Pendant la Seconde Guerre mondiale, le massif du Vercors, a été le théâtre d’un des épisodes les plus dramatiques et héroïques de la lutte contre l’occupation nazie. À l’issue de son marathon mémoriel, Emmanuel Macron, président de la République, s’est rendu à Vassieux-en-Vercors mardi 16 avril pour rendre hommage à la Résistance.
L’été 1944 est un cauchemar pour le massif du Vercors. En pleine Seconde Guerre mondiale, cette célèbre forteresse naturelle a été le point d’orgue de la violence envers la Résistance française. Plus de 800 personnes ont été tuées. Si les maquisards étaient la cible des forces allemandes, la population de la région a été un témoin clé de ces atrocités. Ruines, cadavres et barbaries restent dans la mémoire collective française.
Un appel à la mobilisation
À la veille du débarquement de Normandie, le 5 juin 1944, Londres diffuse à la BBC des messages énigmatiques. 210 messages sont envoyés à tous les résistants de France, leur ordonnant de réaliser des sabotages pour combattre l’occupant.
C’est le général américain Eisenhower, commandant des forces alliées, qui a déclenché cette mobilisation. Son but était que la France entière soit en mouvement afin de semer la confusion chez l’ennemi pour l’attirer loin de la Normandie. Anglais, Américains et Canadiens, ce sont 156 000 soldats qui débarquent sur les côtes normandes le 6 juin 1944. Dès lors, la libération de la France commence.
Le Vercors, un choix stratégique
À 800 km des plages normandes, le Vercors est l’un des nombreux maquis à répondre à la mobilisation du général. Depuis fin 1942, la région attire la Résistance pour se réfugier et établir une forteresse.
Avec ses falaises abruptes et ses vastes forêts, le plateau du Vercors est une véritable citadelle naturelle qui offre un terrain idéal pour une guérilla contre les forces allemandes. En quelques jours, les effectifs passent de 400 volontaires à 4 000. Ouvriers, artisans et étudiants abandonnent leurs foyers et se regroupent dans l’espoir de préparer des opérations de libération et combattre l’ennemi.
Une illusion de liberté en plein massif du Vercors
La région du Vercors donne à ceux qui y sont montés une impression de liberté et de sécurité. Si les maquisards contrôlent le massif, ils vont même, en juin 1944, y restaurer la République française. Face au régime de Vichy, ce gouvernement provisoire, sous l’autorité du général de Gaulle, met en place ses propres institutions. Défiant l’occupant, ce geste audacieux devient symbole d’autonomie et de résistance.
Au quartier général, les chefs militaires du maquis du Vercors restent eux aussi optimistes. La raison, c’est le “plan montagnard”, accepté dès février 1943 par l’entourage de Charles de Gaulle. Ce dernier prévoit le parachutage de renforts alliés sur le massif afin de prendre en revers les Allemands lors du débarquement en Provence.
Eugène Chavant, chef civil des maquis du Vercors, défend ce projet et se rend à Alger, capitale de la France libre, pour s’assurer de son bon déroulement. Avec la promesse de l’envoi de 4 000 parachutistes dans la région, la bonne humeur ne peut que régner sur l’ensemble du Vercors.
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La citadelle du Vercors au coeur d’un piège
L’appel à l’insurrection du général Eisenhower, va coûter cher à la France. Même si les alliés se trouvent en Normandie, plus d’un million de soldats allemands occupent encore le pays. Du Nord au Sud du pays, une répression terrible s’abat sur les résistants. Arrestations, tortures et exécutions sont le quotidien des Français.
Face à cette horreur, Londres réagit. Si Marie-Pierre Koenig, commandant d’une brigade française libre, avait laissé le général américain mobiliser tous les maquisards, le 10 juin, il changea d’avis. Afin d’éviter de nouveaux massacres, il demande aux résistants d’éviter les grands rassemblements et d’évacuer les zones de repli.
Dans leur forteresse du Vercors, les résistants ne souhaitent pas renoncer au combat. Le 25 juin, la région reçoit un premier parachutage d’armes. Or, seules des mitraillettes légères s’y trouvaient et aucune arme nécessaire à la guérilla. Inquiets, les chefs du Vercors contactent en vain Alger. L’absence de réponses est considérée par beaucoup comme une trahison et un piège.
L’aide promise aux maquisards se fait attendre et les Allemands préparent une grande offensive pour combattre ceux qu’ils appellent “les terroristes”.
Une répression allemande sans nom
Abandonnés par Alger et livrés à eux-mêmes, le Vercors continue de défier l’occupation. Le 14 juillet, des parades militaires sont organisées sur le plateau. Les maquisards déploient un énorme drapeau français, visible depuis la vallée où les Allemands s’étaient regroupés après avoir repéré la première opération de parachutage.
Le 21 juillet 1944, les avions de l’armée allemande arrivent au centre du massif. Utilisant des troupes d’élite, ils attaquent simultanément, surprenant les maquisards. Tandis que les commandos pénètrent au cœur de la citadelle, les troupes allemandes, elles, encerclent la région.
Un dernier message d’appel à l’aide est envoyé à Alger.
“Si vous ne faites rien pour nous aider, vous serez considérés comme des criminels et des lâches. Je dis bien des criminels et des lâches. »
Eugène Chavant
En Algérie, ça fait l’effet d’une bombe. Le général de Gaulle s’engage à envoyer une unité mais l’aide arrivera trop tard.
Le 23 juillet 1944, les maquis ne peuvent plus tenir. Les chefs encouragent la dispersion. Mais le Vercors est bouclé par les Allemands. Épuisés et affamés, les maquisards se terrent dans les bois et dans les grottes. Ceux qui tentent de s’échapper sont exécutés.
La répression qui suit est brutale. Des villages entiers comme Vassieux-en-Vercors sont rasés, leurs habitants massacrés. Bien que trois quarts des maquisards ont réussi à survivre, le bilan est lourd. 600 résistants ont été tués au combat ou exécutés sommairement, et environ 200 civils perdent la vie dans ces atrocités. Leur crime : avoir soutenu la Résistance.