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On a vu pour vous… The great, satire délirante autour de Catherine la Grande

Extravagante voire déjantée, The Great s’inspire (très) vaguement de l’histoire de l’impératrice Catherine II de Russie. 

C’est quoi, The great ? Catherine (Elle Fanning), princesse allemande âgée de 15 ans dont la famille est ruinée, arrive en Russie pour épouser l’empereur Pierre III (Nicholas Hoult). Jeune oie blanche romantique, elle constate vite que son mari est un crétin égocentrique, infidèle et violent et que la Cour est un ramassis de pleutres serviles et de dames idiotes. Consternée, Catherine sombre dans la dépression. Mais avec sa femme de chambre Marial (Phoebe Fox) et un comte Orlo (Sacha Dhawan) moins abruti que les autres, elle commence à envisager de renverser l’Empereur et de prendre le pouvoir, portée par la philosophie idéaliste des Lumières… 

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Le réalisateur australien Tony McNamara avait surpris en 2018 avec son film The Favorite qui racontait  le règne de Anne Stuart de manière provocatrice et non conventionnelle. Sa série The great (sur Hulu aux États-Unis et en France sur StarzPlay depuis le 18 Juin), est une sorte de déclinaison de ce film, avec cette fois Catherine II de Russie en guise d’héroïne de cette fiction historique… pas du tout historique. Comédie satirique qui frôle le ridicule, avec un déchaînement d’humour burlesque outrancier et souvent vulgaire, la série assume et même revendique son approche totalement bizarre et délirante. 

L’excuse – il en faut une, en l’absence de toute exactitude ou plausibilité historique – est de mettre en scène la  jeune princesse prussienne Sofía Federica Augusta de Anhalt-Zebst qui, grâce à son mariage avec le futur empereur Pierre III de Russie en 1745, devient tsarine. Et qui, après un coup d’État en 1762, va entrer dans l’Histoire sous le nom de Catherine la Grande et régner sur la Russie jusqu’à sa mort en 1796. The great s’empare du parcours de cette jeune fille qui tente d’abord de se faire une place à la Cour impériale en gagnant l’amour de son mari et le respect des autres… puis de prendre le pouvoir, quitte à risquer sa vie en se lançant dans des intrigues palatiales.

Catherine La Grande… ou à peu près

Commençons par lever toute ambiguïté  : il n’y a quasiment rien d’historiquement exact dans la série – excepté l’intérêt de Catherine pour les Lettres et la philosophie, son désir de construire un empire plus progressiste… et la rumeur à propos du cheval. Pour le reste, The Great l’annonce clairement : elle raconte une histoire «occasionnellement vraie»… et le plus souvent fausse. Par exemple, la vraie Catherine a épousé Pierre alors qu’il n’était encore que le futur héritier du trône, la mère du future tsar n’a jamais régné, il n’est pas le fils de Pierre le Grand, et on pourrait continuer longtemps. De sorte que pour une biographie, on conseillera plutôt la série avec Helen Mirren, judicieusement intitulée Catherine la Grande (disponible sur MyCanal).

Ceci étant dit, The great est un mélange plus que réussi : série d’époque, drame, intrigue politique et farce burlesque composent un cocktail détonnant et surprenant. Il y a quelques moments lumineux et même d’une intensité inattendue, comme le terrible dernier épisode qui bascule dans la tragédie ou la manière dont la série tend vers l’émancipation de certains de ses personnages (Catherine évidemment mais aussi Orlo). Le plus souvent cependant, on frôle l’hystérie avec des scènes hallucinantes reposant sur le ridicule de la plupart des personnages et des gags astucieusement exploités pour souligner l’absurdité de la cour de l’empereur Pierre, la trivialité de fonctionnaires rustres et serviles, la stupidité et la superficialité de leurs épouses, la frénésie sexuelle et alcoolisée généralisée, la cruauté et la folie d’un tsar sadique et débauché. Les Russes apprécieront.

Il faut donc accepter la mise en œuvre pour le moins non-académique du sujet, mais quoi qu’il en soit, l’un des plus grands atouts de la série est certainement le choix de Elle Fanning pour incarner Catherine. En jouant sur toute une palette d’expressions, parfois avec un simple regard, elle passe de la comédie à la tragédie en une fraction de seconde, rend crédible l’évolution (pourtant très rapide à l’écran) d’un personnage qui passe de l’innocence absolue de l’adolescente fleur bleue au désenchantement puis aux manipulations d’une femme ambitieuse. Et Nicholas Hoult est absolument génial dans le rôle de Pierre,  ce tsar dépeint comme un connard (pardon, mais c’est le mot utilisé dans le synopsis officiel de la série) grossier, maladroit, immature, irresponsable, impulsif et tyrannique… mais parfois touchant et finalement terrifiant car c’est un véritable psychopathe.  

Pierre III, tsar de Russie, dans toute sa splendeur…

Les autres personnages, au début très caricaturaux, gagnent rapidement en épaisseur et en nuances et ils ne manquent pas d’intérêt. Marial, aristocrate dégradée au rang de domestique qui devient la principale amie et confidente de Catherine ; le charmant Leo (Sebastian De Souza), amant de l’impératrice ; le général Velementov (Douglas Hodge) commandant d’une armée qui va de défaite en défaite; Orlo, théoricien politique et complice de la tentative de coup d’état ; l’omniprésent archevêque; Georgina (Charity Wakefield), dame de la cour et son époux Grigor (Gwilym Lee), meilleur ami de Pierre… Voilà quelques-uns des personnages qui parcourent le palais. Sans oublier un certain Voltaire dans le dernier épisode, symbole de l’influence de la pensée des Lumières sur la jeune héroïne. Et l’un dans l’autre, The Great devient vite addictive et trace le portrait saisissant de sa Catherine la Grande et une satire inspirée du pouvoir. 

Au risque de nous répéter, The great feint de raconter une histoire inspirée de la vie de Catherine La Grande quand en réalité, elle assume totalement sa nature de fiction parodique et satirique. Quand on en a conscience et si l’on adhère à un humour souvent trivial, la série s’avère divertissante et irrévérencieuse, puis étrangement dérangeante et dramatique ; une sorte d’hybride entre le Marie-Antoinette de Sofia Coppola, The Royals et Dickinson, surprenante mais étrangement addictive. Et dans ce cas, on crie Huzzah pour Catherine !

The great (Hulu)
10 épisodes de 55′ environ.
Disponible sur StarzPlay.

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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