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Guy Debord, un écrivain à ne surtout pas lire !

C’est sans doute le livre le plus dérangeant écrit. Un chef d’œuvre qui dénonce la folie de notre siècle. Une dynamite. Chers lecteurs, préparez-vous à rencontrer le grand, l’inimitable, le visionnaire Guy Debord !

La Société du Spectacle est un essai de Guy Debord publié en 1967. Guy Debord analyse l’aliénation que provoque – et provoquera – la société de consommation, capitaliste, qu’il nomme société du spectacle. Son pamphlet est une « dynamite », qui trouvera un profond écho lors des mouvements de mai 68. Guy Debord prévient au début de l’ouvrage : « Il faut lire ce livre en considérant qu’il a été sciemment écrit dans l’intention de nuire à la société spectaculaire. » C’est un ouvrage complexe et troublant : la réalité n’a fait que confirmer les prédictions de Guy Debord.

Dans son livre, morcelés en d’innombrables paragraphes, Guy Debord dénonce le basculement du monde dans une représentation. « Le vrai est un moment du faux. » La société est devenue un vaste spectacle. Par spectacle, il faut entendre l’accumulation vertigineuse d’images et de marchandises produites par la société de consommation, déformant la réalité et déterminant totalement les rapports humains.

Dans cette société « où règnent les conditions modernes de productions », l’homme semble vivre dans une matrice. Sa propre identité vacille, au profit d’une représentation stéréotypée, d’une image artificielle de lui-même, le rendant apte à la consommation. De sujet, il est devenu consommateur. De citoyen, il est devenu spectateur. Toute la société est empoisonnée. Elle vit dans une illusion et jouit de sa propre folie. Guy Debord analyse la perte du sens, la déréalisation produite chez les individus : « L’extériorité du spectacle par rapport à l’homme agissant apparaît en ce que ses propres gestes ne sont plus à lui, mais à un autre qui les lui représente. C’est pourquoi le spectateur ne se sent chez lui nulle part, car le spectacle est partout. »

La triste réalité décrite par Guy Debord est plus actuelle que jamais. Aujourd’hui, le triomphe du capitalisme est total. Ce mode de vie s’étend sur tous les continents. Guy Debord décriait la société du spectacle comme le désir de mort de l’humanité. « Le spectacle est le mauvais rêve de la société moderne enchaînée, qui n’exprime finalement que son désir de dormir. Le spectacle est le gardien de ce sommeil. »

La société du spectacle

 Le règne des mass-médias

Nous y sommes. La tyrannie de la consommation est omniprésente. Plus moyen d’y échapper. Monstre vorace. La société du spectacle est profondément ancrée, à tel point qu’il semble désormais inimaginable de s’en soustraire. Sur elle repose notre économie. Le rêve spectaculaire a inondé chaque parcelle du quotidien. La société nous dit à quoi ressembler, nous montre les autoroutes à emprunter, elle forge ce que nous sommes. Car pour chaque produit, une identité se révèle. Il n’y a qu’à regarder le culte d’Apple. La fortune effrayante amassée par les maîtres de « l’ère de la marchandise. » Un homme est devenu le produit ce qu’il consomme. Nous sommes confrontés en moyenne à plus de 3000 annonces de publicités par jour, selon une étude américaine. Le triomphe de l’image est sans pareil, falsifiant le réel : « le spectacle est l’affirmation de l’apparence et l’affirmation de toute vie humaine, c’est-à-dire sociale, comme simple apparence. » Oui, l’image prédomine toutes les sphères de notre vie.

La politique est aussi devenue un champ du spectaculaire. L’hypermédiatisation y participe, le règne des mass-médias, de la consommation de masse. La télé-réalité est l’enfant prodige du spectacle. Le culte de l’apparence et du volatile. L’affaire Nabilla en témoigne, aussi bien que l’acharnement médiatique qui épuise l’information jusqu’à l’écœurement. Les débats politiques sont devenus des « duels », des affrontements. Le fond possède encore une importance tant qu’il sert la forme. Les hommes politiques se comportent comme des stars, des peoples, répondant au voyeurisme grandissant des citoyens-spectateurs. La politique est désormais une interminable série américaine, un show perpétuel. L’image est roi. La communication est devenue l’évangile du XXIème siècle.

Dans la société du spectacle décrit par Guy Debord, il n’existe aucune raison dans l’histoire, aucun sens, car « Le spectacle ne veut en venir à rien d’autre qu’à lui-même. » Vertige cyclique. Cauchemar interminable. L’opium du peuple, c’est aujourd’hui la marchandise. Guy Debord ouvre son livre par cette citation de Feurbach, qui résume parfaitement l’inquiétante époque dans laquelle nous vivons : « Et sans doute notre temps…préfère l’image à la chose, la copie à l’original, la représentation à la réalité, l’apparence à l’être…Ce qui est sacré pour lui, ce n’est que l’illusion, mais ce qui est profane, c’est la vérité. »

Alexandre Sordet

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