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On regarde ou pas ? Machine, la nouvelle série d’Arte au pitch dingue

Avant sa diffusion sur Arte en avril, Machine débarque à Séries Mania et risque bien de coller un bon upercut au Festival des séries.

L’homme contre la Machine

L’attente générée par une série se joue parfois sur un cast, des images, une ambition ou un sujet. Et parfois, simplement sur la base d’un pitch. Un simple pitch et pendant une année entière, on attend avec une impatience démesurée une série. C’est le cas de Machine, annoncée en grande pompe au printemps dernier par Arte.
Mais le risque d’une telle attente ne peut être que la déception, que la série ne soit pas à la hauteur de nos attentes. Et si elle l’est ? Et si après un an, Machine était bien le projet fou qu’on attendait ?

Une jeune femme à la silhouette frêle, le visage dissimulé sous un épais sweat à capuche descend sur le quai d’une petite gare de province. Elle est venue se cacher : une unité de commandos de la DRSD est à ses trousses. Elle hérite du surnom « Machine » et d’un poste à la maintenance de la chaîne de production de l’usine d’électroménager. Mais la menace de délocalisation plane dans ce dernier bastion industriel et celle qui voulait faire profil bas se retrouve prise dans les feux de la révolte qui anime bientôt les ouvriers.

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Ce que ne savent ni les actionnaires coréens, ni l’émissaire du gouvernement, ni la préfète, ni la patronne des syndicalistes, c’est que cette petite intérimaire, avec ses dreadlocks et son attitude à la Clint Eastwood, est une ancienne des forces spéciales, rompue aux arts martiaux et au maniement des armes. Du combat solitaire au combat solidaire, Machine, qui sait déjà se battre, va apprendre à lutter.

Thomas Bidegain et Fred Grivois ont créé cet univers dingue, « quand Kill Bill rencontre Karl Marx« , avec Fred Grivois à la réalisation des épisodes, lui à qui l’on doit déjà la série Trauma ou l’unitaire d’OCS, L’invitation. Mais surtout, L’intervention, film sorti en 2019 et dont une partie du cast est impliqué dans Machine aujourd’hui (comme Guillaume Labbé ou Sébastien Lalanne).

« Une idée devient une force quand elle s’empare des masses »

On aime pas Machine, on adore ! Et il est bien difficile de ne porter son choix que sur une seule raison.
On aime avant tout la proposition singulière que nous fait la série. Singulière car elle parvient à mettre sur un pied d’égalité dans son traitement toute la question sociale, ce qui se dit sur le monde du travail, sur notre société actuelle, ses dérives, et la partie plus « fun » portée par le personnage lui même et les scènes d’action très très réussies que renferment la série. Dans bien des projets, le second aurait outrageusement pris le pas sur le premier quand ici, les deux se répondent, se complètent et s’enrichissent.

La série reprend la construction de bien des séries américaines des années 60-70 basées sur le même modèle, depuis Le fugitif, Les envahisseurs jusqu’à L’incroyable Hulk et bien sûr … Kung-Fu (avec David Carradine, méchant de Kill Bill, tout est lié). L’héroïne (le héros le plus souvent) arrive dans un lieu, rencontre un problème, aide à le résoudre et repart seul sur les routes. La différence étant qu’ici l’action s’écoule sur la saison entière et plus sur un épisode. L’avantage est que l’on peut davantage s’étendre sur les personnages, les étoffer (même si on pourra regretter que certains le soient moins que d’autres). La palme revient ici à J.P que JoeyStarr incarne avec une profondeur bouleversante, et qui trouve auprès de l’héroïne une place de nouveau mentor. Littéralement, il est celui qui va réparer « la machine ». Leur duo est l’une des plus fortes réussites de la série.

