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On a parlé gros son, Tony Hawk’s, et sauna de bière avec Johnny Mafia

Grosse mandale dans la gueule quand j’ai découvert pour la première fois Johnny Mafia par l’intermédiaire de Rolling Stone. Délivrant un rock garage à fond la tétine, sous perfusion de Ty Segall, Thee Oh Sees et autres consorts de la scène garage US, leur premier disque ressemble à une horde de Hells Angels lachés sur une autoroute un jour de grande virée. Direct, hargneux, intense, mais aussi mélodique, les petits gars venus de Sens s’impose comme un groupe qui compte dans le paysage sonore français. Et putain ! Quelle bonne nouvelle ! Baroudeurs influencés par les Ramones, les Pixies, les nineties, look qui va avec, flanqués d’un humour absurde à toute épreuve, ils savent se transcender sur scène, chacun de leur concerts vous perturbant le métabolisme à coup sûr.
Fin juin, j’ai rencontré Fabio (guitariste, à gauche sur la photo), et William (bassiste, à droite), présents à Paris pour leur concert au Jamel Comedy Club. L’occasion de revenir sur le son et les influences d’un groupe très prometteur.

 

Ton tirage de langue sur scène, ça t’est venu comme ça ?

William : J’ai mis longtemps à m’en rendre compte, et c’est seulement après qu’on me l’ait dit que j’ai vraiment réalisé.

Le visuel sur votre pochette d’album c’est un mec qui tire la langue, c’est du hasard ?

William : Oui oui.

Fabio : Oui. C’était carte blanche en fait, c’est la soeur de Théo (chanteur-guitariste) qui fait nos visuels.

William : Le mec sur la pochette il me fait penser à Trevor dans GTA V.

Fabio : Mouais, il fait un peu moins cabochard quoi.

William : Ah p’têtre.

J’interprète peut être un peu trop, mais je trouve que c’est votre signature visuelle.

William : (rires) Ça c’est Rolling Stone ! Ouais je sais pas, c’est la musique qui fait ça.

En tout cas vous foutez une putain d’ambiance.

William : On a toujours fait comme ça.

Fabio : Faut comprendre qu’on fait ça depuis le début.

William : Ça nous est venu naturellement, parce que les seuls groupes qu’on avait vu avant de faire de la scène c’était les mecs de la fête de la musique avec leurs reprises de Téléphone ou du Démon de Minuit donc bon (rires entendus).

Vous êtes des potes de lycée ? Même depuis plus longtemps ?

Fabio : Théo et William ils se sont rencontrés hyper tôt.

Vous vous êtes formés comment ? Parce que vous aviez les mêmes goûts musicaux ?

Fabio : En fait moi je les ai vu avec leur premier groupe.

William : J’avais un groupe avec Théo, Fabio nous a vu à la fête de la musique et nous a « Msn-é »

Fabio : J’ai ajouté Théo sur MSN à l’époque (sourire).

Putain ça date …

William : Putain la vache c’est vrai …

Vos clips m’ont bien fait marrer, est ce qu’il faut une bonne dose de connerie pour faire du punk ?

Fabio : C’est ce qui nous motive, quitte à faire un clip autant faire un clip marrant !

William : (regarde ma cigarette électronique replica) C’est ton micro ça en fait ?

Non non je vous enregistre avec mon portable.

William : Moi je les aime bien celles là on dirait des jouets.

(M’adressant à Fabio) J’ai vu que tu fais du skate, ça a influencé votre son ?

Fabio : J’en fais plus trop j’ai plus le temps, mais disons que moi j’ai découvert plein de mes trucs phares par les vidéos de skate c’était un peu le truc du cool pour moi.

William : Moi c’est en jouant à Tony Hawk’s Underground !

Fabio : Disons que ouais ça forge une culture musicale.

William : Même les sons raps ils sont bien dans Tony Hawk’s.

Et vos plus grosses influences musicales ?

Fabio : Influences c’est pas si évident …

Je veux dire les mecs qui vous ont vraiment donné envie de jouer ?

William : À la base ? Les Clash. Mais il y a longtemps quoi. Nirvana, les Pixies.

Fabio : Moi le gros truc qui m’a donné envie de faire de la musique, c’est les Stones ! Tu vois ça a rien à voir avec notre style de musique au final.

William : Sur QuizUp il est dans le top 3 sur le thème des Stones. T’es combien en ce moment ?

Fabio : Vu que j’étais deuxième, le premier il était premier mondial j’ai dis vas y j’abandonne.

