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On a vu pour vous … La Garçonne, la série avec Laura Smet (France 2)

La Garçonne, attendue à Séries Mania en mars 2020, est finalement l’événement de cette rentrée sur France 2. Portée par Laura Smet, saurait-elle satisfaire nos attentes ?

C’est quoi La Garçonne ? Dans le Paris des Années folles, Louise Kerlac est témoin du meurtre d’un proche, commis par des agents de l’Etat. Pour échapper au pire, elle doit disparaître. Convaincue que c’est au sein de la police qu’elle va trouver la meilleure planque et le moyen de se disculper, elle se travestit et prend l’identité de son frère jumeau, brisé par la guerre. Elle entre alors à la « Criminelle » à sa place ! Un monde interdit aux femmes et son rêve de toujours… La disparition d’une série de jeunes modèles qui posaient pour les peintres de Montparnasse va l’entraîner dans le monde de la fête et de la nuit, mais aussi la confronter à la part d’ombre de son jumeau tant aimé. La guerre a-t-elle pu en faire le monstre pervers que les preuves semblent désigner ? 
Et peut-elle se rapprocher de Roman Ketoff, un séduisant journaliste franc-tireur, sans mettre en danger le secret de sa double identité ?

« Dans ce monde qui n’a ni queue ni tête, je n’en fais qu’à ma tête
Un mouchoir au creux du pantalon, je suis chevalier d’Éon »

Sans contrefaçon (Mylène Farmer)
YouTube video

Un ambitieux projet

Dans cette période post confinement qui a tellement nuit à la fiction et aux chaînes, privées de marques fortes (hors feuilletons quotidiens), les choix opérés pour ouvrir leur saison nous parlent forcément beaucoup. Si TF1 opte pour Grand Hôtel, France 2 a choisi de proposer La garçonne, fiction en 6 épisodes initialement sélectionnée au Festival Séries Mania en mars et qui aura la lourde tâche de nous intéresser au destin de Louise qui devra revêtir 3 identités différentes durant les 6 épisodes pour mieux percer les secrets qui entourent le complot dont sa famille est victime et s’innocenter d’un crime commis.
A la manette, une auteure confirmée, Dominique Lancelot, rompue à l’exercice de la fiction industrialisée et efficace puisqu’on lui doit Section de recherches, la première fiction de TF1 véritablement industrialisée dans sa production. Avec La Garçonne, elle s’embarque dans un pari résolument différent : le combat d’une femme pour sortir des cases dans lesquelles on veut l’enfermer

« C’est l’affirmation et l’émancipation des femmes, l’élément le plus emblématique de la période, qui m’a embarquée. Louise Kerlac est née de l’intention d’incarner ce moment d’un combat encore d’actualité »

Dominique Lancelot


France 2 renoue ainsi avec un genre qui a longtemps été le sien, la fresque historique, mais qu’on a adossé ici avec du polar.
Belle distribution pour cette fiction portée en grande partie par Laura Smet, sans oublier Gregory Fitoussi, Clément Aubert ou encore Lilly-Fleur Pointeau, mais où la narration n’est jamais écrasée par le poids de guests trop présents. On assiste à une jolie reconstitution d’un Paris des années folles, spécialement sa vie nocturne sur laquelle on semble avoir focalisé une grosse partie de l’attention, le reste laissant malheureusement transparaître que, faute de moyens suffisants, on n’a pas pu aller aussi loin qu’on l’aurait voulu (la séance d’hypnose nous renvoyant au front en 1917 mais dont on ne voit jamais aucune images, en est un exemple. Un aspect qui transparaît d’autant plus qu’au même moment, nous avons vu Perry Mason qui elle ne s’est pas privée de nous les montrer – on est bien d’accord que c’est HBO et que ce ne sont pas les mêmes budgets).
Sur la forme, il est indéniable qu’il y a une envie de proposer quelque chose de différent, porté par une héroïne nouvelle et plus complexe, en utilisant l’époque comme reflet de la société d’aujourd’hui et des combats qui la traversent.

