Douze militaires reviennent d’un raid itinérant au Groenland. Confrontés à des températures allant jusqu’à -40°C, ils se confient sur la vie quotidienne dans un milieu hostile et dangereux.
« On a eu froid » reconnaissent-ils pudiquement. Durant un mois, 12 soldats de haute-montagne sont partis effectuer un raid itinérant en plein cœur du Groenland. L’objectif : permettre l’étude « des effets physiologiques du froid sur le corps humain » et « se transmettre un savoir-faire » pour assurer les missions dans les milieux polaires.
Une expédition qui s’inscrit dans le programme « Life In Frozen Environnement » dirigé par le Service de Santé des Armées. Depuis 4 ans, des militaires volontaires partent dans les zones polaires pour « améliorer les équipements et matériels », de la nourriture aux armes. Si « le corps humain s’acclimate », « tout est compliqué » résume un militaire qui décrit néanmoins « une belle expérience » au plus près des ours polaires !
Une performance physique hors-norme
Habitués à évoluer dans des terrains difficiles, ce raid est« une remise en question » pour les militaires car « le froid nous oblige à sortir de notre zone de confort » résume le commandant Pierre. « Il faut revoir les procédures et les méthodes pour s’adapter aux températures », voire « ré-apprendre des gestes rudimentaires ». A l’image de « la construction d’un bivouac dans la neige à -30°C » ou « allumer un réchaud au carburant ».
Au total, ils ont parcouru 160 kilomètres avec 70 kg d’équipements, traînés par des« pulkas individuelles » en expérimentation. Malgré les conditions difficiles, les soldats décrivent « un sentiment unique », celui d’être « seul au monde, loin de toutes civilisations, dans des paysages magnifiques et démesurés ». Pour le sergent Alan, « être tiré en kite par une voile sur la banquise pendant 3 heures » restera son meilleur souvenir.
Chaque jour, les soldats parcourent 16 à 17 kilomètres avec une obsession : la sécurité. « On apprend à ne pas se dépenser totalement physiquement pour éviter les accident » détaille le commandant Censier qui précise « l’absence totale des secours ». Autre obsession, plus étonnante, la transpiration. « Il ne faut jamais transpirer, sinon le corps gèle instantanément avec l’humidité » raconte un soldat, lui-même victime de « gelures sur le nez ».
Duvet sur la banquise, « Game of Thrones » et dentifrice gelé.
Côté vie quotidienne, les conditions sont « minimalistes » pour « ne pas être saisi par le froid ». Durant 24 jours, ils étaient en autonomie totale avec de la « nourriture spéciale » et « 5 litres de carburants par personne ». Le plus contraignant : « faire fondre la neige pour avoir de l’eau ». Un passage obligé pour manger car « la nourriture gèle si elle n’est pas dans l’eau chaude ». « Tout le matériel que l’on avait nous a sauvé la vie » insiste le sergent Alan.
A l’arrêt des activités « vers 16h30 », les militaires « montent les bivouacs » et se réfugient par deux à l’intérieur. « On pose un matelas gonflable sur la banquise puis notre duvet, spécialement conçu » explique le commandant Pierre. Avant d’ajouter :« on ne sort plus du duvet jusqu’au lendemain ». Confrontés à des tempêtes au début de l’expédition, la sortie des duvets le matin est « un moment difficile » en raison des « températures extérieures ».
« Il toujours être en activité » précise l’un des militaires du raid même si les « vêtements sont chauds ». « On utilise la technique de l’oignon » précise le commandant, c’est-à-dire « une accumulation de vêtements spécifiques ». Côté divertissement, les contacts familiaux étaient volontairement rares mais tous avaient « une liseuse ». « J’ai profité de l’expédition pour regarder les 7 saisons de Game of Thrones » détaille, dans un éclat de rire, l’un des militaires.
Dans le froid, « l’hygiène n’est pas problématique » mais le sergent Alan reconnaît que « c’est la première fois en 15 ans d’armée » qu’il « passait 21 jours sans se laver ». « On faisait une toilette de chat rapide » car « même les lingettes ou le dentifrice gelaient s’ils n’étaient pas contre nous » raconte un autre militaire. Une « belle aventure qu’il faut vivre et non pas subir » conclut le commandant Pierre.
Un petit regret ? « Ne pas avoir vu d’ours polaires » nous confie l’un des hommes de la mission. « On a vu des traces d’une mère et son enfant mais ils se fondent tellement dans le décor ».
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