Il est midi hier lorsque j’apprends qu’un attentat a été perpétré contre Charlie Hebdo. Cette nouvelle est pour moi un énorme choc. Je pensais les journalistes intouchables en France, les voilà au coeur de l’attentat le plus meurtrier de l’histoire récente de la France.
Un choc donc. Tout de suite je prends conscience que ce qui vient de se produire est une atteinte très grave à la liberté d’expression. Mais plus les minutes avancent, plus les nouvelles qui arrivent amplifient le caractère tragique de l’événement. On apprend peu à peu les décès de Charb, puis Cabu, Tignous et enfin Wolanski… Une partie de ma jeunesse vole en éclat : les personnes m’ayant donné le goût du journalisme viennent de mourir. Ni photos ni illustrations ne parviendront à illustrer mon ressenti. Seuls les mots peuvent me permettre d’exprimer ce ressenti. Celui d’un jeune ayant grandi avec ces caricatures, mais également celui d’un jeune journaliste, inquiet mais aussi optimiste pour l’avenir de la profession.
En effet, que ce soit dans Charlie Hebdo ou dans d’autres journaux, les caricaturistes m’ont toujours fait réagir, rire, réfléchir et j’ai toujours été fasciné par leur faculté à trouver des angles inattendus pour traiter une information. Alors bien sûr j’ai parfois été choqué par certaines de leurs caricatures, et plus j’ai grandis plus je me suis rendu compte qu’ils allaient parfois peut être un peu loin. Mais on a tendance à oublier que les caricatures ne sont pas à prendre au premier degré, ce n’est après tout que de l’humour…
Deux caricatures prennent un tout autre sens aujourd’hui. Tout d’abord, ce qui restera comme le dernier dessin de Charb, présent dans le numéro de Charlie Hebdo la semaine dernière…Mais aussi le dessin d’Honoré, publier deux minutes avant l’attentat sur le compte Twitter de Charlie Hebdo :
Meilleurs vœux, au fait. pic.twitter.com/a2JOhqJZJM
— Charlie Hebdo (@Charlie_Hebdo_) 7 Janvier 2015
Ces dessins étaient malheureusement tristement prémonitoires. Le but de ces gens était avant tout de nous faire réfléchir, et surtout rire. Le 7 janvier 2015, ils sont morts parce qu’ils avaient voulu nous faire rire… Quel triste sort !
Mais c’est aussi en tant que jeune journaliste que cette nouvelle me choque et m’attriste. Cet attentat abominable est une atteinte à la liberté d’expression, à la liberté de la presse. Le 7 janvier 2015 est à n’en pas douter l’une des dates les plus tragiques pour la liberté d’expression en France, et en touchant Charlie Hebdo, les terroristes ont touché la presse dans son ensemble. En tant que média jeune, nous sommes les héritiers de ces personnes, et nous incarnons le futur de la profession. Même avec peu de recul, il semble évident que nous avons aujourd’hui plusieurs devoirs : le premier est un devoir de mémoire : ne jamais oublier ce qu’il s’est passé hier, ni les dessinateurs qu’étaient Charb, Cabu, Tignous et Wolanski, sans oublier Honoré, lui aussi décédé dans cet attentat. Car leurs caricatures, en repoussant sans cesse les limites, ont permis de faire évoluer les choses, et sans eux la liberté d’expression ne serait sans doute pas ce qu’elle est aujourd’hui. Mais en tant que journaliste, nous avons également le devoir de continuer d’informer. Ce qui s’est passé est gravissime, et nous touche tous. Mais ce n’est pas pour cela que nous allons arrêter. J’ai toujours cette passion pour le journalisme et rien ne pourra me l’enlever.
Mon seul espoir désormais est que ces morts ne soit pas vaines, qu’elles permettent une prise de conscience. Devant les menaces auxquelles elle fait face aujourd’hui, la liberté d’expression doit triompher et devenir plus forte. J’ai pu lire cette phrase tout à l’heure sur Twitter : « Ils ont voulu mettre la France à genoux, ils l’ont remise debout ». Pour le journalisme, elle s’applique également : cet événement rendra, je l’espère, la profession plus forte. L’union nous permettra de continuer à exercer notre passion. Alors oui aujourd’hui, je suis Charlie, nous sommes Charlie et mon seul souhait en ces heures tragiques pour ce si beau métier est que Charlie Hebdo continue d’exister.