Le « Dragon 06 », comme on l’appelle dans le milieu, est l’hélicoptère de la sécurité civile des Alpes-Maritimes. Avec un rayon d’action permettant des interventions sur les départements limitrophes, il est un outil particulièrement efficace pour les services de secours. De l’accident routier, en passant par le sauvetage en montagne et les secours en mer, cet appareil à des missions variées.
Samedi matin, il est 9heures quand le personnel arrive à la base aérienne de Cannes-Mandelieu. Pompiers, CRS, infirmiers et personnels techniques se réunissent pour « prendre leur quart »
Comme chaque matin, le mécanicien révise l’appareil. « Il est impératif de vérifier que tout est en état de marche de manière à ce qu’en cas d’intervention, nous soyons complètement opérationnel ».
Si le téléphone d’urgence ne daigne pas sonner, la vie ne s’arrête par pour autant à la base.
Pour le pilote, Marc Tripier, les tâches sont nombreuses. Pas le temps de s’ennuyer. « Il y a énormément de choses à faire à la base. Il faut prendre connaissance de l’équipe du jour, vérifier que la machine est apte à voler, prendre la météo. Enfin il y a beaucoup de tâches administratives. »
Et ces tâches là ne manquent pas : tenue des journaux de marche, mains courantes, entretien du matériel est des véhicules… « On ne s’ennuie jamais sur la base. »
Entre le festival de Cannes et le Grand Prix de Monaco, le pilote devra alors vérifier toutes les contraintes qui pourraient se poser en vol. « À la différence d’un pilote civil qui part d’un point A vers un point B, nous ne savons jamais à l’avance comment va se dérouler le vol. »
C’est à 14h30 que la sonnerie d’alerte se décidera enfin à retentir.
Immédiatement, Marc décroche le téléphone pour prendre connaissance des premiers détails de l’intervention. Une femme, âgée de 81 ans, s’est blessée à la cheville lors d’une randonnée et est victime de vomissements.
Sans perdre une minute, l’équipage se rend en salle d’opérations pour préparer le vol et localiser le lieu d’intervention.
Dans le hangar, le reste de l’équipage prépare et embarque le matériel de soins nécessaire dans l’hélicoptère tandis que le pilote et le mécanicien font les ultimes vérifications avant le vol.
L’hélicoptère sérigrafié « Sécurité Civile » s’envole alors vers Tourette sur Loup.
Une fois sur place, la décision est prise d’organiser un camp de base. Ruade, le médecin ainsi que Lois, secouriste, seront débarqués.
Il ne faudra alors qu’une dizaine de minutes pour localiser la victime grâce à son téléphone portable. Une fois au dessus d’elle, la porte latérale de l’hélicoptère s’ouvre et Jean-François monte sur le patin du treuil. 30 mètres plus bas, le secouriste prodigue les premiers soins. Très vite, elle est remontée à bord de l’appareil.
15 minutes plus tard, elle sera entre les mains de Ruade pour un premier diagnostic.
Son état étant satisfaisant, l’ambulance des airs s’envole vers l’aéroport de Nice où elle est attendue par les pompiers.
Pour Ruade, « ces interventions représentent la moitié des missions : des traumatismes bénins mais dans des endroits inaccessibles à pied ».
Si aucune alerte ne sera déclenchée pour le reste de l’après-midi, l’équipe ne chômera pas pour autant. Machine à réviser, tâches administratives, entretien du matériel et entrainement sportif, on ne s’ennuie pas sur la base du Dragon 06.
Le lendemain matin, la première équipe arrive à 7h30. Sa tâche de la journée : assurer la sécurité du Grand Prix de Formule 1 de Monaco. Une mission important puisque sans la présence de cet équipage, la course ne pourrait pas être lancée.
De facto, une machine supplémentaire a été envoyée en renfort depuis le groupement hélicoptère de Nîmes pour assurer la mission du jour.
Ainsi, après un rapide briefing, le médecin Christian Riello accompagné d’un infirmier prépare le matériel nécessaire pour faire face à tout type d’interventions. « Nous devons être prêts à transporter un pilote dont la blessure dépasse les compétences techniques de Monaco ! » explique le Lieutenant-Colonel Riello.
Une fois les vérifications d’usages faites, l’équipage s’envole vers Monaco. Direction la « Drop-Zone » des Caribiniers du Prince.
Depuis cet endroit, l’équipe restera en liaison permanente par radio avec les services de sécurité du grand prix, prêts à intervenirs à tout moment.
Pour Christophe Burgalieres, ancien pilote d’hélicoptère de l’armée et à la sécurité civile depuis 10 ans, « la principale mission sera de treuiller du personnel ou des victimes pour les récupérer le plus vite possible ! »
« Si un pilote a un accident trop grave, notre machine permettra de l’évacuer vers un hopital. Mais la mission restera quoi qu’il en soit délicate, il y a énormément d’immeubles et le souffle de notre hélicoptère peut faire du dégat. »
Dans le même temps, à la base de Cannes, l’équipe du Dragon 06 se prépare.
Il est 9H40 lorsque le CODIS ( NDLR : Centre Opérationnel Départemental d’Incendie et de Secours ) prévient de la première mission : un participant de la course cycliste « Transvésubienne » s’est luxé l’épaule lors d’une chute, non loin de la commune d’Utelle.
