
Construit en pleine zone marécageuse, ce centre de détention voulu par les autorités de Floride, et soutenu par Donald Trump renforce les critiques environnementales et politiques. Mais que cache ce projet aussi controversé qu’inquiétant ?
L’État de Floride vient de lancer un chantier aussi symbolique que polémique. Un centre de détention pour migrants, surnommé « Alcatraz des alligators« . Implanté au milieu des célèbres marécages des Everglades. Écosystème reconnu, il devrait accueillir dès les prochains mois au moins 1.000 personnes en situation irrégulière.
Le site choisi n’est autre qu’un ancien aérodrome situé dans une zone de 7.700 hectares, complètement enclavée dans les marais. Pour James Uthmeier, procureur général de Floride, ce choix est « efficace et peu coûteux« . Le terrain est déjà naturellement isolé, ce qui limite les dépenses en infrastructures de sécurité. « Si les gens sortent, il n’y a pas grand-chose qui les attend, à part les alligators et les pythons » a-t-il commenté dans une vidéo postée sur X.
Alligator Alcatraz: the one-stop shop to carry out President Trump’s mass deportation agenda. pic.twitter.com/96um2IXE7U
— Attorney General James Uthmeier (@AGJamesUthmeier) June 19, 2025
Le centre de détention pourrait commencer à héberger ses premiers détenus entre 30 et 60 jours après le début des travaux. Le coût de fonctionnement annuel est estimé à 450 millions de dollars. La Floride espère obtenir une part de ce budget auprès du gouvernement fédéral.
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Une politique migratoire à la Trump
Ce projet s’inscrit directement dans la politique migratoire ultra-répressive de Donald Trump, figure centrale du Parti républicain. Le Président a fait de l’expulsion massive des immigrés l’un de ses principaux objectifs, qualifiant à plusieurs reprises l’immigration d' »invasion criminelle« .
Le gouverneur de Floride, Ron DeSantis, allié de Trump sur ce dossier, assume pleinement son soutien à ce type de mesures. Il affirme travailler « en étroite collaboration » avec l’administration Trump sur ce programme de détention et d’expulsion. La symbolique de ce camp au coeur d’un territoire hostile, presque inaccessible, renforce une posture politique de fermeté absolue.
Mais cette « Alcatraz des alligators » fait déjà grincer des dents, bien au-delà des cercles progressistes.
Un scandale écologique ?
Ce n’est pas seulement sur le plan moral que ce projet fait scandale. Le site retenu se trouve au coeur du parc national des Everglades. Une réserve naturelle unique abritant faune et une flore très développée. L’association « Friends of the Everglades » a dénoncé dans une lettre ouverte adressée au gouverneur un « risque inacceptable et inutile » pour cet écosystème fragile.
L’installation de structures temporaires, même démontables, pourrait perturber durablement les équilibres écologiques de cette zone. Face aux critiques, DeSantis a tenté d’apaiser les inquiétudes en assurant que « rien ne sera permanent » et que « l‘impact environnemental sera nul« . Des propos loin de convaincre les défenseurs de l’environnement. D’autant plus que l’activité humaine massive, même temporaire, dans une zone protégée, comporte toujours un risque de pollution et de destruction d’habitat.
« Théâtre politique » ou solution de fond ?
En effet, pour de nombreux observateurs, ce projet relève davantage d’un coup de communication que d’une solution pragmatique à la question migratoire. « Transformer les Everglades en un camp de détention financé par les contribuables est un mélange grotesque de cruauté et de théâtre politique« , a exprimé Alex Howard, ancien conseiller dans l’administration Biden.
Si le centre finit par fonctionner, il deviendra l’un des grands symboles de la politique migratoire américaine. Une prison encerclée de serpents et d’alligators, pour dissuader ceux qui tenteraient de s’évader.