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Un été au tribunal : 8 mois ferme pour avoir frappé sa compagne en récidive

À la barre du tribunal de Paris les audiences s’enchainent alors que la France est en vacances. Au programme du mercredi 28 juillet : trafic de stup, violences conjugales, vol sans violence. 

13h30 : Le public s’installe dans la salle d’audience de la 23ème chambre du Tribunal correctionnel de Paris. Pendant ce temps, l’huissier met en ordre les dossiers de l’après-midi. Le programme s’annonce chargé, si bien que son bureau n’est pas suffisamment large pour accueillir toutes les procédures. Certaines d’entre elles ne sont pas complètes, les transactions entre avocats, greffe, procureur s’éternisent. Tous espèrent avoir tous les éléments à temps afin de pouvoir instruire convenablement les prévenus. Le Président du Tribunal s’impatiente. Cela fait déjà 45 minutes et encore aucun détenu n’a été jugé. Il faut presser le pas. 

Crack, crack, crack

Toutes les personnes présentent dans le box des accusés aujourd’hui sont des hommes. Le plus jeune a 21 ans, le plus âgé proche de la cinquantaine. Tous comparaissent dans le cadre de la procédure accélérée de la comparution immédiate sauf deux venus demandés une « DML ». « DML » est l’acronyme de « demande de mise en liberté ». Les détenus peuvent en faire la demande autant de fois qu’ils le souhaitent lorsqu’ils sont incarcérés et en attente de leur procès. Pour l’obtenir, ils doivent fournir des garanties de représentation. Le Tribunal doit s’assurer qu’il ou elle se présente bien le jour de son jugement. 

Toutes les histoires du jour sont extrêmement différentes par la nature des faits, par les profils des présumés innocents. Toutefois, un point est commun à de nombreux dossiers : le crack. Le crack fait partie des drogues « dures ». Ce stupéfiant est un dérivé de la cocaïne. À celle-ci on y ajoute du bicarbonate de soude, de l’ammoniac pour obtenir un petit cailloux, le crack. Une fois obtenu, le consommateur inhale les vapeurs de cette composition chimique artisanale par les moyens d’une pipe. Les effets sont immédiats, puissants et procurent un plaisir innommable qui ne dure que quelques instants. À peine les effets passés, une phase de « descente » violente s’empare du « crackeur » et le conduit dans un état dépressif et anxieux. La seule solution pour combattre ce malaise, en reprendre toujours plus. Cercle vicieux. 

0,16 gramme – 8 mois de prison

Au Tribunal, en ce mercredi 28 juillet, 75% des comparussions ont un lien plus ou moins direct avec le trafic de cette drogue. Le plus souvent il s’agit de jeunes désoeuvrés en marge de la société économiquement, socialement qui vendent et consomment. Le procureur de la République accuse Abdou* de transport, détention, vente et achat de crack en récidive. Ce jeune Sénégalais de 21 ans se déclare non coupable des faits reprochés mais il encoure une peine de 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende. Malgré les efforts de son avocate pour faire annuler la procédure pour vices, le Tribunal le condamne à 8 mois de prison ferme avec mandat de dépôt immédiat. Une peine plus lourde de 2 mois requise par la Procureur. Abdou a été arrêté avec 0,16 gramme de crack sur lui. 

La « relation toxique » mène aux barreaux  

Le Tribunal s’est montré Intraitable avec le trafic de crack dans la capitale, il l’est aussi au sujet des violences conjugales. Quatre heures après le début de l’audience, un nouveau procès s’ouvre dans la magnifique salle Victor Hugo du Tribunal de Paris au deuxième étage. Un homme de 31 ans ordinaire des Antilles pénètre dans le box des accusés entouré par l’escorte. Après avoir confirmé son identité, le Président du Tribunal fait lecture des faits reprochés. Stéphane. L* a levé la main sur sa concubine en rentrant de soirée le 26 juillet dernier à 5 heures du matin. « Un voisin alerté par les cris d’une femme a appelé la police ». Ivre, jaloux, il s’en est pris à Noémie C*. en lui assenant plusieurs claques. Les forces de l’ordre à leur arrivée constatent les violences et embarquent Stéphane L. Au poste, il dort en cellule de dégrisement, pour 1,69 gramme. Naomie C. dépose plainte le lendemain. Le médecin légal ordonne 3 jours d’invalidité de temps de travail (ITT) au titre des blessures physiques et 15 jours au titre des blessures psychologiques. 

« On s’est chamaillé »

Stéphane L.

Chamailleries et agressions sexuelles

« On s’est chamaillé » plaide l’accusé. « La relation est toxique entre nous » répète-t-il inlassablement. Le Président le coupe « Monsieur, ici nous ne sommes pas chez Cyril Hanouna. Pas la peine de beugler la même chose en boucle. Lorsque vous dîtes les choses une fois on les entend, ici on est des professionnels ». L’homme reprend et plaide « Je ne suis pas un homme violent ». A ces mots, du public venu assister aux comparussions du jour s’entend un bruit de gêne. Le Président l’interroge à nouveau « Qu’est ce qu’un homme violent alors selon vous ? » – « C’est une personne qui frappe tous les jours » lui répond-il. Stéphane L. n’est pourtant pas à son coup d’essai. Naomie C. avait déjà déposé une main courante à son encontre. Dans sa précédente déposition, elle dit avoir été agressée sexuellement quelques mois au paravant par Stéphane L. 

Après les faits, le Tribunal passe au crible le passé judiciaire de celui qu’ils vont juger. À 31 ans, l’homme est déjà bien connu de l’institution. Il a été successivement condamné pour des vols aggravés, trafic de stupéfiants, homicide involontaire, détention de stupéfiants, conduite sans permis et violences conjugales. A son encontre, la Procureur requiert 8 mois de prison ferme avec mandat de dépôt pour cet « homme qui n’a fait preuve d’aucune prise de conscience ». Son avocat commis d’office demande quant à elle une peine avec aménagement, son client vient de retrouver un travail. La séance est levée. 

Coupable !

À son retour, le Tribunal condamne Stéphane L. pour les faits du 26 juillet 2021 à 8 mois de prison ferme avec mandat de dépôt. « Monsieur, nous vous condamnons car vous ne vous êtes pas saisis des chances, il faut casser le cercle vicieux de la violence que vous ne savez pas gérer ». En larmes, le désigné coupable quitte sous bonne escorte l’audience, direction la cellule de son établissement pénitentiaire.

*Prénoms modifiés pour préserver l’anonymat

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