Depuis que Donald Trump est assuré de remporter l’investiture du Parti Républicain, le choix de son colistier était devenu un des sujets centraux de la campagne.
Jeudi soir, tout portait à croire que le suspens prendrait fin. Tout au long de la semaine, des rumeurs de plus en plus insistantes avaient pointé vers Mike Pence, gouverneur de l’Indiana. L’annonce officielle vendredi a été annulée à la dernière minute, après l’attentat de Nice. Pour ce genre de communication calibrée, Trump ne pouvait se permettre de partager le news cycle.
C’est finalement avec un tweet que le choix a été officialisé.
Le choix du « VP » est un choix stratégique s’il en est. Il intervient à un moment de la campagne où la ligne politique se précise et l’électoral potentiel se cristallise. C’est un additif, une façon de compléter le candidat principal, de colorer la campagne d’une certaine teinte.
Que signifie le choix de Mike Pence pour la campagne de Trump et sa stratégie électorale? Quelles sont leurs différences et leurs similitudes?
Mike Pence est un homme du Midwest. Né en 1959 à Colombus, dans l’Indiana, il a étudié jusque dans la supérieur dans le même Etat, dont il est gouverneur depuis 2012. Ceci est en contraste par rapport au new-yorkais Trump, qui aime aussi passer du temps dans ses propriétés de Floride et de Las Vegas.
C’est un chrétien évangélique. Né dans une famille catholique, il est ensuite devenu un born-again christian. Sa femme, Karen, qu’il a épousé en 1985, est aussi une évangélique. Trump est presbytérien, mais il est assez clair qu’il n’est pas religieux et n’a jamais fait d’efforts pour projeter une image de moralité, que ce soit dans sa vie personnelle ou professionnelle.
Mike Pence a 57 ans, marié, jamais divorcé, et a trois enfant. Trump a 70 ans, s’est marié 3 fois, a 5 enfants et 8 petits-enfants.
Après avoir exercé le droit, Pence est devenu animateur radio dans les années 1990. Trump est lui une star de télé-réalité, avec son show The Apprentice.
Pence a été membre du Congrès américain de 2001 à 2013, et est gouverneur de l’Indiana depuis 2012. Donald Trump n’a lui jamais été élu et n’a jamais fait de politique avant 2015.
Pence a soutenu Ted Cruz pendant les primaires de 2016.
Pence a voté en faveur de l’invasion en Irak en 2002, en tant que membre du Congrès. Donald Trump se félicite lui d’avoir dénoncé la guerre dès le début — bien que ces affirmations soient à nuancer.
Pence a critiqué la proposition de Trump consistant à interdire aux musulmans l’entrée aux Etats-Unis. En décembre 2015, après la tuerie de San Bernardino, et en pleine psychose d’un retour du terrorisme sur le sol américain, Trump avait lâché cette promesse, soulevant autant de critiques que d’enthousiasme. A l’époque, Mike Pence avait jugé cette proposition « insultante et inconstitutionnelle ».
Pence est pour le Trans-Pacific-Partnership, qu’il juge avantageux pour les travailleurs américains et une garantie de sécurité. Trump a de son côté comparé le traité à un « viol ».
Un atout pour le reste de la campagne
Le choix de Pence semble être une bonne idée. Il consolide autour de Trump l’électorat évangélique. Pence sera la caution réellement conservatrice pour la droite religieuse, un électorat qui a préféré Ted Cruz pour les primaires et pour qui Trump n’est pas le candidat le plus évident.
Son indéniable stature de Midwestern est aussi un atout puisqu’elle donne au ticket Trump-Pence une caution « grassroots » que n’a pas forcément Trump, plus naturellement populaire dans le nord-est et en Californie.
En tant que gouverneur, Mike Pence a étendu la couverture médicale Medicaid, en accord avec l’administration d’Obama. Il est en faveur de l’Obama-Care et a augmenté les dépenses de son Etat. En cela, il est dans la ligne du Worker’s Party que semble devoir devenir le parti Républicain avec Trump : protectionniste et conservateur.
Les déçus : Christie et Gingrich
Le choix du gouverneur de l’Indiana est une surprise. Il a été préféré à deux favoris.
Chris Christie, candidat malheureux aux primaires républicaines et gouverneur du New Jersey, avait de fait hypothéqué sa carrière politique sur un succès de Trump en ralliant celui-ci au moment où l’establishment républicain faisait encore tout pour lui barrer la route.
Quant à Newt Gingrich, le héros du GOP nineties qui avait mené la « Révolution conservatrice » contre Bill Clinton, il semblait un choix sûr et logique, compte tenu de son influence à Washington et son statut d’ancien, même s’il pouvait être clivant tant il est détesté par la gauche et le centre. Gingrich avait même quitté son poste sur la chaine de télévision Fox News en début de semaine, où il officiait en tant que commentateur politique. Ce que tout le monde avait interprété comme la preuve d’une annonce imminente de candidature.