Si la tentation de réformer les retraites est forte pour Emmanuel Macron, les déclarations récentes de l’exécutif viennent repousser un peu plus les ambitions du Président.
Annoncée, suspendue, remise à plus tard… La réforme des retraites ne se fera peut-être pas lors de ce quinquennat. Les conditions pour relancer le projet de loi ne sont « à ce jour toujours pas réunies », a affirmé le Premier ministre Jean Castex, ce mercredi 8 septembre à l’issue d’un séminaire gouvernemental de rentrée. Une déclaration venant diminuer un peu plus les possibilités d’une réforme d’ici la fin de ce quinquennat.
Sans arrêter de date précise, le gouvernement met cependant fin aux tergiversations en donnant deux conditions pour que cette réforme se fasse : le « processus ne pourra reprendre que lorsque la pandémie sera sous contrôle et lorsque la reprise économique sera suffisamment solide », a ajouté le Premier ministre. Une paraphrase évidente aux conditions qu’Emmanuel Macron avait déjà énoncées le 12 juillet dernier, lors d’une allocution : « je ne lancerai pas cette réforme tant que l’épidémie ne sera pas sous contrôle et la reprise bien assurée. »
Une question qui brûle
Toutefois, le Président avait été bien plus clair concernant sa volonté de réformer en ayant demandé « au gouvernement de Jean Castex de travailler avec les partenaires sociaux sur ce sujet dès la rentrée ». Une réponse claire au dilemme que le Président a lui-même posé lors de son discours : « Faut-il faire cette réforme dès ce mois de juillet, à la rentrée, ou bien plus tard ? » Le calendrier était fixé.
Résultat ? Le 2 septembre à Matignon, tous les syndicats – de la CGT au Medef – se sont mis d’accord sur une chose : hors de question de réformer les retraites d’ici la présidentielle en 2022. En bref, le débat sera dans 8 mois sinon rien. Retour à l’envoyeur. Manière d’intégrer les retraites comme un sujet de campagne.
Du côté de l’exécutif, la chanson est différente. La réforme était un pilier du programme du candidat Macron, ne pas l’exécuter serait un échec important. Après un plan de relance à coups de gros sous, le gouvernement attendrait peut-être de la part des électeurs un sentiment de reconnaissance pour que la réforme soit mieux acceptée.
Mais une chose est sûre : ce sujet est une question qui brûle depuis le début de quinquennat. Mis sur le tapis en fin d’année 2019, le projet de loi s’était confronté à de fortes mobilisations des syndicats. Et l’arrivée de la pandémie en France a contraint le gouvernement d’abandonner, un temps, ce sujet.
Capter l’électorat de droite
Avant l’été, l’entourage du chef d’Etat avait donc fait planer le sujet ici et là. Selon Les Echos du 28 juin, Alexis Kohler, le secrétaire général de l’Elysée, et une partie de l’entourage du chef de l’Etat ont plaidé pour « frapper un grand coup en repoussant l’âge de la retraite à 64 ans dans un délai très bref ». En ligne de mire : une intégration au projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022 voté à partir d’octobre. Dans Les Echos du 5 septembre, il était rapporté que le Président n’avait pas abandonné la question avec la mise en œuvre de la suppression des régimes spéciaux et le minimum de pension à 1000 euros pour toute carrière complète au smic. Une chose est sûre : le sujet est sur la table, il ne s’agit plus de le repousser. Une position confirmée par le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal dans un entretien accordé au Monde le 7 septembre : « la question des retraites n’a jamais quitté la table, il n’y a rien d’enterré. »
La question se pose donc au sein de l’exécutif qui tente d’envoyer des signaux à l’électorat de droite dont le camp arrive très divisé avec les candidatures de Xavier Bertrand et d’Eric Zemmour en plus des candidats en lice à un départage interne ou une primaire au sein des Républicains (Michel Barnier, Eric Ciotti, Philippe Juvin, Denis Payre et Valérie Pécresse). Une volonté certaine de montrer un visage réformateur et actif politiquement pendant une année où la question principale était d’ordre sanitaire.