Le gouvernement écossais a annoncé vouloir organiser un référendum « consultatif » sur l’indépendance. Il doit toutefois obtenir l’accord du gouvernement britannique. Retour sur une question qui existe depuis la naissance même du Royaume-Uni.
« Je peux annoncer que le gouvernement écossais propose que le référendum sur l’indépendance se tienne le 19 octobre 2023. » a déclaré la Première ministre écossaise Nicola Sturgeon au parlement local. Londres doit cependant donner son accord. Or, Boris Johnson y est fortement opposé pour le moment. Un (nouveau) bras de fer devrait donc avoir lieu entre Londres et l’Ecosse, un nouvel épisode d’une histoire ancienne.
Une union solide pendant 200 ans
Selon l’historien Iain McLean pour Les Echos, l’Union du Royaume-Uni a « bien fonctionné pendant environ deux cents ans » depuis l’acte d’Union en 1707. A cette date, l’Ecosse et l’Angleterre, précédemment indépendants, s’unissent au sein du Royaume-Uni de Grande Bretagne. L’Ecosse peut alors protéger son système éducatif et sa religion en raison d’une menace claire : la possibilité de rétablir la monarchie des Stuart qui aurait été soutenue par la France, ennemie de l’Angleterre.
Les années 1960 et le développement du nationalisme écossais
Mais au moment de la fin de l’Empire britannique dans les années 1960 naissent des mouvements nationalistes écossais. Le sentiment d’appartenance à la nation britannique se fragilise en effet progressivement. Durant cette décennie sont également découverts des gisements pétroliers en mer du Nord. Le contexte de l’époque fait que cet or noir est vite revendiqué comme une richesse écossaise. Les indépendantistes soutiennent dès lors que cette richesse aurait pu financer l’indépendance de l’Ecosse.
Le fossé créé par la désindustrialisation
Par la suite, le fossé entre l’Angleterre et l’Ecosse continue de se creuser au moment de la désindustrialisation et de l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher en 1979. Alors que le déficit de l’économie britannique est de plus d’1 milliard de livres, les licenciements se multiplient dans les industries lourdes. Les Ecossais sont alors fortement impactés et se sentent sacrifiés par Londres. En effet, entre 1979 et 1981, les industries écossaises perdent 11% de leur production et 20% de leurs emplois. L’opinion publique écossaise est donc profondément opposée à la politique de Margaret Thatcher et cela nourrit à désir d’autonomie des Ecossais.
Les référendums
Dès 1979 avait eu lieu un premier référendum mais celui-ci avait été ignoré par Londres. Ce désir d’indépendance écossais est cependant concrétisé sous la gouvernement Blair en 1999 avec la création du Parlement écossais. Il avait été décidé au moment du référendum de 1997. La question de la création de cette nouvelle institution est alors approuvée à 75%. La seconde, qui propose la création d’un pouvoir fiscal variable, est approuvée à 63%. Les Ecossais disposent dès lors d’une autonomie dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la justice et des transports.
Par la suite, le Parti national écossais (SNP) gagne en puissance. En 2007, il arrive en tête des élections pour former le premier gouvernement indépendantiste de l’histoire de l’Ecosse contemporaine. Le parti se renforce également aux élections de 2011 et en 2012, il obtient de Londres le droit d’organiser un référendum. A la question « L’Ecosse doit-elle devenir un pays indépendant ? », c’est toutefois le « non » qui l’emporte avec 55,4% des voix. Or, David Cameron comme Boris Johnson ont affirmé que ce vote ne peut se tenir qu’une fois par génération.
Le Brexit et le retour de la volonté d’indépendance de l’Ecosse
La question semble alors tranchée. Mais « le Brexit a changé la donne vis-à-vis de l’indépendance » comme l’expliquait la Première ministre écossaise Nicola Sturgeon dans une tribune publiée par Politico. En 2020, elle déclarait également que « Le Brexit arrive contre la volonté du peuple d’Ecosse et aucun accord ne pourra jamais compenser ce que le Brexit nous enlève. » Ces pertes sont notamment économiques, plus précisément dans le secteur de la pêche. A cela s’ajoute l’accentuation de la concentration des pouvoirs du côté de Londres. Ainsi, lors du référendum de 2016 sur le Brexit, les Ecossais ont voté à 68% pour rester dans l’Union européenne. Le fossé s’est alors renforcé entre les conservateurs anglais et les indépendantistes de centre-gauche du SNP.
Le Brexit arrive contre la volonté du peuple d’Ecosse et aucun accord ne pourra jamais compenser ce que le Brexit nous enlève.
Nicola Sturgeon en 2020
Le contexte du Brexit joue maintenant pour beaucoup dans la volonté de Nicola Sturgeon d’organiser un nouveau référendum pour 2023. Face au Premier ministre britannique, la cheffe du SNP a ainsi déclaré qu’elle ne permettrait pas que « la démocratie écossaise soit prisonnière de Boris Johnson ou de n’importe quel Premier ministre ». Selon elle, « Quelle que soit la façon, le peuple écossais aura son mot à dire ».