Face à ce que le Président Emmanuel Macron qualifie de « menace pour la cohésion nationale« , l’exécutif promet des manoeuvres renforcées d’ici la fin de l’année. Mais que signifie « entrisme islamiste » ?
Une stratégie d’influence ?
L’ « entrisme islamiste » est un terme de plus en plus employé dans le discours politique français. En particulier dans le sillage de la lutte contre le séparatisme. Il désigne une stratégie d’influence progressive et organisée de certains courants islamistes, notamment les Frères musulmans.
Une influence qui s’effectue au sein des institutions ou encore associations afin d’imposer, à terme, une vision rigoriste de l’islam, en contradiction avec les principes républicains. Ce phénomène, souvent qualifié d' »islamisme par le bas« , ne repose pas sur des actes violents mais sur une infiltration idéologique et sociale
Née en Égypte en 1928, la confrérie des Frères musulmans porte un projet d’islam politique, conservateur et structuré. Le mouvement a été interdit dans plusieurs pays comme l’Égypte, l’Arabie saoudite ou encore la Jordanie. En France, certaines de ses ramifications, via des associations comme Musulmans de France sont accusées d’oeuvrer à une forme d’entrisme. Influence sur la formation des imams, implications dans des associations culturelles ou éducatives, ou encore tentatives d’orienter les discours religieux locaux.
Ce phénomène a été jugé suffisamment préoccupant. Emmanuel Macron a convoqué, lundi 7 juillet, un nouveau conseil de défense de la sécurité nationale consacré au sujet. Le Président, irrité par la fuite d’un rapport jugé alarmant, avait déjà demandé au gouvernement de nouvelles propositions pour faire face à ce qu’il qualifie de « menace grave«
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Un nouveau cadre législatif en préparation
À l’issue du conseil, le chef d’État a annoncé un renforcement significatif des manœuvres juridiques et administratives contre les structures soupçonnées d' »entrisme islamiste« . Parmi les mesures :
La création d’un mécanisme de gel des fonds élargi, inspiré de celui utilisé contre le terrorisme. Le but étant de bloquer les financements d’entités soupçonnées de visées islamistes.
Extension des dissolutions administratives, qui pourront désormais s’appliquer non seulement aux associations, mais aussi aux fonds de dotation. Des fonds, souvent utilisés pour faire transiter des financements.
Liquidation judiciaire des biens d’organisation dissoutes, avec nomination d’un curateur chargé de gérer leur démantèlement financier.
Sanctions administratives renforcées. Accompagnées d’astreintes journalières, elles seront à l’encontre des associations ayant signé le contrat d’engagement républicain mais ne le respectant pas.
Emmanuel Macron a demandé que les textes nécessaires soient finalisés dans les semaines à venir. La loi doit être prête d’ici la fin de l’été et applicable en 2026. En parallèle, un renforcement du contrôle des publications religieuses est également prévu. Un allongement des délais de prescriptions pour les ouvrages incitant à la haine ou a la discrimination est également appliqué.
Une ligne de crête entre fermeté et respect des libértés
La stratégie présidentielle vise à empêcher toute instrumentalisation de l’islam à des fins politiques. Mais, tout en préservant l’équilibre avec les droits fondamentaux. Emmanuel Macron s’est d’ailleurs voulu rassurant en appelant à ne pas généraliser. Il souhaite réunir à l’automne le Forum de l’islam de France ( Forif ). L’ objectif est de continuer le dialogue avec les représentants d’un islam compatible avec les valeurs républicaines.
Mais ces annonces suscitent de vives réactions dans le paysage politique. La France insoumise accuse le gouvernement de « stigmatiser les Français de confession musulmane« . Marine Le Pen, elle, dénonce. Elle évoque des « mesurettes administratives » et appelle à « chercher, dénoncer, débusquer, couper les financements, interdire les publications » de cette « idéologie totalitaire« .
Au-delà des clivages partisans. La notion d' »entrisme islamiste » interroge la frontière entre contrôle des dérives religieuses et respect de la liberté de culte. À l’heure où le Président promet un texte législatif d’ici à l’automne. Les débats promettent d’être vifs à l’Assemblée comme dans l’espace public.