Le Tour de France des tribunaux se poursuit à Bordeaux. Mercredi 4 août, nouvelle affaire de violences conjugales pour la 7ème chambre du tribunal judiciaire.
« Je vais te tuer »
Maria A. et Victor P. sont mariés depuis plus de 15 ans. Originaires du Portugal, ils se sont installés en France près de Bordeaux dans la commune d’Ambes. Lui est camionneur, elle est sans emploi. Ensemble ils vivent dans une maison qu’ils ont acheté. Le crédit est au nom de monsieur mais les deux patronymes figurent sur l’acte notarié. Leur situation est stable, quelques disputes parfois « comme tous les couples après tout » pour l’avocate de l’accusé. L’idylle bascule il y a deux ans lorsque Victor P. se fait opérer. « Il a complètement changé depuis son opération. Il boit beaucoup plus maintenant et il violent » rapporte Maria A.présente à l’audience.
Maria A. est une femme cinquantenaire, sans enfant. Il y’a quelques années, elle était heureuse de vivre avec son compagnon ici en France. Aujourd’hui, elle dit avoir peur de mourir sous les coups de son mari. C’est la raison pour laquelle ce dernier comparaît dans le box des accusés. Ce qu’elle lui reproche ? Des violences habituelles qui s’étendent du 1er juin 2019 au 1er aout 2021, des menaces de mort orales et une menace de mort matérialisée en date du 1er aout 2021. Ce soir là, Victor P. pris de rage la menace avec un grand couteau de cuisine après une énième dispute. Maria A. prend la fuite et se réfugie dans sa voiture, appelle les gendarmes mais prise de panique elle est incapable de raconter ce qu’il vient de se passer. Elle rapportera plus tard que son mari lui aurait dit, couteau en main « Je vais tuer, il faut que je te tue ».
« Je ne suis pas responsable »
Ces menaces et ces violences ne sont pas les premières. Des amis du couple constatent depuis plusieurs mois que la relation se dégrade au sein du domicile. Maria A. se confie à son amie des coups et des violences psychologiques subis au quotidien. Elle lui raconte qu’un jour son mari lui a envoyé un vase à la figure et qu’elle est victime de propos dévalorisants en permanence. Lors d’un dîner, son amie est alors témoin des violences que Maria A. lui rapporte. Après avoir bu, Victor P. s’en prend verbalement à elle « t’es qu’une pute, une salope ». Son amie, inquiète, en parle quelques jours plus tard au garde champêtre qui avertit aussitôt les gendarmes. Alors quand Maria A. lui parle du couteau et des menaces de mort, les gendarmes passent à l’action et interpellent l’homme pour le placer en garde à vue.
« Si j’avais voulu la tuer, je serais aller dans les bois »
Victor P.
En détention provisoire, le prévenu nie les faits catégoriquement. « Je n’ai jamais levé la main sur ma femme, on se dispute oui mais je ne l’ai jamais menacé avec un couteau ». Pendant ce temps là, Maria A. consulte un légiste qui estime à 5 jours d’invalidité de travail les conséquences psychologiques des faits passés. À l’audience, le détenu est bavard mais ne semble pas convaincre le Tribunal. « Si j’avais voulu la tuer, je serais aller dans les bois » et ajoute « Moi aussi elle m’agresse avec les mots, je veux divorcer. ». La juge évoque alors la question de l’alcool. Monsieur en serait un consommateur régulier. Pour la victime, son mari boit tous les jours de grandes quantités ce qui le rend violent et impulsif. À cela l’accusé réplique « C’est faux. Je bois de temps en temps. Je suis camionneur, je ne peux pas boire et conduire, c’est pas possible. »
Un drôle de gentleman
Tout au long des réquisitions du Procureur, Maria A. assise dans la salle d’audience pleure et s’essuie les joues avec un mouchoir. Contre son mari le ministère Public requiert 4 mois de prison ferme sans aménagement et 4 mois de sursis. Mais également l’interdiction d’entrer en contact avec sa femme et de soigner son addiction à l’alcool. L’avocate du prévenu dans sa plaidoirie demande à ce que le dossier soit bien examiné par le Tribunal car celui-ci « est totalement vide, c’est parole contre parole ». Le conseil de Victor P. estime qu’il n’y a aucune preuve de violences, ni d’harcèlements. Selon elle, il serait même un « gentleman » qui accompagne sa femme au bus en lui assurant sa sécurité.
Après une brève délibération d’une quinzaine de minutes, le Tribunal déclare coupable Victor P. et le condamne à 6 mois ferme avec mandat de dépôt et 6 mois de sursis. Il doit également effectuer un stage pour lutter contre les violences conjugales, soigner son addiction et ne plus retourner à son domicile.