Immédiatement, Jean-François et Thomas, pompiers-secouristes ainsi que Ruade le médecin, embarquent dans l’hélico et savent à quoi s’attendre : « l’endroit est très pentu, hors de question que l’on se pose, il faudra forcément faire un hélitreuillage ».
25 minutes plus tard, ils sont sur place. Mais la radio de Marc, le pilote, s’allume. Un autre participant de cette course vient de chuter et souffre d’un traumatisme cranien. Jean-François ayant stabilisé la première victime, Marc décide de partir en priorité sur le bléssé le plus grave avec le médecin.
Depuis son cockpit, Marc remarque que la quantité de carburant est en train de baisser. La décision est prise, l’hélicoptère rentre à la base pour faire le plein tandis que l’équipe de secours s’affaire à soigner et préparer le bléssé.
La mission est compliquée, la victime, âgée de 26 ans est assez agitée et stréssée. Très vite, Ruade lui administre les premiers soins pour le stabiliser et faire baisser son stress.
Plus encore, l’endroit est pentu ce qui rend le secours encore plus compliqué.
Jean-François et Thomas vont alors insérer la victime dans un brancard et le transporteront jusque dans une clairière pour que le treuillage soit plus facile.
Lorsque Marc revient, la victime est calmée et préparée au transport vers l’aéroport de Nice où l’attend une ambulance du SAMU.
Une fois le cycliste à bord, le pilote fait un crochet par la commune d’Utelle pour récupérer dans le même temps la première victime pour pouvoir l’emmener elle aussi vers Nice.
La première mission de la journée du Dragon 06 est une réussite.
A peine rentrés, le téléphone d’urgence sonne à nouveau. Un randonneur à fait une chute en montagne, à une altitude de 1800mètres. La décision est prise : ce sont les brigadiers Christophe et Cyril, CRS sauveteurs en montagne, qui vont partir avec Ruade, le médecin.
Comme à chaque fois sur ce type d’intervention, un camp de base est établi. Ruade et Christophe descendent de la machine avec le maximum de matériel pour l’alléger tandis que Cyril part à la rencontre de la victime pour établir un premier bilan.
Le secouriste sait qu’il doit faire vite, le ciel est en train de se couvrir. Un changement de temps peut alors devenir un réel problème à cette altitude. Immédiatement, Cyril immobilise la jambe de la victime et prépare son rapatriement au camp de base pour l’examen par le médecin.
Une fois l’examen effectué, l’équipe ramène cette victime vers l’aéroport de Nice où elle est attendue par les pompiers.
C’est sur le chemin du retour que Marc recoit un nouvel appel radio pour une intervention : un homme est bloqué sur une viaferrata, pendu sur sa corde, à 30 mètres de hauteur. L’hélicoptère détourne sa route et fonce vers cette nouvelle victime.
Cette fois-ci, c’est Christophe qui part à la rencontre de la victime. Une fois localisée, le CRS comprend qu’il va être impossible d’être déposé au contact immédiat de la victime. Il décide d’être largué au bas du parcours et rejoins par ses propres moyens la personne. Arrivé à son niveau, Christian assure et sécurise le randonneur et le fait descendre jusqu’au sol. Une fois en bas de la viaferrata, il est hélitreuillé et Marc le déposera au village le plus proche.
« Les gens culpabilisent souvent de nous faire intervenir, ils sont génés, alors que l’on est content d’intervenirs, c’est le sens propre du service public » explique le secouriste.
De retour à la base, pas le temps de se reposer trop longtemps. La sonnerie retentit moins d’une heure après pour une nouvelle intervention : Un promeneur vient de se fracturer la cheville en altitude.
Une fois sur la route, Marc recoit encore un nouvel appel radio et se détourne vers un secours plus urgent : Un canyoneur vient de se fracturer la cheville dans le canyon d’Efernet. Christophe s’équipe alors de sa combinaison et se prépare à descendre. « L’accès n’était pas très aisé, le canyon était pentu et très encaissé ! Mais heureusement, Le groupe a fait un travail remarquable sur place, une corde avait été mise en place pour accéder plus facilement à la victime et une étudiante en médecine avait déjà commencé à prendre en charge le bléssé » explique-il.
Le CRS prépare alors le jeune canyoneur au transport avec le reste du groupe tout en s’assurant de ne pas créer un suraccident. « Je me suis moi-même bléssé à la main lors d’un secours il y a un an ! »
La victime est rapidement hélitreuillée vers le camp de base où le médecin l’examine et un VSAV ( NDLR : Véhicule de Secours et d’Assistance aux Victimes ) est apporté pour l’emmener vers l’hopital tandis que le Dragon 06 fait maintenant route vers la promeneuse bloquée par sa blessure.
Essayant de gagner du temps, l’accompagnateur guide l’hélicoptère vers eux.
Cyril descend alors de l’hélicoptère et prépare la victime. Mais l’équipage étant parti sur un premier secours, le secouriste sait que le carburant est en train de baisser. Il faut alors réussir à travailler rapidement sans pour autant bâcler le secours.
Rapidement, la victime est extraite vers le camp de base où le médecin la stabilise et réduit la fracture.
Marc ramènera alors la victime et son équipage vers l’hopital de Cannes.
Il est alors 18 heures et l’équipe pourra enfin trouver le temps de se reposer. Avec plus de 600 interventions par an, entre secours, feu de forêt, évacuations sanitaires, missions de surveillance ou de transports, la sécurité civile a su prouver l’utilité de son appareil au service de l’ordre public.