Les Stooges ça vous parle ?

Fabio : Ouais à fond.

William : On va jouer avec Iggy Pop. Enfin au même festival, aux Eurockéennes de Belfort.

Vous tournez beaucoup en ce moment ?

William : Ouais on a beaucoup tourné là, ça se calme un peu cet été. C’est cool.

Vous en pensez quoi aujourd’hui de la scène rock en France ?

William : C’est vaste comme question … Il y a plein de groupes cool … Et il y a plein de groupes de merde quoi …

Fabio : Ouais je sais pas j’ai pas un avis sur LA scène rock.

Je trouve que les maisons de disque, les sites de streaming vous mettent peu avant et c’est malheureux.

William : Parce que le public de ces groupes là c’est pas celui va le plus streamer.

Et en festoche vous avez du monde ?

William : Ça dépend du festival.

Fabio : Je pense pas qu’on soit l’attraction principale

William : C’est pas nous qui ramenons du monde.

Fabio : Si les gens restent c’est cool tu vois, c’est là qu’on jauge.

William : En général c’est pas nous qui ramenons les gens. Ce qui est intéressant c’est ceux qui restent à nos concerts sans nous connaitre avant de venir. Parfois on est surpris même dans des festivals où l’ambiance est pas rock, et qu’on passe après des groupes de reggae ou quoi, on s’attend à ce qu’ils se cassent avec les gosses, et au final ça prend !

Fabio : On a peut être ce truc bon enfant qui peut faire glisser un petit sourire aux gens et se dire ah c’est cool ce groupe.

Ce qui m’a marqué c’est votre énergie sur scène, franchement il y a pas de temps morts ou de baisse de régime dans votre set, comme dans votre album d’ailleurs.

William : Ouais bah ça c’est l’influence des Ramones. One, two, three, four !

J’ai aussi beaucoup kiffé votre son, tu mets pas mal de reverb (effet guitare imitant l’écho d’une pièce ou d’un espace particulier) ?

Fabio : En effet ouais.

J’ai vu que tu utilisais une Mustang (guitare rendue célèbre par Kurt Cobain et une bonne partie de la scène grunge) dans un ampli’ Fender, c’est quoi précisément comme ampli’?

Fabio : C’est un Pro Reverb. C’est un vieux truc des années 70.

Et après pour faire saturer la guitare ?

Fabio : En fait, j’ai un tout petit ampli’ au dessus qui m’aide à saturer sur le son de base que je fous dans le gros.

Le petit truc rouge que j’ai vu posé sur le Pro Reverb ? Le Greta ?

William : Le grille-pain !

Fabio : Putain tu connais ! Et après grosse Fuzz (effet guitare utilisé dans « Satisfaction » des Stones, devenu culte par l’usage d’Hendrix)

Votre chanteur-guitariste j’ai vu qu’il utilisait la guitare signature de J. Mascis du groupe Dinosaur Jr.

William : C’est un hasard.

Fabio : Ouais il est pas forcément fan du groupe, on est pas hyper fan de ce groupe. Il avait surtout besoin d’une JazzMaster un peu plus costaud.

William : Il en a racheté une deuxième en back up car c’était pas cher … (Faussement vexé que je ne l’interroge pas sur son matos) Et moi comme basse j’ai une … (rires)

Est ce que t’as essayé de te rapprocher du son d’un mec en particulier qui t’aurait inspiré ?

Fabio : Bah pour l’ampli’ plutôt Ty Segall parce qu’en fait les fuzz elles explosent les lampes. Avant je jouais sur un Vox mais le son était trop compressé puis tu vois là j’avais envie de reverb parce que j’écoute des trucs blindés de reverb depuis le début. C’est ça qui crade le son, la reverb plutôt que le gain.

J’ai un seul reproche à vous faire c’est que j’ait trouvé votre album un peu court ..

William : Roooh, boh tu dis pas que c’est un album , c’est un petit truc quoi.

Fabio : On s’est jamais vraiment dit c’est un album

William : C’est un disque quoi tu vois, un digipack quoi, enfin on s’en fout (rires) C’est pas vraiment un album, pas loin quoi, c’est presque un album.

Fabio : Après tu vois dans ce qu’on écoute les groupes de punk d’aujourd’hui les Spits et tout, les albums déjà ils tournent en 45 tours et pas en 33 et ils durent 20 minutes, il y a ce côte cool quoi.

William : Vaut mieux faire trop court que trop long !

Fabio : C’est ça ouais.

