement. Elle est condamnée en 2006 par la Cour de justice de l’Union européenne pour corruption. Elle avait en effet fourni un emploi supposé fictif au sein de son cabinet à un ami.

Durant son mandat, elle créé les écoles de la deuxième chance, dont la première, l’E2C, ouvre à Marseille en 2001. Elle fait voter un budget européen pour que chaque pays membre puisse créer un tel prototype.

A lire aussi : Matignon : quels sont les candidats envisagés au poste de Premier ministre ?

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