Nina poursuit son chemin et revient sur France 2 le 18 octobre pour une troisième saison. Effet placebo ou vraie remède à la morosité ?
Souvenez-vous en 2007. Avec L’Hôpital TF1 tentait de faire son Grey’s Anatomy et se plantait dans les grandes largeurs. Rebelote en 2014 avec Interventions, où Anthony Delon ne sauvait pas une nouvelle tentative d’incursion dans le milieu médical. Aussi quand France 2 s’est lancée à son tour dans la valse des blouses blanches en 2015, on ne donnait pas cher de la peau de Nina. On avait tort. En deux saisons de 8 et 10 épisodes, Nina a semble t’il trouvé sa voie et sa respiration, se créant un public de fidèles et séduisant les amateurs de séries fraiches et enlevées qui ne cherchent pas à être dans l’esbroufe à tout prix.
Si la série ne détient pas la palme de l’originalité elle ne s’en prévaut pas non plus et assume sa légèreté et sa propension à avoir du cœur, irriguée par une humanité qui transparait au fil de ses épisodes. Si Nina tire également son épingle du jeu, c’est bien grâce à ses personnages extrêmement bien caractérisés, à des dialogues souvent réjouissants et à une distribution homogène où personne, pas même l’héroïne qui donne son prénom à la série, ne semble essayer de tirer la couverture à elle, ce qui permet au récit choral d’exister pleinement pour ce qu’il est.
Mais c’est quoi déjà… Nina ? Suite à la fusion avec l’hôpital Nord, le service de médecine interne de Madeleine-Brès voit arriver à sa tête un nouveau chef de service : Caroline Bergman, 50 ans, ambitieuse, avec des envies de gestion à l’américaine… Dans le collimateur de la nouvelle chef : Nina, qui travaille à temps partiel pour l’hôpital depuis qu’elle a repris ses études de médecine. Pas encore médecin, mais plus qu’infirmière, Nina se retrouve plus que jamais plongée au cœur de son paradoxe ! Pas facile pour notre héroïne qui doit, de plus, gérer le retour de Costa dans sa vie et… dans sa maison, après six mois passés au bout du monde à faire de la médecine humanitaire, ainsi qu’un amour naissant qui pourrait bien occuper une place prépondérante dans sa vie…
La fin de la saison 2 nous avait laissé sur un suspense dramatique et dans l’expectative quant au sort de Costa (Thomas Jouannet). Si la saison 3 ne répond pas à cette interrogation dès les premières secondes (on regrettera malgré tout que la résolution soit évacuée en une ligne de dialogue), l’impulsion des enjeux dramatiques vient d’une nouvelle donne induite par la fusion du service avec l’hôpital Nord et l’arrivée d’un nouveau chef de service.
Interprétée par Socha (l’actrice était aussi crédité dans le passé sous le nom de Sophie-Charlotte Husson NDLR) ce nouveau personnage va venir mettre le désordre dans le service avec des intentions qui peuvent sembler louables mais une personnalité suffisamment trouble pour qu’on se pose des questions sur ses réelles motivations. La comédienne que l’on aime beaucoup apporte par sa présence une tonalité que Nina n’avait pas encore et qui est une nouvelle corde à son arc même si on aurait aussi aimé un peu plus encore d’aspérités et de complexité dans l’écriture du personnage.
Nouveau également cette saison, l’humoriste Ben qui officie notamment avec Arnaud Tsamère sur le canapé rouge de Michel Drucker arrive dans le rôle de Julien, un infirmier peu sympathique de prime abord mais dont la carapace va s’ouvrir peu à peu. Assez inattendu dans le rôle le comédien est assez bon et suffisamment crédible pour que l’on apprécie sa présence et son personnage de love interest s’avère convaincant.
La série attire à nouveau de nombreuses vedettes invitées (Nicole Croisille, Guillaume Cramoisan, Philippe Lavil, Christian Rauth, Vanessa Demouy, Stéphane Freiss…) et trois d’entre eux, dans des registres dans lesquels on n’a pas l’habitude de les voir sont réellement étonnants et surprenants de sobriété ou d’intensité dramatique: François Bureloup et Vincent Primault de Chérif et Sara Mortensen (Contact).
Hormis ces nouveaux visages la distribution principale ne bouge quasiment pas et c’est tant mieux car les comédiens maîtrisent de plus en plus leurs partitions. Annelise Hesme, Thomas Jouannet, Nina Mélo, Grégoire Bonnet, Muriel Combeau (arrivée en saison 2), Stéphane Fourreau, Farid Elouardi, Alix Benezech, Clément Moreau, Marie-Christine Adam, Jean-François Garreaud, Ambroise Michel ou encore Ilona Bachelier (qui remplace dans le rôle de Lily, Léa Lopez partie sur Clem…) restent le cœur et les poumons de la série même si inévitablement dans le lot certains parviennent à se singulariser encore plus de par ce qu’on leur donne à jouer.
C’est le cas notamment de Grégoire Bonnet (le docteur Proust) qui depuis le début de la série est une Rolls Royce qui carbure aux répliques hilarantes. Durant cette saison 3, il est malmené de plusieurs façons mais le comédien reste remarquable de fantaisie et de drôlerie mêlées et certains de ses dialogues aux petits oignons sont réellement mordants. Son face à face avec Bergman le nouveau chef de service nous fera même nous demander s’il n’a pas trouvé plus fort que lui. Il n’est pas le seul à bénéficier de répliques cinglantes qui font mouche mais il a pour lui que ce soit quasiment à chaque coup.
Annelise Hesme continue de donner à Nina toute sa dimension. Belle héroïne moderne, Nina a trouvé l’interprète idéale pour lui prêter ses traits, capable en quelques expressions de sourires foudroyants puis de faire passer l’instant d’après une émotion qui vous transperce. Mère, femme ou maîtresse, elle semble à l’aise dans tous les registres et la série vibre aussi par le charme et le glamour dont elle est la parfaite incarnation.
Au niveau des intrigues, Nina ne révolutionne rien mais continue de s’inscrire dans le genre du soap dont elle embrasse tous les codes avec facilité (ce dont la série s’amuse au détour d’une réplique de Proust notamment), les auteurs ne se privant pas d’intrigues très efficaces dotée de certaines figures imposées (trauma, enfant cachée, personnages en danger, soirée de gala, histoires d’amour contrariées…).
La série de Alain Robillard et Thalia Rebinsky qui voit également passer de nombreux auteurs pour tisser ses récits, sait maintenir ses spectateurs en haleine comme le confirme le cliffhanger sibyllin de fin de saison. La série sait émouvoir avec justesse sur des cas graves sans trop appuyer sur le pathos dans lequel elle risque souvent de tomber (les séquences musicales sirupeuses surlignant parfois des effets qui fonctionneraient parfaitement sans) et évoque des cas médicaux difficiles traités avec sensibilité et humanité.
Cette saison 3 de Nina continue de s’inscrire dans l’ADN de la série et de bien le faire. On sait ce qu’on va y trouver, il n’y a pas de réelles surprises, mais quand on aime ce genre de série, ça fait l’effet d’un bonbon à la menthe. Rafraichissante et pleine de peps Nina est une série qui a le cœur chevillée à l’âme.