William : Même en concert, trois quart d’heure-cinquante minutes ça suffit, après c’est relou.

Vous travaillez sur un deuxième truc là ?

Fabio : On va s’y mettre cet été. On va tester des studios.

Vous avez été connus surtout par la scène ?

William : C’est des coups de bol aussi. Il y a quelques années il y a un directeur de salle qui a entendu un de nos sons et qui nous a fait jouer, coup de bol. Puis après une fois qu’il y a eu le manager qui s’y connait et qui sait comment obtenir des dates … les trucs cool sont arrivés. C’est les concerts et du bol.

Fabio : C’est ça, on a pas sorti un clip Youtube qui nous aurait fait connaître, ça faisait trois ans qu’on tournait, on faisait tous les concerts qu’on pouvait quitte à perdre de la thune et tout.

Le bouche à oreille aussi ?

Fabio : Ouais peut être plus que les groupes sur les Paris ou autre. Quand on est arrivé à Paris on a joué à l’espace B, on a débarqué dans le milieu garage on avait fait quatre ans de concerts, ce que les groupes du coin font pas.

William : On a jamais joué spécialement pour être connus ou quoi. Il y en a ils faisaient du sport, nous on faisait des concerts.

Fabio : Ouais c’est ça.

Vous préférez enregistrer ou faire de la scène ?

Fabio : Dans l’idée c’est vrai qu’on est vachement meilleurs sur scène qu’en studio. Après moi personnellement j’adore enregistrer. Pour moi un groupe qui te marque c’est un groupe que t’écoute dans la rue, sous la douche …

William : Moi pour le coup mon groupe préféré c’est les Pixies et j’ai pas spécialement envie d’aller les voir en concert.

Fabio : Le but quand même pour moi c’est de marquer les gens. Tu vois le rêve ce serait qu’on soit le groupe préféré de quelqu’un un jour. C’est ça le délire j’ai pas envie qu’on soit un groupe sympa parmi tant d’autres.

William : Par exemple un mec qui nous a jamais vu en concert et qui écoute seulement le CD on kifferait qu’il se dise « Waouh ils déchirent ».

Fabio : Je pense que tu marques plus profondément les gens sur disque.

William : La musique quoi, c’est purement la musique.

Fabio : Un live ça te fout une claque à la limite, mais le disque ça te met des torgnoles à longueur de journées, à longueur d’années …

Et au fait vous avez quel âge ?

William : 24 ans et 3 mois de moyenne. En gros Théo qu’a 24 ans, moi bientôt, Nico (batteur) qu’en a 29, et Fabio 21.

Fabio : Ça fait quatre ans qu’on tourne bien, mais en réalité sept ans qu’on fait de la scène. C’est pas un projet, on s’est mis ensemble parce qu’on aime la musique.

Vous venez d’où ?

William : Sens, la capitale du monde !

Fabio : Tout au Nord de l’Yonne.

William : Guy Roux !

Et vous avez commencé là bas ?

William : Notre premier concert c’était dans une cave qui s’appelle le Wembley, enfin s’appelait .. Ça puait la bière, on avait l’impression d’être dans un sauna de bière.

Fabio : C’était en mode : « Ouais on peut jouer ici ? », puis ils te filaient une date.

Et Paris vous kiffez ?

William : Moi ouais.

Fabio : Moi moyen. J’aime bien pour les concerts, mais le reste me pète les couilles !

William : (sourire) Moi j’aime bien boire (rires). Même quand t’es tout seul il y a du monde donc tu peux pas te bourrer la gueule tout seul.

Dernier truc, vous l’avez enregistré où votre album ?

William : Au café Charbon à Nevers, une salle de concert.

Fabio : On a enregistré sur scène.

Sur scène ?!

William : Il y a que le chant qui a été enregistré à part.

Fabio : C’est du live pur. Pour le prochain on veut faire un truc un peu plus produit, s’arrêter sur les sons.

C’est intéressant car il y a peu de groupes aujourd’hui qui enregistrent en live.

William : On a essayé d’enregistrer dans quelques studios mais ça rendait chiant, mou.

Et pour garder votre sincérité..

Fabio : C’est ça ouais, l’énergie !

Un grand merci les gars !

Disque (disponible sur toutes les plateformes de streaming) : Michel-Michel Michel.

En attendant leur prochain « truc », vous pouvez aller écouter l’excellent projet solo de Fabio, Thee Grinch, disponible sur Youtube et sortie en K7 chez Howlin Banana Records.

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