Laura SMET

Une intrigue complexe et une série qui navigue entre deux eaux

Dans les séries, en gros, on en trouve deux types : plot driven (les séries où l’intrigue prime) et character driven (les séries où les personnages priment). Dans le cas de La Garçonne, on sent clairement qu’il y a une volonté d’être un mélange des deux c’est à dire à la fois de s’intéresser au choix de Louise, ce qui la motive et comment elle se heurte sans que les autres ne le sachent, à un modèle de société dont elle chercher pourtant à s’affranchir ; et en même temps à faire avancer 2 intrigues très (trop ?) importantes.

Le caractère très moderne du personnage de Louise est par exemple très bien montré dans le début de la série. Sur le front, c’est elle qui prend les choses en main pour soigner un patient, c’est elle qui navigue entre les tirs et les bombes pour ramener ce patient. Occasionnellement, ces éléments de présentation sont dispatchés ici et là dans la saison jusqu’à un ultime petit élément posé assez intelligemment en fin de saison : hors du contexte de la guerre, si Louise veut conduire une voiture, c’est en homme qu’elle doit le faire, et ce, malgré tout ce qu’elle a pu être accomplir avant. Le développement de certains personnages et l’utilisation des images contraires pour une époque, pour présenter le nouveau visage d’un féminisme moderne, aurait mérité un plus grand développement.

« Louise, la sœur aurait voulu être flic, comme son père, mais il n’y a pas de femme flic en France avant 1968, et Antoine, son frère jumeau, aurait voulu être peintre comme sa mère, mais leur père, commissaire, l’a poussé à passer le concours de la police pour faire comme lui. »

Mother Production

Tous ces éléments restent malheureusement trop rares car, par soucis d’efficacité, la série bascule vite dans le « plot driven« , accentué par la présence de non pas une mais 2 grosses intrigues qui courent sur toute la saison. Deux intrigues intéressantes qui captent l’attention du spectateur car suffisamment complexes pour ne pas la relâcher. Mais on se demande assez vite si en réalité, La Garçonne, mini série, n’aurait pas gagné à être une série au long court. Tout semble d’ailleurs construit en ce sens : un concept fort (l’identité secrète pour enquêter façon super héros) et original d’une série policière avec son enquête (les modèles assassinées) qui aurait gagné à être 1 enquête = 1 épisode ; son fil rouge (l’assassinat des proches de Louise et la conspiration dont elle est victime) qui avec une série régulière aurait pu être développé sur plusieurs saisons. Du coup comme tout doit être achevé en 6 épisodes, il y a un sentiment de trop plein qui ne laisse plus assez la place aux personnages pour exister. Et si toutes les réponses sont apportées à l’issu de l’épisode 6, on ne peut s’empêcher d’y voir une fin de saison mais plutôt une fin de série.

En revanche, le suspense est entretenu sur toute la saison, les effets de surprise jamais oubliés même si souvent attendus et les 2 intrigues solides. Il y a un vrai attachement pour certains personnages comme le Docteur Paul ou encore Valbone (le frère de Louise) tandis que certains ne sont que trop peu esquissés (à l’image de Lydia).

Laura SMET Grégory FITOUSSI

Si on valide le plaisir du feuilleton rencontré sur la série, on reconnaît qu’elle ne va pas assez loin dans tout ce qu’elle aurait pu dire, faire, montrer y compris visuellement (on aurait aimé y retrouver l’audace de certains plans de la série de France 2 « Empreintes Criminelles » qui prenait place à la même époque). On sent qu’il y a une vraie envie des auteurs et de la production de proposer quelque chose de différent mais où l’ensemble se heurte encore à une structure trop « classique ».

Ce que l’on retient de La Garçonne

Une volonté de proposer quelque chose de différent, un univers qui change

Un casting renouvelé, loin des têtes d’affiche habituelles des séries

Une efficacité dans la narration

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Rédacteur en chef du pôle séries, animateur de La loi des séries et spécialiste de la fiction française
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