Présenté lors du festival de Cannes 2024, « Emilia Perez » a fait parler de lui. Ce film de Jacques Audiard, avant-gardiste, sortira sur grand écran cet été, le 21 août.
Emilia Perez, le nouveau film du réalisateur Jacques Audiard, a fait sensation lors de sa projection au Festival de Cannes cette année au point de recevoir une standing ovation de 9 minutes. Le film a même reçu le Prix du Jury et a été salué par la critique. C’est un ovni cinématographique qui défie les conventions de genres. Son format donne l’impression que Emilia Perez s’adresse directement au public tout au long de la projection, à l’image de messages engagés. Avec un fil conducteur rythmé, le film reste captivant tout le long et tient en haleine le spectateur jusqu’à la fin. Le public plongera dans un environnement particulier, à la fois en 1950 à Hollywood, dans un thriller de cartel et dans le monde de 2024.
Emilia Perez, une comédie musicale moderne, est attendue sur le grand écran, prochainement, le 21 août 2024. C’est la preuve que Jacques Audiard parvient à se réinventer à chaque projet sans avoir peur d’oser.
Droit, corruption, rédemption…
Le film raconte l’histoire de Rita, une avocate talentueuse qui travaille dans un grand cabinet mais dont le talent n’est pas reconnu à sa juste valeur dans une société où la femme mexicaine est sujette à de la discrimination. Un jour, elle reçoit une proposition inattendue. Dans les faits, Manitas un chef de cartel mexicain redouté, l’engage pour l’aider à se retirer de son activité illégale et à disparaître pour toujours. Mais en réalité, il souhaite disparaitre pour achever sa transition de genre. Rita accepte à contrecœur, mais elle se retrouve bientôt prise dans un monde dangereux et impitoyable où rien n’est ce qu’il paraît. Dès lors, la jeune femme sera confrontée à la violence, à la corruption et à ses propres démons.
On aime
Entre comédie musicale et film d’action
La mise en scène d’Audiard est inventive et audacieuse. Il utilise une caméra mobile et des plans rapprochés pour créer une sensation d’urgence et d’intimité. En effet Emilia Perez n’est pas un long-métrage comme on a l’habitude d’en voir. Il mêle comédie musicale et violence des cartels mexicains. En d’autres termes, le film mêle des séquences chantées-dansées durant lesquelles les personnages expriment des sentiments et des idées. Et cette caractéristique, le public l’aperçoit dès les premières minutes de la projection. Lorsque Rita, jouée par Zoe Saldaña, se mêle à une foule mexicaine pour rédiger un plaidoyer, elle se met à chanter et à danser pour faire vivre ses mots. Bien que la présence de choeurs assure des frissons, ici, la qualité du chant importe moins que l’émotion des performances! Si ce concept est innovant, il peut toutefois paraitre déstabilisant.
Un film engagé
Emilia Perez assume totalement son écriture. C’est un film qui fait réfléchir. En effet, il est un miroir du monde réel. De cette manière le réalisateur tente de refléter les problèmes quotidiens en cours au Mexique et de souligner des sujets à connotation plus tabous. L’intrigue tourne essentiellement autour de la transition de genre d’Emilia Perez, anciennement Manitas. La recherche de soi et la quête d’identité sont alors des éléments central de Emilia Perez. C’est sans doute une manière de s’assurer un passeport vers la modernité.
Au-delà de la transidentité, la violence des cartels mexicains n’est pas ignorée. D’ailleurs, une grande partie du film va reposer sur la création et l’expansion d’une ONG qui vise à aider des personnes à la recherche de leurs proches portés disparus. En décembre 2023, 17 000 personnes disparues dans le pays étaient recensées. Un chiffre officiel mais bien trop faible par rapport au nombre de victimes oubliées, souvent dû à la colère de narcotrafiquants. L’homosexualité, l’égalité de genre, l’amitié, l’amour et la rédemption sont autant de thématiques supplémentaires évoquées au sein de Emilia Perez.
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Des femmes qui supportent le poids de la société
Rita est une femme forte et indépendante. Jouée par Zoe Saldaña, elle est également vulnérable. Cette coexistence de caractères et de sentiments fait d’elle un personnage attachant. Surtout qu’elle est le modèle de la femme qui réussit mais qui doit se battre face à une société patriarcale. Fidèle à elle-même et à ses amies, elle n’hésite pas à se mettre en danger pour aider ceux qu’elle apprécie. Jouée par Karla Sofía Gascón, Emilia Perez émeut elle aussi le public. Par son charisme et son amour paternel/maternel envers ses enfants, Emilia touche et fascine. L’espoir et le pardon se font ressentir à travers ce personnage. Une figure à travers laquelle beaucoup peuvent s’identifier.
On aime moins
Si l’aspect comédie musicale peut tendre vers une incompréhension du spectateur, ce n’est que de court passage. Rapidement le public oublie ses préjugés et apprécie les scènes qui défilent sous ses yeux, qu’elles soit parlées, chantées ou dansées. En revanche, un rôle un peu plus effacé fait des déçus. En effet, Selena Gomez est à la tête de l’affiche de la présentation de Emilia Perez. Pourtant, son temps d’écran était plutôt limité. Si les téléspectateurs et admirateurs de l’actrice américano-mexicaine attendaient un rôle principal, elle n’a qu’en réalité un rôle secondaire. Son personnage, Jessi, n’apparait que dans quelques scènes clées. Si quelqu’un vient pour uniquement voir la prestation de Selena Gomez, il finira par être déçu. C’est tout de même un plaisir de voir un visage qui a marqué l’enfance de toute une génération revenir sur le grand écran.