
Alors qu’il entame sa deuxième année, Helldivers 2 continue de surprendre et de rassembler une immense communauté de joueurs aux quatre coins du monde. Comment expliquer un tel succès ?
Le lore
C’est à la suite d’une troisième guerre mondiale que l’humanité rebâtit la société autour d’un gouvernement fédéral mondial : la Fédération de la Super-Terre. Ce nouvel ordre se présente comme une “démocratie dirigée”, mais fonctionne en réalité comme une société autoritaire : patriotisme aveugle, interdiction de la critique, propagande omniprésente, culte de la guerre et glorification de l’armée.
Et pourtant, la Super-Terre continue de revendiquer les valeurs de liberté et de démocratie… du moins, dans ses discours officiels. Un paradoxe qui saute vite aux yeux : ces mots, vidés de leur sens, ne servent plus qu’à masquer une réalité totalitaire. Ils sont devenus des outils de propagande, répétés mécaniquement pour justifier l’oppression

À partir de l’an 2044, l’humanité entame la colonisation galactique. Elle finit par rencontrer deux espèces extraterrestres : les Terminides et les Illuminés. Le contact tourne rapidement au conflit. Officiellement, la Super-Terre répond à une menace. Mais toute rumeur affirmant que ce sont les humains qui ont attaqué les premiers, ou que ces espèces étaient pacifiques, est évidemment une manipulation de l’ennemi. Ceux qui les propagent doivent être signalés, puis rééduqués dans les camps de la liberté. N’hésitez pas à dénoncer tout comportement suspect : c’est votre devoir citoyen.
Quant aux socialistes, ils sont exilés sur Cyberstan, une planète si inhospitalière qu’ils n’ont eu d’autre choix que de modifier leur corps pour survivre, remplaçant peu à peu leur chair par du métal. C’est ainsi qu’est née la quatrième faction ennemie : les Automatons, une civilisation technologique à l’origine humaine, désormais robotisée et résolument hostile à la Super-Terre.
C’est après quarante ans de guerre sur trois fronts que la Super-Terre décide de lancer ses soldats les plus dévoués : les Helldivers, une force d’élite prête à mourir pour la patrie. Grâce à leur engagement sans faille, ils offriront à l’humanité la victoire… en quarante-trois jours.
Un siècle après la fin de la guerre, en l’an 2184, la Super-Terre règne d’une main de fer sur 262 planètes, réparties à travers 55 secteurs galactiques. L’espèce humaine, guidée par la Fédération, connaît alors une ère de prospérité sans précédent, du moins, en apparence.
Mais dans l’ombre de cette paix imposée, les trois ennemis jurés de la Super-Terre (les Terminides, les Illuminés et les Automatons), refont surface. Leur retour marque le début de la deuxième grande guerre intergalactique, plongeant à nouveau la galaxie dans le chaos.
C’est dans ce contexte brûlant que commence notre aventure, en tant que soldat d’élite du corps des Helldivers. Et désormais, c’est à nous de défendre la démocratie — à coups de fusil, de bombes orbitales, et de sacrifices héroïques. Pour la Super-Terre. Pour la liberté.
Gameplay
Helldivers 2 est un TPS (Third Person Shooter) qui nous place dans la peau d’un soldat d’élite au service de la Super-Terre : un Helldiver. Le principe du jeu est simple mais efficace : être catapulté sur une planète ennemie pour y accomplir diverses missions, telles que désactiver des batteries, extraire des civils ou encore détruire des infrastructures hostiles.
Jouable en solo ou en escouade de jusqu’à 4 joueurs, le jeu repose fortement sur la coopération. Si les premières missions peuvent être réalisées seul, les choses se corsent vite. En progressant dans le jeu, on accède à des niveaux de difficulté croissants, allant de 0 à 10. Plus on monte, plus les missions deviennent ardues, voire quasiment impossibles à réussir en solo, ce qui rend le travail d’équipe indispensable.
Helldivers 2 est donc avant tout un jeu multijoueur coopératif, fortement interactif. La carte des missions est en constante évolution : chaque opération accomplie par les joueurs dans le monde entier a un impact direct (même minime) sur l’avancée du conflit galactique en temps réel. Les joueurs vivent en direct l’avancée du conflit. Par exemple, il y a un mois, une mise à jour a marqué le retour des Illuminés, une faction ennemie redoutable.
Ils ont alors lancé une invasion massive de Super-Terre, causant la mort de milliards de civils. Alors que cinq des sept mégalopoles étaient déjà tombées et que les développeurs semblaient avoir prévu une ultime défense dans la capitale, Prosperity, un événement inattendu a eu lieu : la communauté chinoise s’est mobilisée avec acharnement pour défendre Prosperity-on-Sea, l’équivalent de Shanghai dans le lore du jeu. Grâce à leur ténacité, cette ville a été sauvée in extremis, contre toute attente.
Sous propos
Sous ses airs de jeu de tir bourrin et chaotique, Helldivers 2 s’impose en réalité comme une satire grinçante de la démocratie occidentale, ou plutôt, de ce qu’elle est parfois devenue : une façade idéologique derrière laquelle se cachent des intérêts géopolitiques, économiques et impérialistes.
Dans le jeu, on est catapultés sur des planètes lointaines pour « apporter la démocratie », ce qui, dans les faits, revient à massacrer des millions d’aliens au nom de la liberté, de l’ordre et de Super-Terre. Cette violence est non seulement acceptée, mais glorifiée, justifiée en permanence par un discours propagandiste omniprésent.
Prenons les Terminides, par exemple : ces insectoïdes belliqueux sont composés d’une substance appelée E-710. L’astuce est subtile, mais parlante : E-710, lu à l’envers, donne « OIL », autrement dit “pétrole”. Difficile de ne pas y voir une référence directe aux deux guerres du Golfe et à l’invasion de l’Irak, menée par les États-Unis sous un prétexte fallacieux de possession d’armes de destruction massive.
Ce que Helldivers 2 dénonce, derrière ses explosions et son humour noir, c’est cette manière dont des valeurs nobles comme la démocratie et la liberté sont vidées de leur sens. À force d’être brandies pour justifier des actions douteuses, elles finissent par sonner creux, voire par devenir les instruments mêmes de l’oppression.
Le jeu nous force, sans jamais le dire frontalement, à réfléchir à la duplicité de certains discours politiques : ceux qui défendent la démocratie, mais à géométrie variable. Oui à la liberté, mais seulement pour ceux qui adoptent nos règles. Oui à la démocratie, mais seulement si elle sert nos intérêts. Et si elle ne convient pas ? Alors on envoie les troupes. Ou dans ce cas précis… une escouade d’Helldivers.
