L’ancien ministre de l’Economie esquisse quelques idées pour l’élection présidentielle.
Lors de son meeting à Strasbourg mardi dernier, Emmanuel Macron a finalement donné des pistes pour une éventuelle candidature à l’élection présidentielle. L’ancien ministre de l’Economie et des Finances joue sur le suspense. Pour un programme plus défini, il faudra attendre encore quelques temps.
En effet, le fondateur du mouvement « En marche ! » déclare vouloir comprendre les nécessités d’une « France qui subit » avant d’esquisser un programme, afin que celui-ci corresponde véritablement aux besoins des citoyens. Macron a déclaré que son meeting, premier de trois déplacements prévus dans les semaines à venir, était plus une réaction au « malaise démocratique » qu’une véritable déclaration de candidature. Selon l’ex-ministre, les citoyens n’ont plus confiance dans les institutions de la République, représentatives d’une démocratie perçue comme inefficace et décrédibilisée.
« Nous sommes un pays qui évalue beaucoup trop peu et qui légifère beaucoup trop souvent. » #laFrancequisubit pic.twitter.com/HZLPT0btzb
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 4 octobre 2016
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Macron, un acteur « hors-jeu »
L’ancien conseiller politique de François Hollande se présente comme un « hors-jeu » : un futur candidat sans parti, qui vise à rassembler les électeurs modérés au-delà des clivages gauche-droite, soutenu par les 84000 adhérents à son mouvement « En marche !». La stratégie de Macron pourrait ne pas se limiter à désorienter ses adversaires à l’élection présidentielle : le véritable but à atteindre est l’innovation des codes traditionnels de la politique. Pro-européen, économiquement libéral, « ni de gauche, ni de droite »… , Macron a toutes les clés pour opérer une révolution de l’offre politique française, plutôt repliée sur elle-même et figée sur les clivages traditionnels.
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Ainsi, en excellent communicateur, Macron ne se mêle pas à la lutte interne à la gauche (il a déjà déclaré qu’il ne participerait pas à la primaire), ni aux débats plutôt stériles qui peuplent la scène politique ces dernières semaines. L’ancien ministre joue les équilibristes : il doit rassembler le plus grand nombre de voix au centre et des partis modérés, sans pour autant éloigner les électeurs de la gauche. Il trace sa route de manière assez indépendante, se limitant à attaquer de temps en temps les candidats à la présidentielle sans jamais véritablement rentrer dans l’arène.
Mais au cours de son meeting, Macron n’a pas ménagé les critiques envers ses principaux adversaires : en particulier, il a attaqué Sarkozy sur le plan moral. L’ancien Président de la République, coincé entre ses nombreuses casseroles et la côte de popularité montante de Juppé, vit une très mauvaise passe. L’ex-conseiller de François Hollande a affirmé qu’il est inconcevable pour le candidat à la primaire de la droite de se présenter au suffrage des français « alors qu’il a dépassé le plafond des dépenses autorisées pour sa campagne électorale ». La « probité » de Sarkozy aurait été également mise en question par sa récente implication dans des affaires controversées.
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« En marche ! »… sans programme
Ce premier meeting s’inscrit dans une stratégie très claire : Macron prépare sa course à la présidentielle, et a initié sa campagne avant même de rendre officielle sa candidature. Mardi dernier, il a esquissé pour la première fois quelques idées : introduction de la proportionnelle, institution d’une procédure de compte rendu annuel du président de la République, élargissement de la pratique du non cumul des mandats…
Cependant, le leader d’ « En marche ! » a été très clair : pas de programme défini. La phase initiale de sa course à l’Elysée est passée quasiment inaperçue : à travers un questionnaire diffusé de mai à septembre aux adhérents de son mouvement, il a obtenu 25.000 réponses sur l’état du pays et sur les attentes des Français. Macron affirme vouloir dresser un « diagnostic » de la France après une période d’observation, afin de s’inspirer des besoins réels de la population pour créer des propositions de campagne plus pertinentes. Le futur candidat, qui démontre une capacité politique considérable, veut aboutir à une offre extrêmement ciblée, et donc très proche des attentes des électeurs.
Terminée la phase d’observation et consultation, Macron passe aux constats : il commence à s’exprimer de manière plus claire, souvent avec des tons polémiques qui ne lui appartenaient pas à l’époque de Bercy. Les adhérents à son mouvement attendent les meetings du Mans (le 11 octobre) et de Montpellier (18 octobre) pour avoir plus de pistes sur les stratégies que le futur candidat entend suivre d’ici à 2017.
« C’est en allant écouter les Français qu’on peut gagner le droit d’être entendus et de porter leur voix. » #laFrancequisubit pic.twitter.com/47zAc5txhd
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 4 octobre 2016
Emmanuel Macron considéré comme « présidentiable » par 36% des électeurs
Macron, qui ne s’est pas encore officiellement lancé dans l’arène, joue sur l’attente pour se laisser une marge de manœuvre. Sa candidature est pourtant attendue de tous les côtés. Les Sarkozystes, effrayés par l’impasse de leur candidat, espèrent que Macron lance sa campagne avant la primaire de la droite, puisque sa candidature pourrait soustraire des votes modérés à Alain Juppé. De l’autre côté de l’échiquier politique, l’entourage d’Hollande attend une annonce officielle de candidature qui permettrait au président sortant d’adapter sa stratégie aux nouvelles forces en jeu.
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Cependant, certains entre les présents au meeting de mardi se demandaient si la marche n’est pas trop haute pour l’ex-ministre de Bercy : son manque d’expérience et l’absence d’une structure partisane pourraient lui porter préjudice par rapport à d’autres candidats bien plus entourés et soutenus. De plus, Emmanuel Macron n’a jamais été très présent sur la scène médiatique, et son absence est encore plus remarquable depuis son départ du gouvernement. Les Français ne connaissent bien ni ses positions sur plusieurs sujets, ni son projet pour l’avenir du pays. Dans ce sens, présenter un programme aurait favorisé la compréhension de ses idées.
Toutefois, les électeurs ne semblent pas pénaliser le manque de propositions « traditionnelles » : depuis la rentrée, Macron obtient des scores enviables. Dans un récent sondage Vivavoice pour Libération, l’ancien ministre est jugé comme le plus présidentiable à gauche (36%) et se place deuxième dans la projection générale, derrière Alain Juppé (47%). Les dernières études d’opinion confirment que Macron oscille entre 12% et 15% des intentions de vote au premier tour, ce qui lui pourrait lui permettre de dépasser le candidat issu de la primaire de la gauche.
Les sondages indiquent que les Français considèrent Macron comme une figure présidentiable et qu’ils seraient prêts à le voter. Mais est-il prêt à se porter candidat ?
Crédit photo à la Une : atlantico.fr