« Je savais me battre il m’a appris à lutter »

La narration de la série se découpe entre le conflit social qu’il faut résoudre, et le fil rouge / feuilletonnant qui donne vie à l’histoire. Comme une BD pulp, cette partie part dans tous les sens (au sens noble du terme), nous propose des cliffs incroyables (dont le tout dernier est à s’en décrocher la mâchoire), et ne lésine jamais sur la violence nécessaire et même totalement décomplexée. On navigue entre un monde terriblement réel (celui des délocalisations, des femmes battus, des petits laissés sur le bas côté de la route) à une BD où tout est possible, jusqu’à l’impensable. « C’était peut-être un peu dur non ? » … Non ça ne l’est jamais. Quand on règle ses problèmes dans cette série, c’est souvent radical, comme un exutoire. Pour le spectateur, c’est particulièrement jouissif !

Machine : Le marteau et la faucille ? Non le flingue et la hache

Machine est une l’une de nos séries d’action les plus réussies, elle réconcilie le fond et la forme. Et elle réussit sur les deux tableaux. Si l’écriture est jouissive et poussive comme on aime, la réalisation de Fred Grivois est maitrisée, soignée, précise et aussi décomplexée. Malgré les contingences d’une production télé, il se fait plaisir et ça se voit. Multipliant les références à la pop culture, en particulier l’univers de Tarantino (le bleu de travail de l’héroïne ressemble à celle de Black Mamba dans Kill Bill ou même les somptueux flashbacks du passé de l’héroïne),

Grivois soigne particulièrement ses scènes d’action et ses combats parfaitement chorégraphiés dans la plus pure tradition du genre. Il sait les raréfier (en moyenne 1 par épisode) pour mieux les soigner. On attend donc avec impatience cette séquence, qu’il s’agisse de régler son compte à un mec qui ne comprend ce que veut dire « non », comme de s’occuper de fachos en mission commandée, ou d’affronter le grand méchant à la fin. Ces combats ont parfois un petit quelque chose que l’on retrouvait dans les années 70 dans les films de Terrence Hill et Bud Spencer : des mandales fortes, à vous dégommer la tête, mais des méchants toujours prêts à y retourner…

Le tout sur une BO urbaine qui fait du bien. Voir Machine se bastonner dans un camion au son de « Femme like U » de K.Maro, ça donne une de ces patates ! Et le must du must c’est ce titre lors du grand combat final dans le 6, The Chemical Brothers « Galvanize » en mode Street-Fighters !

A lire aussi : On a vu pour vous… De grâce, entre polar et tragédie au port du Havre | VL Média (vl-media.fr)

« Les derniers mots sont pour les imbéciles qui n’ont rien dit de leur vivant »

Et que dire du casting ? On a déjà souligné la très impressionnante performance de JoeyStarr. Mais n’oublions pas non le génial Sébastien Lalanne en barbouze et qui signe une nouvelle fois une partition de haut vol. On sait qu’il est un comédien hors pair et qu’on ne voit pas assez, il excelle ici en grand méchant de la série. A l’opposé du spectre, on se régale de la partition ultra drôle d’Alexandre Philip, un de nos très bons acteurs de comédies tant il sait délivrer avec une grande gravité la moindre punchline pourtant hilarante et jouissive.

On note aussi la prestation hilarante et terrifiante aussi de Guillaume Labbé qui casse en 1000 morceaux son image avec un rôle étonnant. Son face à face avec Machine est SAVOUREUX et étonnant. Et puis bien sur, Margot Bancilhon. Actrice incroyable rôle après rôle et qui trouve ici un rôle si loin d’elle et qui pourtant lui va si bien. Elle habite littéralement chaque partie du corps de son personnage, de sa chevelure incroyable qui la caractérise tant au prolongement de ses jambes, armes fatales de ses actions. Un personnage à l’intensité folle, que l’on découvre dans cette capacité à changer au fil de ses rencontres, par ses K7 que sa grand-mère lui laisse dans son walkman, mais aussi dans sa dimension tragique qui l’empêche de totalement se racheter, préférant une forme de sacrifice pour aider les autres.

S’enfuir ou se rendre ? Telle est la question qui agitera éternellement ce personnage fascinant et incroyablement badass.

Machine (en compétition à Séries Mania
Les 11 et 18 avril sur Arte

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Rédacteur en chef du pôle séries, animateur de La loi des séries et spécialiste de la fiction française
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