Lauréat de la Palme d’or du 77ème Festival de Cannes, à 53 ans Sean Baker s’impose comme l’une des figures du cinéma hollywoodien qui refuse les codes de cette industrie.
Rebel, surprenant et réaliste, Sean Baker, spécialisé dans le cinéma indépendant, s’est frayé un chemin sur les tapis rouges. Révélé avec Starlett en 2012, il a séduit le public en montrant une Amérique loin des super-héros. Samedi 25 mai, son film Anora, qui retrace la vie d’une travailleuse du sexe à New York, a gagné la Palme d’or du jury du Festival de Cannes. Une victoire pour le « Maverick » du cinéma indépendant américain.
Sean Baker : des débuts loin d’Hollywood…
Il naît le 26 février 1971 à New York d’une relation entre un avocat et une enseignante. En grandissant, Sean se découvre une passion pour la réalisation lorsque sa mère l’emmène voir Universal Monster. Le jeune homme rejoint l’université de New York afin de suivre une licence d’études cinématographiques.
À ses débuts, Baker réalise des petites productions tournées avec un budget très limité. En 2000, il réalise son premier long métrage intitulé Four Words. Quatre ans plus tard, avec un budget de seulement 3 000 dollars, il co-réalise le film Take-Out, qui le fait connaître dans le milieu cinématographique. Cependant, c’est son long métrage Prince of Broadway (2008) qui lui apporte une certaine notoriété. Il remporte son premier prix au festival international du film Entrevues, à Belfort, en France, où il est récompensé par le prix du public. Cette reconnaissance marque le début de sa mise en avant sur la scène cinématographique.
Mais c’est avec son film Starlet qu’il connaîtra un franc succès. Ce film relate l’amitié inattendue entre une jeune femme de 21 ans et une octogénaire de 85 ans et dépeint une Amérique sans artifices. Une réalité, qui fait du bien.
..vers les tapis rouges
Ce qui vaut le succès de Sean Baker, c’est surtout son originalité a abordé des sujets de la vie quotidienne. Avec un autre film, appelé Tangerine, le réalisateur se démarque. Avec des acteurs, tous amateurs et recrutés via YouTube et Vine, ainsi que des images tournées à l’ iPhone 5, à Los Angeles, cette particularité du film a fait sa renommée.
Sean Baker remporte le prix du jury lors du festival du cinéma américain de Deauville. Le film figure également au festival du film de Sundance lors de cette même année 2015.
Il monte les marches du Festival de Cannes à l’occasion de la Quinzaine des Réalisateurs en 2017 pour présenter son long-métrage The Florida Project. En 2021, il apparaît de nouveau à Cannes, en compétition officielle pour la 74e édition avec le film Red Rocket. Et c’est avec Anora, qu’il remporte lors de la 77e édition du Festival de Cannes la Palme d’or du jury. Un prix honorable pour ce film décrit par Greta Gerwig, présidente du jury, comme « magnifique, empli d’humanité ».
Anora, son dernier succès
Sean Baker ne cache pas son attrait pour le monde des travailleurs du sexe. Il ne cesse de l’explorer en le montrant avec un réalisme sulfurant. Dans Anora, on découvre l’histoire d’une jeune strip-teaseuse new-yorkaise et de sa rencontre avec le fils d’un oligarque russe. Cette curiosité et son génie lui vaudra la Palme d’or de cette 77e édition du Festival de Cannes.
« Je suis devenu ami avec de nombreux travailleurs du sexe et j’ai réalisé qu’il y avait un million d’histoires à raconter dans leur monde« , explique-il à Cannes en début lors de la conférence de presse de Anora. « S’il y a une intention avec tous ces films, c’est de raconter des histoires humaines, des histoires qui sont, espérons-le, universelles. Et d’éliminer la stigmatisation qui pèse sur ce gagne-pain. »
Se rapprocher au plus près de la réalité, c’est le mot d’ordre pour le réalisateur. Pour se faire, il a pu compter sur Andrea Werhun, une ancienne travailleuse du sexe, engagée comme consultante sur le film. « Je voulais qu’Anora représente correctement une jeune travailleuse du sexe aujourd’hui à New York City« , souligne le cinéaste. « L’un des thèmes que je voulais explorer, c’est celui du pouvoir. Anora a du pouvoir. Elle en a conscience. Elle est en contrôle, même lorsque le monde autour d’elle s’écroule« .
La critique a rapidement comparé la structure du film à celle de Pretty Woman. Mais, la version de Sean est plus crue et sombre. « J’ai grandi dans les années 1980, et Pretty Woman m’a influencé, même si c’est de manière inconsciente », confie-t-il. « Cependant, même si j’utilise les codes de la comédie romantique, il était important de l’ancrer dans une réalité que Hollywood ne serait pas capable de montrer exactement. »
Durant sa carrière, le réalisateur s’illustre également à la télévision, avec la création de la sitcom Greg the Bunny (2002–2006) ou avec la publicité Taco Bell, en 2022.