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On débriefe pour vous… La malédiction de Bly Manor, fantômes gothiques et romantiques

La deuxième saison de la série anthologique de Mike Flanagan, Bly Manor, est moins effrayante que Hill House – mais paradoxalement peut-être plus angoissante. 

C’est quoi, La malédiction de Bly Manor ? En 1987, Dani (Victoria Pedretti), une jeune enseignante américaine installée à Londres, est engagée par Sir Henry Wingrave (Henry Thomas) pour s’occuper de ses neveux orphelins de 7 et 9 ans, Miles (Benjamin Evan Ainsworth) et Flora (Amelie Bea Smith). Dans le manoir de Bly au cœur de la campagne anglaise, la jeune femme rencontre les deux enfants, la gouvernante Hannah (T’Nia Miller), la jardinière Jamie (Amelia Eve) et le cuisinier Owen (Rahul Kohli). Rapidement, l’ambiance devient étrange : le comportement des enfants est troublant, des non-dits entourent la mort par noyade de Rebecca (Tahirah Sharif) qui a précédé Dani, elle-même est témoin d’événements étranges et l’ancien factotum Peter (Oliver Jackson-Cohen) rode sur le domaine. Comme dans tout bon manoir anglais qui se respecte, Bly Manor cache bien des secrets et des fantômes.

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Pèse sur Bly Manor l’ombre d’une double malédiction. En tant que deuxième saison de la série anthologique, elle succède au  terrifiant et envoûtant The Haunting of Hill House ;  l’histoire est tirée de la nouvelle de Henry James Le tour d’écrou , déjà portée à l’écran à maintes reprises (citons Les innocents en 1961 et Les autres en 2001.)  Deux ans après Hill house, Mike Flanagan revient donc sur Netflix avec un autre récit et des personnages différents interprétés par les mêmes acteurs (qui, au passage, sont tous remarquables).

Dans ce contexte, la tentation de la comparaison avec la saison précédente et avec le roman original est grande ; dans les deux cas, elle est non pertinente. D’abord parce que Bly Manor est une adaptation libre bien plus qu’une transposition scrupuleuse ou même modernisée de la nouvelle de James (le scénario inclus par ailleurs d’autres histoires de l’auteur, qui donnent leurs titres aux épisodes).  Ensuite parce qu’il est impossible de dire qu’elle est meilleure ou moins bonne que Hill House – elle est simplement différente. Malgré un thème (une maison remplie de fantômes) et une construction parfois similaire (avec de longues séquences centrées sur un personnage), Bly Manor décevra probablement ceux qui espèrent les mêmes séquences d’horreur pure ou les mêmes sursauts. Vue sous un certain angle, Bly Manor n’est même pas vraiment une série d’horreur et s’il y a des fantômes, ils sont d’un tout autre genre.

Miles et Flora, les deux enfants de Bly Manor

La série reprend toutefois la structure du roman : l’histoire de cette institutrice engagée pour veiller sur les deux orphelins nous est racontée par une tierce personne. C’est bien des années plus tard que, à la veille d’un mariage, une femme relate les événements. Il est d’ailleurs difficile de les résumer en allant au-delà de ce que  nous avons dit en introduction. L’histoire se développe en effet petit à petit, voire lentement, en lançant divers fils narratifs qui semblent parfois n’avoir aucun lien mais qui finissent par converger ; les énigmes, les mystères de Bly Manor apparaissent les uns après les autres ; pour couronner le tout, la résolution repose sur une espèce de déconstruction du récit dans les derniers épisodes.

On restera donc volontairement abscons, en soulignant que Bly Manor  joue avec le paranormal pour raconter autre chose. C’est de toute évidence une série qui trompe le spectateur, cherche à l’égarer plutôt qu’à l’effrayer, avec en particulier de nombreux sauts temporels et même un labyrinthe narratif avec la répétition à l’identique de plusieurs séquences. Dans une atmosphère gothique, inquiétante mais aussi onirique, on s’interroge en permanence sur ce que l’on voit : des fantômes ? Des hallucinations ? Des souvenirs ?  Bly Manor est envoûtante et intrigante mais, à l’image des spectres qui hantent le domaine, elle est moins effrayante qu’angoissante.

Les fantômes de Bly Manor ne sont pas stricto sensu ceux de Bly Manor : ce sont ceux des différents personnages. Ils coexistent avec les vivants et, s’ils n’apparaissent pas soudainement, c’est parce qu’ils sont toujours là, relégués et perdus en arrière-plan. Bly Manor est une histoire de hantise, au sens psychologique du terme : ces fantômes sont le reflet des souvenirs, des traumatismes, du sentiment de culpabilité, du passé et des tragédies intimes des différents protagonistes. 

Dani aux côtés d’une Hannah bien mystérieuse…

A commencer par Dani, jeune femme tourmentée par un passé qu’elle tente de fuir ; ou Miles et Flora, les deux enfants frappés par des tragédies successives ; Owen, le cuisinier,  avec son regard particulier sur le passé ; le couple étrange formé par l’ancienne jeune fille au pair Rebecca et Peter Quint qui fut son amant ; et bien sûr Hannah (magistralement interprétée par  T’Nia Miller), sans doute le personnage le plus complexe et fascinant de cette histoire. Tous ont un fantôme qui les hante : un fantôme surnaturel qui, dans certains cas, n’en est pas moins réel… (On reste abscons, vous vous souvenez ?) Et c’est cet aspect qui se dévoile dans la seconde partie de Bly Manor, lorsque l’intrigue prend toute sa dimension humaine. Il y a encore quelques séquences d’horreur, mais le récit devient plus triste et mélancolique qu’autre chose lorsqu’on comprend le sens général. Et le sens du générique, éclairé sous un nouveau jour. 

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Une partie du public sera sans doute frustrée par Bly Manor, moins spectaculaire et plus lente à se mettre en place que Hill House. Plus subtile en terme d’ambiance, plus modérée dans ses rebondissements et ses scènes d’horreur, c’est en fait une série qui trompe ses spectateurs :  elle nous dit que « toutes les histoires de fantômes sont des histoires d’amour. » Et c’est peut-être ce qui la rend encore plus dérangeante. Alerte, spoiler : la disparition des êtres aimés est un spectre qui nous hante dans toutes les ombres et tous les miroirs ; la malédiction de Bly Manor, ce sont les souvenirs et les visages qui s’effacent de la mémoire. Peut-être que, finalement, l’absence des fantômes est plus terrifiante que leur présence. 

The haunting of Bly Manor (Netflix)
9 épisodes de 45 à 65′.

A lire aussi : Disparition de Claude Giraud, la voix de Severus Rogue dans Harry Potter ou Ulysse 31

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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