Complot, séduction, argent et humour, le nouveau film de Nicolas Bedos possède tous les ingrédients d’une irrésistible comédie noire !
C’est quoi Mascarade ? Sous le soleil de la Côte d’Azur, un jeune homme séduisant (Pierre Niney) se laisse entretenir par une vieille actrice sur le déclin (Isabelle Adjani). Ce grand garçon se morfond dans l’alcool et la solitude, prétendant écrire un livre pour plaire à sa compagne. Ce dernier était pourtant promis à une carrière de danseur prématurément interrompue à cause d’une blessure. Mais lorsqu’il rencontre une jeune femme, belle, impétueuse et entrainante (Marine Vacth), il cède tout de suite à son charme. Se dessine alors un couple sans foi ni loi, si ce n’est celle de la quête de richesse, qui mettra en péril un agent immobilier (Francois Cluzet) et une ancienne star du cinéma (Isabelle Adjani).
L’essentiel
Après Monsieur et madame Adelman (2017), la belle époque (2019) et OSS 117: Alerte rouge en Afrique noire (2021), Nicolas Bedos vient de finir son 4e long métrage. Le réalisateur s’est décrit sans fausse modestie, comme un « romancier raté », vendredi 21 octobre 2022 sur le plateau de Quotidien. C’est d’ailleurs cela qui l’a amené à écrire et réaliser des films. Au casting on retrouve énormément de grands acteurs français de différentes générations, comme Isabelle Adjani, Francois Cluzet, Emmanuelle Devos d’un côté et Pierre Niney et Marine Vatch de l’autre.
Les deux jeunes acteurs incarnent la passion, la trahison, l’amour : des thèmes chers au réalisateur qu’il a déjà traité dans certains de ses films précédents. Nicolas Bedos adopte un ton féroce et un rythme soutenu pour parler des fougues de la jeunesse, des rapports hommes- femmes et d’une mondanité pervertie par l’argent et la soif de succès. C’est en mai dernier lors du Festival de Cannes, que Nicolas Bedos a présenté Mascarade pour la première fois. Il a depuis retiré 13min du film, pour « densifier » son film et apporter des dernières retouches avant sa sortie officielle.
On aime
On avait touché du doigt la ferveur de la passion dans Monsieur et Madame Adelman, comme on a effleuré le sentiment de nostalgie dans La belle époque, et ricaner en savourant les vannes ringardes de Hubert Bonisseur de la bath dans OSS 117. Mais cette fois-ci quelque chose a changé. Une maturité, une prise de risque ou tout simplement un auteur qui a trouvé sa ligne ? Dans tous les cas, Mascarade détonne.
On aime ce film pour la profusion des émotions émises sans halte, sans détours et sans prétention. On l’aime car pour la première fois le réalisateur nous fait l’honneur d’être à sa hauteur. Autrement dit, c’est une une vision sauvage et singulière du monde : l’insatiable passion masculine se heurte à l’irrésistible désir d’indépendance de la femme. Un leitmotiv chez l’auteur. C’est cette modernité qui excite mais c’est la même qui le condamne. Plus honnêtement et largement, Mascarade saisi avec grande justesse le rapport homme -femme, il nous fait aussi comprendre que ce rapport est existentiel.
C’est un cri du coeur qui chamboule, qui fait rêver et qui cerne avec habilité et humour un monde déconcertant, mais toujours amusant. C’est ce monde que nos deux héros attaquent, avec ardeur et fantaisie et ça nous fait trépigner d’envie. Dans ce film on rêve, on rie, on pleure. C’est un divertissement de haut vol où les meilleurs acteurs de leur génération et des précédentes insufflent l’énergie nécessaire pour créer un rythme, une émotion, un moment de cinéma. Ils servent un scénario bien écrit, aux multiples rebondissements, qui étonne et bouleverse de vérité une audience peu ou pas initiée au monde perverti par l’argent et la soif de succès. On décèle enfin la patte d’un auteur qui a muri dans son écriture, sa réalisation, son affirmation en tant que réalisateur. Mascarade ne laisse pas indifférent et par conséquent c’est un film qui mérite d’être vu. Hâtez-vous, c’est une vraie bouffée de vie.
On décèle enfin la patte d’un auteur qui a muri dans son écriture, sa réalisation, son affirmation en tant que réalisateur.
On aime moins
C’est un film français réalisé avec les mêmes grands manitous du cinéma français, installés depuis des lustres. Un cinéma français qui ne prend pas tant de risques. Déjà au casting, que des stars : Pierre Niney, Isabelle Adjani, Francois Cluzet, Marine Vatch, Emmanuelle Devos. Allons-nous blâmer un film novateur pour son souffle et son impétuosité ? Jamais. Cependant tous les rôles sont campés par des acteurs de renoms. Des têtes d’affiches, des « bankable », plutôt que donner sa chance à des acteurs peu ou moins connus. Critique naïve mais évidente pour un film qui a couté plus de 15 millions d’euros
Le véritable bémol de ce film pourrait être dans cette artificialité, cette esthétique, cette colorimétrie qui ne dénote rien de nouveau ou de beau. Une facilité, un manque de prise de risque à ce niveau-là qui est tout simplement dommage. Cependant c’est compréhensible, un film français de ce budget qui requiert trois fois plus de décors et de moyens que la moyenne ne peut se permettre de prendre de risques.
Mais on aurait adoré voir des images un peu passées, délavées du monde éteint, anachronique, fantastique que s’invente Isabelle Adjani. Ou bien des mouvements de caméra innovants et éloquents. C’est cela qui marque et fait l’originalité d’un réalisateur, en somme. Malheureusement cela devient trop rare, cependant le pari est gagné. L’histoire est bien racontée, c’est ce qui doit primer. L’enjeu du cadre, des plans et des mouvements sont les superficialités des génies, qui parfois restent mémorables. Laissons dormir le génie et profitons d’une histoire belle, vivante et renversante. C’est déjà bien pour un cinéma français qui se veut novateur. Rendez-vous dans les salles obscures le 1er Novembre !